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défaire auparavant du corps de Mamluks que Mourad-Bey avait laissé en position à Syout.

Le 21 fructidor, il s'embarqua à Abou-Girgeh avec sa division, et arriva, le 26, à la hauteur de Darout-el-Cheryf. C'est près de ce village que le canal Joseph prend les eaux du Nil pour les porter dans le Fayoum, en traversant la fertile province de Beny-Soueyf. Desaix fit occuper ce point important, et y laissa une chaloupe pour croiser à l'entrée du canal, et protéger la navigation avec le Kaire. Escorté par deux demi-galères, il partit avec quatre bataillons pour Syout, où l'ennemi avait réuni tous ses bâtimens de guerre, et se fit suivre à quelque distance par la 21. demi-brigade, sous l'escorte d'un aviso.

Le 28, Desaix arriva à Syout; l'ennemi avait évacué cette ville et fait remonter sa flottille vers Girgeh. Trois kachefs de Soliman-Bey, 300 Mamlouks, quelques Arabes, avec leurs femmes, leurs enfans et de nombreux bagages, après avoir fait un ricochet dans les terres, étaient descendus au village de Beny-Adyn, à six lieues au-dessous de Syout, sur les confins de la Moyenne et de la Haute-Égypte. Desaix résolut d'aller les surprendre. La vallée entre Syout et la chaîne libyque est très-étroite. Desaix partit de cette ville le 1. jour complémentaire, laissa le Nil derrière lui, et arriva bientôt au pied des montagnes. Il suivit la lisière du désert pendant tout le jour, rentra dans la vallée, et arriva à Beny-Adyn le lendemain; mais l'ennemi, instruit de sa marche, avait disparu, et s'était dirigé vers le Fayoum,

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pour y renforcer Mourad. Le 3°. complémentaire, Desaix rentra à Syout, où il laissa une demi-brigade et un aviso pour escorter un convoi considérable de grains qu'il envoyait au Kaire. Ce général se rembarqua sur sa flottille pour se rendre à Darout-el-Cheryf, où il arriva le 5. complémentaire.

Certain qu'il n'avait plus rien à craindre, pour le moment du côté de la Haute-Égypte, Desaix résolut de se porter dans le Fayoum, où l'armée de Mourad-Bey se grossissait d'un grand nombre de fellâh et des Arabes du désert. Il laissa quatre bâtimens de guerre pour croiser à Darout-elCheryf, et ordonna à deux chaloupes canonnières de descendre le Nil, à la hauteur de la division qui devait suivre sur la flottille le canal Joseph. Desaix y entra le 2 vendémiaire an vII, et, après une pénible navigation de dix jours, son avantgarde aperçut, le 12, un poste de Mamlouks à la hauteur du village de Menekia. Desaix ordonna aussitôt le débarquement, et se porta, avec un détachement, sur les mamelons de la chaîne libyque. Il s'engagea une fusillade d'avantgarde; l'ennemi se retira; la division se rembarqua et continua à suivre le canal. Le 13, au matin, la flottille arriva à un endroit où le canal se rapproche du désert, et on aperçut des Mamlouks embusqués derrière des dunes. Des forces considérables se montrèrent tout-à-coup dans le village de Manzoura. Desaix jugea qu'il était dangereux et inutile de débarquer sous le feu de l'ennemi. Il fit virer de bord à sa flottille regagna la position de Menekia, et débarqua sa

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division. Des compagnies de grenadiers chassèrent et dispersèrent les Mamlouks qui harcelaient les barques. Desaix ordonna à la flottille de suivre les mouvemens des troupes. Il forma sa division en carré et s'avança à l'extrémité de l'inondation, sur la limite du désert, entre l'eau et le sable. Les Mamlouks vinrent escarmoucher avec l'avantgarde; l'artillerie les éloigna. Le soir, la division prit position près de Manzoura. Elle continua sa marche, rejoignit sa flottille pour y prendre des vivres, et se reposer. Desaix apprit que Mourad-Bey était en position avec son armée non loin du village de Sédiman; il se mit en marche avec sa division, le 16 vendémiaire (7 octobre), au lever du soleil.

A huit heures du matin, on découvrit l'armée ennemie. Elle était rangée en deux lignes sur le plateau qui sépare la province de Beny -Soueyf du Fayoum. Huit ou dix mille Arabes et fellâh à pied gardaient le retranchement où il y avait une batterie. Un corps de cavalerie, composé de 4,000 Mamlouks et 2,000 Arabes, occupait le front de bataille. On voyait sur les premiers rangs Mourad-Bey, couvert de vêtemens éclatans de magnificence. Les Français se disposèrent à l'attaque. En voyant s'avancer vers lui cette redoutable phalange, le fier Mamlouk faisait bonne contenance. Il avait déjà éprouvé la valeur de Desaix; tous deux s'étaient mesurés de près à la bataille des Pyramides.

Desaix réunit sa division en un seul carré, flanqué de droite et de gauche par deux petits carrés de 200 hommes chacun, et se porta sur le front

de l'ennemi. Les Mamlouks, supérieurs en nombre, chargèrent avec la plus grande impétuosité les Français sur toutes les faces et les enveloppèrent. Ne pouvant rompre les carrés, ils se jettèrent avec fureur sur le petit peloton de droite, commandé par le capitaine Valette, et le culbutèrent, Valette ayant ordonné à ses soldats de ne tirer qu'à bout portant, ce qui n'arrêta que trop tard l'impulsion des Mamlouks. Le feu du grand carré ne leur permit pas de profiter de cet avantage. Mourad reconnut la faute qu'il avait faite de diviser ses troupes pour tourner les Français. Il réunit tous ses cavaliers, démasqua son artillerie, et revint à la charge sur un seul front. On les attendit avec le plus grand sang-froid, et, lorsqu'ils furent arrivés à dix pas de la ligne, les grenadiers les reçurent par une fusillade meurtrière et croisèrent leurs baïonnettes. Les plus intrépides de ces cavaliers, ne pouvant se résoudre à fuir, vinrent mourir dans les rangs, après avoir jeté leurs masses et haches d'armes, leurs fusils et leurs pistolets à la tête des Français. Plusieurs d'entre eux, ayant eu leurs chevaux tués, se glissèrent, le ventre contre terre, sous les baïonnettes, pour couper les jambes des soldats. En vain Mourad tenta de nouvelles charges; il ne put rompre le carré ; mais ces attaques réitérées coûtaient beaucoup de monde aux Français, l'artillerie des Mamlouks causait de grands ravages dans les rangs serrés de leurs adversaires. Desaix jugea dangereux d'opérer sa retraite sur ses barques. Il eût fallu d'ailleurs abandonner un grand nombre de blessés. Dans

cette situation critique, ce général vit qu'il fallait combattre jusqu'au dernier homme. Il demanda conseil au général Friant qui était à ses côtés. Celui-ci, lui montrant la batterie ennemie, répondit: << C'est-là qu'il faut aller, nous y trouverons la victoire ou la mort. C'est aussi mon intention, répliqua Desaix; mais nos malheureux blessés ?...~— Si je suis blessé, s'écria Friant, qu'on me laisse sur le champ de bataille ! » Desaix le serra dans ses bras, ordonna de marcher en avant, et fit battre le pas de charge. Ce mouvement fut brillant et rapide comme l'éclair. Les Arabes et les fellâh épouvantés se dispersèrent. Le général Friant qui commandait l'attaque, entra dans les retranchemens, et fit pointer l'artillerie sur les Mamlouks. Mourad-Bey, après avoir eu 3 de ses beys tués, 2 de blessés, et avoir perdu beaucoup de monde, s'enfonça dans le désert, et gagna le lac Gharaq, dans le Fayoum. Les Arabes l'abandonnèrent.

L'ennemi perdit dans cette journée un grand nombre d'Arabes et de fellâh et 400 cavaliers d'élite. Aucun Mamlouk ne fut trouvé vivant sur le champ de bataille; ils avaient combattu jusqu'au dernier soupir. Ce succès coûta cher aux Français ; ils perdirent 340 hommes et eurent 150 blessés. Le chef de brigade Conroux, Rapp, aide-decamp de Desaix, les capitaine Valette, Sacro et Geoffroy se couvrirent de gloire ; le maréchal-deslogis Rousseau et le sergent Jérôme rendirent des services importans en pointant l'artillerie. En un mot, cette poignée d'hommes, assaillie par une armée six fois plus nombreuse, fit des prodiges,

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