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giles' pour placer la prise de Jérusalem par le sultan d'Égypte en 1098, et après la déroute de Corbogha

devant Antioche2.

Nous avons vu dans ce qui précède que les témoignages arabes et latins les plus dignes de foi s'accordent à mettre la prise de Jérusalem par les Égyptiens en l'année 1098, quoique la plupart des orientalistes et des historiens aient préféré une date plus reculée de deux années, en faveur de laquelle on peut alléguer une autorité imposante, celle d'IbnAlathîr. Il est juste toutefois de faire observer que, pour la période dont il s'agit, le récit du célèbre chroniqueur arabe laisse beaucoup à désirer: des faits importants y sont passés sous silence; d'autres, rapportés à une date différente de la véritable, comme, par exemple, la mort du sultan ghaznévide Ibrâhym, fils de Maç'oud, qui se trouve placée en l'année 481 (1088)3, tandis qu'il est bien connu par le témoignage d'autres historiens, confirmé par celui des monnaies, que ce sultan ne mourut que onze années plus tard (rédjeb 492-juin 1099).

Michaud, édition de 1829, 3° partie, p. 96, 97, où l'on a fait observer que le récit de Godefroy de Viterbe paraît n'être qu'une reproduction de celui d'Ekkart.

1 « Etenim quum audisset quod Turci essent a nobis superati apud Antiochiam, venit ad oppugnandum Iherusalem. » (C. xvi, p. 277 de l'édition de l'Académie, Historiens occidentaux des croisades, t. III.) 2 Commentationes historice et critice, Basileæ, 1741, in-4°, p. 330. p. 333, n. e et f.

Cf.

3 T. X, p. 110. Cf. Abou 'lféda, IV, 268, ou édit. C. P., II, 208; Firichta, édition lithographiée, t. I, p. 84, 85.

Cf. nos Mémoires d'histoire orientale, 1" partie, p. 184, et nos

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Dans plusieurs cas, l'auteur du Câmil expose les diverses opinions de ses devanciers, sans essayer de résoudre les difficultés. En ce qui concerne le fait qui nous occupe, il ne faut pas oublier qu'Ibn-Alathîr ne l'a pas raconté dans un paragraphe spécial, placé à son véritable rang dans la série chronologique des événements: il s'est borné à le mentionner assez brièvement dans un paragraphe consacré à un fait postérieur de trois années à la date adoptée par lui pour le premier.

Des deux opinions en présence, nous devrons donner la préférence, indépendamment de toute autre considération, à celle qui s'accordera le mieux avec l'ensemble des faits, tel qu'il nous est connu par les meilleures sources. Or, tel est le cas, pensons-nous, pour la date la plus récente. Mais pour faire partager au lecteur notre conviction, nous croyons à propos de retracer le résumé des événements dont la Syrie et la Palestine furent le théâtre,

Recherches sur le règne de Barkiarok, p. 53, note, ou dans le Journal asiatique, septembre-octobre 1853, p. 237, n. 2. — Abou❜lféda (III, 242, ou édit. C. P., II, 202 ) a signalé un fait sur lequel Ibn-Alathîr est en désaccord avec un autre historien, son contemporain, dont il sera question plus loin. Je veux parler de la mort du prince Mir dâside, Mahmoud, fils de Chibl-Eddaulah Nasr, souverain d'Alep, laquelle, selon Ibn-Alathîr (cf. t. X, p. 72, 1. 6), n'eut lieu qu'en l'année 469 (5 août 1076-24 juillet 1077). D'un autre côté, cette mort est placée deux années plus tôt par Kémal-Eddin, l'historien d'Alep (ms. 728, fol. 94 r°), dont le calcul est adopté par IbnKhallicân (Biographical dictionary translated from the arabic, by B Mac Guckin de Slane, t. III, p, 140) et par Ibn-Djouzy (fol. 155 vo, 156 ro, 159 r° et v°).

pendant l'espace de trois années environ qui s'écoula entre la mort du sultan Tutuch et l'arrivée des chrétiens devant Antioche. Nous emprunterons les principaux traits de ce tableau à l'histoire d'Alep de Kémâl-Eddin, auteur dont la naissance eut lieu près d'un siècle après l'époque dont nous nous occupons, mais qui mérite toute confiance pour ce qui concerne spécialement les annales de la Syrie septentrionale, puisqu'il était natif d'Alep, ville où son père, son aïeul et son bisaïeul avaient été revêtus de la dignité de kadhi (juge). Son récit est, d'ailleurs, beaucoup plus détaillé que celui de son contemporain Ibn-Alathîr.

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Tutuch, qui succomba, comme nous l'avons dit plus haut, dans une bataille livrée à son neveu Barkiarok, le 26 février 1095, avait laissé plusieurs fils, dont les deux aînés, Rodhouân et Dokâk, furent reconnus rois, l'un à Alep, l'autre à Damas. Le dernier ayant député un ambassadeur à Barkiarok pour lui notifier son avénement, le sultan lui renvoya son ancien gouverneur Toghtékin2, qui avait été fait prisonnier dans la bataille où périt Tutuch. Toghtékin épousa la mère de Dokak et devint toutpuissant à Damas sous le nom de ce prince, tandis que dans Alep l'autorité était exercée au nom de

Le Brodoan d'Albert d'Aix, liv. XII, c. xix, p. 375 du recueil de Bongars.

2 Ou Toghdékin, le Doldequinus de Guillaume de Tyr et de Foucher de Chartres, le Tuldequinus de l'Historia Hierosolymitana, apud Bongars, p. 610.

Rodhouân par Djénah-Eddaulah Hoçaïn, qui l'avait élevé et avait épousé sa mère1.

Dans l'année même de son avénement, Rodhouân sortit d'Alep avec Djénah-Eddaulah et fut rejoint par Yâgui-Syân, prince d'Antioche2, et par un chef turcoman, Youçouf, fils d'Abek. Tous ensemble se dirigérent vers Édesse, emmenant avec eux des otages livrés précédemment par les habitants de cette ville. Rodhouân prétendait se la faire remettre par les officiers que son père y avait placés. Mais, à peine l'armée eut-elle établi son camp devant Édesse, que Yâgui-Syân et Youçouf voulurent se saisir de la personne de Djénah-Eddaulah, afin d'exercer seuls toute l'autorité sous le nom de Rodhouân. DjénahEddaulah prit la fuite, traversa l'Euphrate et rentra dans Alep, où il fut suivi par Rodhouân. Les otages d'Édesse profitèrent de cette circonstance pour s'enfuir du camp des confédérés et retourner dans leur ville. Quant à Yagui-Syân et à Youçouf, ils se retirèrent après s'être ainsi rendus suspects au prince d'Alep. Celui-ci ayant écrit à Socmân, dont le fief était Saroudj (Bathnae 3), pour le mander à son se

1 C'est par inadvertance que Deguignes (t. II, 2o partie, p. 84) et H. Audiffret (Biogr. univ. t. XXXVII, p. 217, article Redhwan) ont donné à Yaghi-Sian, émir d'Antioche, le titre d'époux de la mère de Rodhouân.

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D'après Ibn-Alathîr (t. X, p. 168), ce chef, qui avait pour père Mohammed, fils d'Alp, le Turcoman, s'était d'abord opposé à Rodhouân et à Djénah-Eddaulah. Mais il ne tarda pas à conclure la paix avec eux, et ce fut d'après son conseil que Rodhouân entreprit une expédition dans le Diarbecr.

3 D'après Ibn-Alathîr (t. X, p. 168; cf. Abou 'lféda, III, 298),

cours, Socmân se mit en marche et traversa l'Euphrate. Youçouf se porte à sa rencontre avec un nombreux détachement. Socmân en conçoit de la crainte, mais Youçouf lui témoigne des dispositions pacifiques et se joint à lui. Djénah-Eddaulah, ayant ressenti de l'inquiétude à cause de leur réunion, sortit d'Alep avec l'armée de Rodhouân. Youçouf le rencontra dans le voisinage de Merdj Dâbik, mais il fut mis en fuite et son camp livré au pillage par l'ennemi, assisté de Socmân. Djénah-Eddaulah, Socmân et le chef kilabite Watthâb, fils de Mahmoud, retournent à Alep, et Rodhouân donne en fief, à

Rodhouân et ses confédérés s'étant d'abord dirigés vers Saroudj. Socmân les gagna de vitesse, arriva dans cette ville avant eux, la prit et les empêcha d'y entrer. Par ses ordres, des habitants de Saroudj allèrent trouver Rodhouân pour lui porter plainte contre ses soldats qui dévastaient leurs récoltes et pour le prier de s'éloigner. Il consentit à leur demande et se dirigea vers Édesse, où commandait un Grec appelé Alfaraklyt, qui avait affermé cette ville de l'émir Bouzân, son ancien prince, mis à mort par Tutuch l'année précédente. Ce Grec combattit les musulmans avec l'aide de ses adhérents, leur opposa une vive résistance dans la citadelle et leur donna de sa bravoure des preuves auxquelles ils étaient loin de s'attendre. Rodhouân vint toutefois à bout de s'emparer de la place et la livra à l'émir d'Antioche qui la lui demanda. On pourrait croire que le mot be, dans ce récit d'Ibn-Alathîr, est la transcription du mot grec depinλutós a illustre ». Mais c'est plutôt, pensons-nous, une altération du titre grec de Curopalate, que Matthieu d'Édesse donne au chef d'Édesse, Thoros ou Théodore, fils de Héthoum. D'après le chroniqueur arménien (Bibliothèque historique arménienne, de M. Dulaurier, p. 208), Thoros reçut le commandement d'Édesse des mains de Tutuch, après la mort de Bouzân. On peut encore voir sur ce personnage la même chronique, p. 209, 210, 211, 218, 219, 220, 221, et la note de son traducteur, p. 429. (Cf. le Recueil des historiens des croisades, Documents arméniens, t. I, p. 30, n., 35, 38.)

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