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« L'occupation de Qosseïr, écrivit Bonaparte au Directoire, celle de Suez et d'El-Arych ferment absolument l'entrée de l'Égypte du côté de la Mer-Rouge et de la Syrie, comme les fortifications de Damiette, Rosette et Alexandrie rendent impraticable une attaque par mer, et assurent à jamais à la République la possession de cette belle partie du monde, dont la civilisation aura tant d'influence sur la grandeur nationale et sur les destinées futures des plus anciennes parties de

l'univers.

Mourad-Bey est retiré avec peu de monde dans les Oasis, d'où il va être encore chassé. HassanBey est à plus de quinze jours au-dessus des cataractes. La plupart des tribus arabes sont soumises et ont donné des otages; les paysans s'éclairent, et reviennent tous les jours des insinuations de nos ennemis. Des forts nombreux, établis de distance en distance, les retiennent d'ailleurs, s'ils étaient mal intentionnés. Les Arabes d'Yambo ont péri pour la plupart '. »

Telle était en effet la vraie situation de la HauteÉgypte. Il ne restait plus à Desaix qu'un expédition à faire; c'était celle contre Mourad-Bey dans la grande Oasis, qui avait été différée à cause de l'apparition des Anglais devant Qosseïr. Desaix en chargea le général Friant, qu'il regardait avec raison comme un officier plein de mérite, de zèle, et doué de beaucoup de talens militaires. La si

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Lettre du 5 messidor (23 juin).

Lettre à Bonaparte, du 20 thermidor (7 août).

tuation de Mourad paraissait misérable; mais il vivait encore, et lui seul était une puissance. Tout avait cédé devant Desaix, « habile, vigilant, plein d'audace, comptant la fatigue pour rien, la mort pour moins encore, et qui serait allé vaincre au bout du monde. » Mourad, seul, avait égalé, sinon surpassé, en adresse, en constance, en activité, son redoutable adversaire. Au milieu des débris des Mamlouks et des Arabes, il restait debout, et se faisait encore craindre. Desaix, libre des soins de la guerre, ne s'occupa plus que d'administration. Il divisa la Haute-Égypte en deux gouvernemens, dont les chef-lieux furent Syout et Qéné. Il se réserva le premier, et confia le second à Belliard. Ils faisaient des tournées dans les villages pour régler avec les cheyks et les habitans les travaux des canaux et des digues, discuter des plans d'amélioration, concilier les intérêts du gouvernement et ceux des cultivateurs. Ceux-ci se livraient paisiblement à la culture de leurs terres ; ils apportaient des rafraîchissemens aux soldats, dont la contenance amicale les rassurait. Les gens aisés ne cachaient plus leurs moyens et en usaient ouvertement. Les villages arrêtèrent entre eux d'abolir un usage barbare, le rachat du sang, c'est-à-dire la vengeance à main armée des crimes, des injures, des dommages, et de s'en remettre à la justice des Français. Le commerce reprenait son cours, les cafés de Moka arrivaient à Suez et

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à Qosseïr; les blés s'exportaient en Arabie. La Haute-Égypte offrait l'aspect d'un peuple entièrement soumis à un gouvernement paternel. « Cela ressemble, disaient les Égyptiens, au temps du cheyk prince, Amman. » C'était un Arabe puissant, dont la justice vivait toujours dans leur mémoire. Ils donnaient à Bonaparte le nom de Grand Sultan', et à Desaix celui de Sultan Juste. Belliard était aussi propre à l'administration qu'à la guerre; il dirigeait les irrigations, encourageait les cultures, et dispersait les beys; il était agronome, gouverneur, capitaine, aussi redouté des Mamlouks qu'agréable aux cheyks 2.

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CHAPITRE XIII.

A son retour de Syrie, Bonaparte reprend le gouvernement de l'Égypte. — Fortifications Finances. -Justice.-Bonaparte écarte les Osmanlis des emplois. -Commerce. - Administration. Hassan-Thoubar se soumet. Police.-Caravane de Darfour. Situation de l'armée d'Orient. Relations avec l'Inde et le schérif de la Mekke.

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Après la campagne de Syrie, Bonaparte n'avait qu'en partie renversé le plan général d'attaque combiné entre la Porte et l'Angleterre. Il lui fallut alors ranimer la marche de l'administration ralentie pendant son absence, réorganiser son armée pour la mettre promptement en état de marcher à de nouveaux combats, compléter l'approvisionnement et l'armement des places maritimes, ordonner en un mot toutes les dispositions pour faire tête à la fois aux nombreux ennemis qui pouvaient fondre sur l'Égypte, et pour y maintenir la tranquillité intérieure.

On était arrivé à la saison où les débarquemens devenaient possibles. Bonaparte ne perdit pas un instant pour se mettre en mesure, quoiqu'il écrivît à Desaix que, d'après les probabilités, il n'y en aurait point cette année. « Vous êtes fort ri

· Lettre du 27 prairial.

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I

che, lui mandait-il; soyez assez généreux pour nous envoyer 150,000 francs. Nous dépensons de 2 à 300,000 francs par mois pour les travaux d'ElArych, Qatieh, Salhieh, Damiette, Rosette " Alexandrie, etc. » L'intention du général en chef était de faire compléter l'armement et l'approvisionnement des places, principalement sur la côte; qu'on réformât les équipages d'artillerie de campagne; qu'on établit à Bourlos un fort et provisoirement une batterie capable de défendre la passe de ce lac; une redoute sur la rive de l'embouchure du lac Madieh, du côté de Rosette, pour que l'ennemi ne pût pas raisonnablement opérer un débarquement entre le lac et le Bogaz, et marcher sur Rosette, sans s'être emparé de cette redoute; près d'Alqam, une redoute que 30 ou 40 hommes pourraient défendre, mais qui pourrait en contenir un plus grand nombre. Son but principal était d'empêcher les bâtimens qui viendraient de Rosette de remonter le Nil, et de prendre sous sa protection les bâtimens français poursuivis par les Arabes. Des redoutes à Mit-Gamar et à Mansourah dans le même but, avec des magasins capables de contenir des vivres pour 10,000 hommes pendant un mois.

Le général en chef donna ses ordres sur tous ces objets aux commandans de l'artillerie et du génie; il mit son bateau le Nil, armé de canons et de 65 hommes, à la disposition du général

Lettre du 30 prairial.

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