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Répondant au manifeste de la Porte, «< la Cour ottomane, disait le Directoire, n'ignorait pas les vues du gouvernement français. Elle avait chargé son ambassadeur à Paris d'en conférer avec le Directoire. Elle en avait conféré ellemême avec Ruffin, son chargé d'affaires. L'objet de l'expédition ne lui avait point été caché. La Porte avait su que Bonaparte devait s'emparer de Malte. Ali-Effendi, son ambassadeur, lui avait écrit qu'il était instruit par le ministre des relations extérieures du projet de destruction de cet ordre, événement avantageux pour tous les musulmans. Ruffin avait remis officiellement copie des lettres dans lesquelles le Directoire lui communiquait que Bonaparte avait ordre de se rendre en Égypte ; que cette expédition avait pour objet de punir les beys, de retirer des avantages commerciaux, et de faire du tort à l'Angleterre ».

Ces faits étaient avoués par le manifeste de la Porte, et répondaient au reproche d'avoir inopinément envahi l'Égypte; mais il n'en résultat pas que la Porte y eût consenti. D'ailleurs, les communications de Ruffin n'avaient probablement été faites que lorsqu'il n'y avait plus à craindre qu'elles ne suscitassent des obstacles à l'expédi

tion.

Les Turcs sacrifiaient, il est vrai, leurs véritables intérêts à des considérations du moment; car il est hors de doute que, pour conserver la paix, la France leur eût concédé des avantages qu'ils ne pouvaient espérer de trouver dans leur nouvelle alliance. Mais toutes discussions, toutes

tentatives de négociations étaient désormais superflues; la France et le Directoire ne tardèrent pas à s'en convaincre. Subjuguée par l'Angleterre et la Russie, la Porte rejeta toutes les avances et Descorches ne put pas même arriver à Constantinople. Le Directoire fut donc obligé de repousser les hostilités, et de prendre des mesures de représailles contre la Turquie et les puissances barbaresques.

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CHAPITRE IX.

Bonaparte fait occuper le port de Suez.-Arrivée d'un agent de Tippo-Saïb.-Bonaparte expédie des bâtimens pour avoir des nouvelles d'Europe.-Projet de rétablir une marine à Alexandrie.-Politique de Bonaparte concernant l'islamisme.-Menou se fait mahométan.-Bonaparte protége les Cophtes et les religieux du Mont-Sinaï.-Il pardonne aux habitans du Kaire et établit le divan.-Culte des ognons.-Psylles. -Voyage de Bonaparte à Suez et aux sources de Moïse.-Il retrouve les traces du canal des deux mers.-Il revient au Kaire et ordonne une expédition pour occuper Cosseïr.

L'histoire nous apprend que l'Inde est un des pays les plus anciennement habités. Les traditions les plus antiques représentent les Indiens comme le peuple dont la civilisation, les lumières, les arts et les manufactures remontent aux siècles les plus éloignés. Ces avantages réunis appelèrent de bonne heure chez ce peuple les nations moins favorisées de la nature, moins avancées dans les arts, et cependant aussi avides des jouissances du luxe et des produits de l'industrie. Il exista de tout temps des relations commerciales entre l'Inde et les pays situés sur les bords de la Méditerranée, et ceux qui occupent le nord de l'Europe. Ces communications changèrent de direction, selon que les peuples qui s'adonnèrent à la navigation et au commerce changèrent eux-mêmes et se succédèrent sur les différens points du globe.

On ne suivra point ces variations ni les quatre routes bien distinctes par lesquelles on communiquait avec l'Inde. Nous nous occuperons seulement de celle qui passait par le golfe Arabique et l'Égypte. Elle avait trois directions. L'une traversait l'isthme et se rendait d'Aïlath à Rhinocolure', l'autre passait de la côte Arabique au Nil, et existe encore de Cosseïr à Qéné; enfin la troisième, et c'est la plus courte, allait du fond du golfe Arabique au bord du Nil. La distance directe de Suez au Kaire n'est pas de 30 petites lieues : c'est cette étendue que les anciens eurent naturellement le projet de traverser par eau, en y creusant un canal; c'est celle que suivent de préférence les caravanes qui vont chercher les marchandises à la Mekke ou à Suez pour les déposer au Kaire.

Jusqu'à l'an 622 de notre ère, on n'a sur la navigation du canal aucun fait bien positif ou qui n'ait été le sujet d'une grande controverse, mais les détails historiques et circonstanciés qu'on trouve dans Maqrizy et dans El-Makya, doivent enfin lever tous les doutes sur son existence et sa durée. On voit dans ces auteurs arabes qu'un canal antérieurement dérivé du Nil à Fostat, et aboutissant dans le canal des Rois, que le calife Omar venait de recreuser, portait dans la Mer-Rouge; ce canal aurait été navigable pendant plus d'un siècle.

Le canal déjà fort encombré par l'insouciance des gouverneurs arabes, plus disposés peut-être

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alors à favoriser l'Égypte que la Mekke, parce qu'il n'était destiné qu'à exporter les denrées du pays au détriment des Égyptiens, comme faisaient les beys à l'égard de Constantinople, fut enfin fermé du côté de la mer par l'ordre du calife Abou-Cafar-el-Mansour, dans l'intention de couper les vivres à un rebelle de la Mekke qui voulait s'ériger en souverain de cette ville. Depuis plus de mille ans, le canal resta dans l'oubli.

La découverte du cap de Bonne-Espérance ouvrit également à toutes les nations une nouvelle voie pour le commerce de l'Inde, une voie où il n'avait plus à lutter contre les caprices, les méfiances et les avanies des peuples mahométans. Cependant dans les xvI. et XVII. siècles, les Turcs eurent la pensée de rétablir le canal de Suez; mais ils n'y donnèrent aucune suite.

Avant la guerre, le commerce de l'Inde par l'Égypte se soutenait encore à côté de celui qui se fait par l'Atlantique. La ville du Kaire traitait pour environ 150 millions d'affaires, et la plus grande partie de ce commerce consistait en objets apportés de Suez et de Gedda, et en argent ou marchandises d'Europe pour en faire l'échange.

Le but principal de l'expédition d'Égypte, noncé par le Directoire, étant de nuire au commerce de l'Angleterre et d'attaquer sa puissance jusque dans l'Inde, Bonaparte porta ses premiers regards vers Suez et sur l'ancienne communication des deux mers. Il fallait avant tout s'emparer. de l'isthme. Le désert qui sépare la Mer-Rouge du Kaire était habité par des tribus d'Arabes assez

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