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tranchée. Ceux qui étaient restés sous les murs, après de vains efforts pour monter à la brèche, n'étant pas soutenus, furent contraints de sortir du fossé et de rentrer dans la tranchée.

Mailly, qui avait eu le pied fracassé d'un coup de feu, ayant repris ses sens, mais ne pouvant suivre les siens dans leur retraite, implora le secours d'un grenadier. Ce brave le prit sur ses épaules, et s'avançait péniblement au milieu des décombres de la brèche, lorsqu'une balle le renversa. Pendant la nuit, les Turcs descendirent de leurs murs, trouvèrent Mailly vivant, et lui coupèrent la tête. Ainsi tombèrent à la fleur de l'âge, sous le couteau de Djezzar, deux malheureux frères dignes d'un meilleur sort. On coupa également les têtes des Français trouvés morts dans le fossé, pour les saler et les envoyer à Constantinople. Pendant qu'on mutilait les restes de Mailly, Phélippeaux recevait son épée des mains des barbares, et insultait à ce jeune guerrier mort au champ d'honneur '.

Cependant cet échec prouva au général en chef que le siége de Saint-Jean-d'Acre exigeait toutes les ressources de l'art. La prise de Jaffa et surtout l'opinion des chrétiens de Syrie, qui assuraient que la place d'Acre ne tiendrait pas quatre jours, avaient donné trop de confiance à l'armée. Elle se trouvait en présence d'une place, flanquée de murailles et de fortes tours, et environnée d'un fossé profond avec escarpe et contrescarpe. Bonaparte

Relation de l'expédition de Syrie, par Berthier, page 35.

sentit la nécessité d'une attaque plus régulière; on reprit les travaux avec ardeur. On prolongea les chemins couverts; un nouveau puits de mine fut ouvert pour faire sauter la contrescarpe entière; pour cette opération, les mineurs demandèrent huit jours. Les Turcs, fiers d'avoir repoussé les assiégeans, firent une sortie le 10 germinal, se portèrent sur la tranchée, attaquèrent les travailleurs, parvinrent à les déloger. et tuèrent le chef de brigade du génie Detroye. Mais revenus bientôt de leur surprise, ceux-ci retournèrent sur leurs pas, et, malgré une vive résistance, repoussèrent les assiégés dans la place.

proInstruit exactement par les chrétiens du grès des rassemblemens de peuples divers qui se préparaient à fondre sur lui sous les ordres d'Abdallah, pacha de Damas, Bonaparte résolut de faire des détachemens pour reconnaître la force et la position de ces nouveaux ennemis, et observer leurs mouvemens. Il avait chargé le cheyk Mustapha-Békir de la défense du fort de Saffet et du pont de Jacoub; mais, prévoyant qu'il n'était pas en force pour résister à une irruption du pacha de Damas, s'il tentait le passage du Jourdain avec son armée, il envoya Murat à Saffet, le 10 germinal. Ce général partit du camp avec sa cavalerie, guidé par les Druses. Il traversa de forts beaux sites, des torrens d'eau limpide, des collines couvertes d'oliviers et d'arbustes en fleur. Il fut bien accueilli sur sa route. Les habitans lui apportèrent des vivres. Les femmes chrétiennes n'étaient pas voilées, comme les Égyptiennes, et

montraient une physionomie douce et prévenante. Le lendemain, il arriva à Saffet. Cette petite ville est bâtie autour d'un pic très-aigu, sur le sommet duquel s'élève le fort. Murat trouva à Saffet Moustapha-Békir et le cheyk Daher. A défaut d'armes et de munitions, ils n'avaient pu réduire le fort occupé par une faible garnison de Maugrabins ; mais à l'approche des Français, elle se sauva; on lui fit deux prisonniers que l'on traita bien. Murat laissa sa cavalerie à Saffet, et se porta avec un détachement d'infanterie au pont de Jacoub sur le Jourdain, et suivit cette rivière jusqu'au lac de Genezareth ou de Tibériade, en arabe Bahrel-Tabarieh. N'ayant rien aperçu qui pût faire croire au rassemblement et à l'approche d'un corps ennemi, il revint à Saffet et y établit une garnison française, commandée par le capitaine Simon. Cette ville est bâtie sur l'emplacement qu'occupait autrefois Béthulie. Un vieillard montra à Murat l'endroit où, suivant la tradition, était la tente d'Holopherne lorsque Judith lui coupa la tête. Murat rentra au camp d'Acre le 15 germinal.

Le général Vial en était parti la veille avec 500 hommes pour aller occuper le port de Sour et y établir une garnison de Mutualis, commandés par le cheyk Nassur, fils de Nakef, tué cinq ans auparavant dans un combat contre les Arnautes du pacha d'Acre. Nassur s'y était déjà rendu d'après un ordre direct de Bonaparte. Les habitans de Sour et surtout les chrétiens s'étaient enfuis à son approche, emportant leurs effets. Le général

Vial leur dit que Nassur était sous ses ordres, et les ramena dans leurs foyers. Les soldats y virent avec plaisir quelques jolies femmes. Les Mutualis étaient une superbe race d'hommes, grands, bien faits, robustes, de bonne mine, et qui paraissaient résolus à tout entreprendre. Le général Vial en passa la revue, et établit des postes composés de Français et de Mutualis qui furent très-flattés de ce mélange. Nassur lui parla d'un air pénétré des malheurs de sa famille, et brûlait de se venger de Djezzar. « Je veux, lui dit-il, faire de Sour une place aussi forte que celle d'Acre. » Sour est l'ancienne Tyr. Sur les ruines de cette ville, qui fut la métropole du commerce de la Syrie, et la mère de Carthage, il n'existait plus que 12 ou 1,500 habitans, dont les trois cinquièmes étaient mahométans, et le reste chrétiens, vivant tous du commerce. L'entrée du port était défendue par deux tours bâties sur deux lits de colonnes. La mer les avait découvertes; on en voyait encore de très-belles, et notamment les deux dont parle Volney. Le mur qui fermait la ville du côté de terre était en très-bon état, et les approches en étaient défendues par une grosse tour isolée, à 100 toises en avant sur le rivage. Le général Vial rentra au camp le 16 germinal, laissant à Sour les Mutualis disposés à s'y défendre jusqu'à extinction.

Le général Junot fut envoyé à Nazareth, pour observer les mouvemens de l'ennemi dont on annonçait l'approche, et couvrir les hôpitaux de Chefamer contre les incursions des Naplousains. Il ne découvrit rien qui pût lui faire soupçonner

la présence d'une armée ennemie dans le pays,

et resta à Nazareth avec 500 hommes.

Le 12 germinal, une frégate turque avait mouillé dans la rade de Caïffa. Elle avait envoyé son canot dans le port, ignorant que cette ville fût au pouvoir des Français. Lambert s'en était emparé et lui avait fait une vingtaine de prisonniers.

Djezzar et ses auxiliaires redoublaient d'efforts. Toute la population de la ville travaillait à réunir sur le front d'attaque de nombreux moyens de défense. Des ouvrages immenses étaient construits dans la place; une enceinte nouvelle s'élevait derrière les anciens remparts. Les assiégeans, de leur côté, continuaient à saper les murs de Saint-Jean-d'Acre. Malgré l'échec qu'ils avaient éprouvé le 8 germinal, leur ardeur ne s'était point ralentie. Les guerriers qui avaient vu tomber Mantoue et les forteresses de la Lombardie s'indignaient à la pensée qu'une chétive bicoque de l'Asie pourrait arrêter leurs exploits. Mais l'artillerie de siége n'arrivait point, et, malgré la ruse employée envers les vaisseaux anglais pour se procurer des projectiles, les munitions de guerre étaient insuffisantes pour pousser le siége avec vigueur.

Le général Dugua avait envoyé du Kaire à Damiette 2,000 boulets de 12 et de 8 et des obusiers. Bonaparte envoya l'ordre à l'adjudant-général Almeyras de les expédier au camp devant SaintJean-d'Acre. Dans la crainte que sa lettre fût in

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