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fut inscrit sur un rocher de granit. Le drapeau de la République flotta sur les cataractes et, dès ce moment, la Haute-Égypte fut pour ainsi dire conquise.

Les habitans de l'île de Philoe l'avaient quittée et s'étaient retirés dans une seconde île plus grande, d'où ils faisaient entendre des cris. Ils refusèrent d'envoyer une barque qui était de leur côté. A défaut d'embarcations, on ne put entrer dans l'île et on retourna à Syène. Desaix y laissa Belliard avec la 21°. légère et en partit le 16 avec sa cavalerie, répartie sur les deux rives du Nil pour retourner à Esné, où était resté le général Friant. Son intention était d'occuper le pays depuis Syène jusqu'à Girgeh, par des cantonnemens, pour lever les impositions.

Syène n'était plus qu'un grand village, mais mieux bâti et avec des rues plus droites que les villages ordinaires, et très-peuplé, au milieu duquel était un château turc, masqué de tous côtés et qui ne pouvait être d'aucune défense. Belliard s'y établit. On fit des lits, des tables, des bancs; on se déshabilla, on se coucha. Après une marche aussi fatigante que rapide, ce fut une véritable volupté pour le soldat. A peine y était-oh établi depuis deux jours que déjà il y avait dans les rues des tailleurs, des cordonniers, des barbiers, des traiteurs français avec leur enseigne. Bientôt après on ajouta le superflu au nécessaire. On eut des jardins, des cafés, des jeux publics et des cartes à jouer. Au sortir de la ville, une allée d'arbres

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se dirigeait au nord; les soldats y mirent une colonne milliaire, avec l'inscription: Route de Paris. N. onze cent soixante-sept mille trois cent quarante. C'était après avoir reçu une distribution de dattes, pour toute ration, qu'ils avaient eu cet accès de gaîté.

Près de Syène est l'île d'Éléphantine, où les terres, parfaitement cultivées et arrosées, donnent 4 à 5 récoltes par an. Les habitans en sont nombreux et aisés. C'est un véritable jardin, d'autant plus remarquable, qu'on y trouve réunies une grande variété de cultures et de belles ruines, et qu'il est environné des déserts stériles.

Belliard, ayant appris que les Mamluks venaient sur la rive droite du Nil fourrager jusqu'à deux lieues de lui, se mit en devoir de les repousser, partit avec 400 hommes, et s'avança sur Philoe, par la route de terre, à travers le désert. Elle paraissait construite en chaussée, et avoir été autrefois très-fréquentée.

Les habitans de Philoe étaient revenus dans leur île, mais décidés à ne point recevoir les Français. Belliard continua sa route dans la Nubie, à travers un pays aride et sauvage, jusqu'à Taudi, mauvais village sur le Nil. Les Mamlouks venaient de l'abandonner, laissant leurs ustensiles et leur repas tout servi. On apprit le matin, par un espion qui avait été dépêché la nuit, que les Mamlouks ne se croyant pas en sûreté au village de Demiet, distant de 4 lieues de Taudi, en étaient partis à minuit. Le but de cette expédition étant rempli,

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Belliard résolut de retourner à Syène. Pour tenir l'ennemi éloigné, il fallait dépouiller le pays. Belliard traita avec les habitans; ils vendirent leur bétail et leur récolte sur pied, qu'ils détruisirent, et ils le suivirent en Égypte, ne laissant derrière eux qu'un désert.

C'est en descendant des cataractes vers Philoe que l'on est surtout frappé de la somptuosité de ses monumens. Cette île ayant été l'entrepôt d'un commerce d'échange entre l'Égypte et l'Éthiopie, on serait tenté de croire que les Égyptiens les avaient élevés pour donner une grande idée de leur richesse et de leur magnificence aux peuples qui venaient commercer avec eux.

On entra encore en pourparlers avec les habitans de l'île; on les trouva toujours plus obstinés dans leur opposition. On y revint le lendemain. avec l'intention et les moyens de les soumettre. Dès qu'ils aperçurent la troupe, ils recommencerent leurs cris, et se montrèrent avec les habitans de la seconde ile, accourus à leur secours, la plupart nus, armés de sabres, de boucliers, de fusils de rempart à mèches et de longues piques. On leur cria qu'on ne voulait pas leur faire de mal; ils répondirent qu'ils n'étaient pas des Mamlouks pour reculer, et qu'ils étaient résolus à se défendre; on commença à se fusiller. Il fallut travailler 36 heures à construire un radeau. Les soldats, protégés par du canon à mitraille, s'emparèrent de la seconde île. Les habitans, frappés de terreur, se jetèrent alors dans le fleuve, hom

mes, femmes et enfans, pour se sauver à la nage. On vit des mères noyer des enfans qu'elles ne pouvaient pas emporter, et mutiler des filles pour les soustraire aux violences des vainqueurs. La colonie se trouva en quelques instans dispersée et ruinée. Maître des deux îles, Belliard fit évacuer les magasins qui se trouvaient dans la plus grande, composés du butin que les habitans avaient fait sur les barques des Mamlouks. On revint ensuite à Syène, où l'on construisit un fort.

Deux beys n'avaient point suivi Mourad dans sa retraite au-delà des cataractes. Osman-BeyHassan était passé sur la rive droite du Nil, avec environ 250 Mamloūks, et y vivait dans les villages de sa domination. Elfy-Bey y était aussi passé la nuit après la bataille de Samhoud, et était descendu à la hauteur de Syout. Informé que les dé bris des Arabes d'Yambo se ralliaient dans les environs de Qéné, petite ville fort importante par le grand commerce qu'elle fait avec les habitans des rives de la Mer-Rouge, le général Friant avait, dès le 18, envoyé une colonne mobile commandée par le chef de brigade Conroux.

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Instruit que le schérif Hassan, chef des Arabes d'Yambo, se tenait caché dans les déserts où il attendait l'arrivée d'un second convoi, Desaix envoya le général Friant vers Qéné, avec l'ordre de lever des contributions en argent et en chevaux jusqu'à Girgeh.

Osman-Bey-Hassan qui, en apprenant le retour du général Desaix de Syène, s'était enfoncé dans

le désert, se rapprocha des bords du Nil. Desaix chargea Davoust de marcher avec la cavalerie contre ce bey, qui s'avança de son côté pour combattre. Ils se rencontrèrent, le 24, à Louqsor, l'un des villages situés sur l'emplacement de Thèbes; le choc fut terrible. La mêlée devint générale; on combattit corps à corps ; après 3 heures d'un engagement très-meurtrier, pendant lequel les Mamlouks sauvèrent un convoi de vivres considérable, ils abandonnèrent le champ de bataille, y laissant beaucoup des leurs et plusieurs kachefs. Osman - Bey - Hassan eut son cheval tué et fut blessé. Le chef-d'escadron Fontelle eut le crâne fendu d'un coup de sabre. Cette affaire ne fut pas heureuse pour la cavalerie française; seule, engagée avec ces guerriers si redoutables à cheval, elle eut 25 tués et 40 blessés.

Le même jour, le chef de brigade Conroux, fut attaqué à Qéné par 800 Arabes d'Yambo quiavaient entraîné avec eux beaucoup de fellâh. Il les repoussa et fut blessé. Ils revinrent à l'attaque, le chef de bataillon Dorsenne les chargea, ils furent mis dans une déroute complète, et perdirent 300 hommes.

Malgré toute la diligence qu'il avait faite, le général Friant n'arriva à Qéné, avec le 7. de hussards, que quelques heures après le combat. Instruit que les Arabes, après cet échec, s'étaient retirés à Samatha, il alla les attaquer et leur tua 200 hommes.

Bonaparte apprit par la renommée que Desaix

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