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habitans; le pays environnant était riche et bien cultivé.

La cavalerie et la division Kléber eurent ordre de couvrir le siége contre les rassemblemens des Naplousains, en prenant position sur le torrent Lahoya, à deux lieues de Jaffa, sur la route d'Acre. Les divisions Bon et Lannes investirent la place. Le 14, le général en chef en fit la reconnaissance. Elle était ceinte de grandes murailles, sans fossés ni contrescarpes. Aux angles, s'élevaient de grosses tours armées d'artillerie. Quoique ces pièces fussent servies par les meilleurs canonniers de l'empire ottoman, leur aménagement était mal entendu; elles étaient maladroitement placées. Bonaparte décida que le front de l'attaque aurait lieu du côté du sud, contre la partie la plus élevée et la plus forte. Plusieurs accidens de terrain permettaient d'approcher à une demi-portée de pistolet des remparts sans être aperçu. A une portée de canon de Jaffa, un rideau dominait la ville et la campagne. On y traça la ligne de contrevallation. C'était la position où devait naturellement camper l'armée; mais comme elle était éloignée de l'eau et exposée par la nudité du rideau à l'ardeur du soleil, le général en chef préféra la placer dans des bosquets d'orangers, et fit garder la position militaire par des postes.

Dans la nuit du 14 au 15 ventôse, la tranchée fut ouverte. On établit une batterie de brèche et deux contre-batteries dirigées sur la tour carrée la plus dominante du front d'attaque. On plaça

une autre batterie au nord, pour faire diversion. L'ennemi démasqua son artillerie de tous les points de l'enceinte, et fit un feu vif et soutenu.

Pendant les journées du 15 et du 16, on travailla à perfectionner les travaux de siége. L'ennemi fit deux sorties et se porta vers la batterie de brèche; il fut repoussé avec perte derrière ses remparts. Duroc, aide-de-camp du général en chef, se distingua.

Le 17 ventôse, Bonaparte fit adresser par le chef de l'état-major une sommation à la garnison de Jaffa. Il lui représentait les malheurs qu'elle attirerait sur elle et sur la ville, si ele prolongeait sa défense, lui promettait sauve-garde et protection si elle voulait se rendre, et retarda le feu des batteries jusqu'à sept heures du matin. Pour toute réponse, le commandant Abou-Saab fit trancher la tête au porteur de la sommation, et l'armée l'aperçut bientôt plantée sur un pieu au haut des remparts. Il ne resta plus dès lors à Bonaparte qu'un seul parti pour se rendre maître de la place : l'heure de sa chute était venue ; elle devait être terrible.

Le général en chef fit recommencer le feu de toutes ses batteries; il dura six heures et ouvrit une brèche. A une heure, elle fut jugée praticable. La division Lannes eut ordre de monter à l'assaut. Les adjudans Netherwood et Rambault se présentèrent les premiers sur la brèche; ofliciers et soldats, chacun s'y lança à l'envi. Mais à l'instant où ils allaient pénétrer dans l'enceinte l'ennemi démasquà deux batteries de front, et

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réunit tous ses tirailleurs sur le front. Il s'établit un combat meurtrier et opiniâtre sur les remparts écroulés. Tout ce que la place contenait de bras s'était porté sur ce point. Les femmes les enfans mêlaient leurs hurlemens au bruit des armes, et lançaient sur les assaillans des pierres et des matières embrasées. Le succès paraissait incertain; mais tandis que la garnison combattait sur ce point avec la plus grande valeur pour défendre ses murs d'un autre côté Jaffa tombait au pouvoir des Français. En effet, la division Bon avait découvert, près de la mer, une brèche praticable et dégarnie de troupes; elle avait pénétré dans la ville presque sans obstacle et s'était emparée du port. Cette nouvelle porta la terreur chez les Turcs. En même temps, la division Lannes se précipita dans la ville. Les habitans et la garnison barricadèrent les rues et se retranchèrent dans les maisons. Le combat recommença plus opiniâtre et plus terrible. La division Lannes se joignit à celle de Bon. La garnison, assaillie et cernée de toutes parts, refusa obstinément de se rendre. Le soldat se livra avec fureur au plus horrible carnage, et fit main-basse sur tout ce qui fut trouvé les armes à la main malgré les généraux et les officiers qui voulaient mettre un terme à cette boucherie. Enfin, lorsque les soldats furent las de tuer et épuisés de fatigue, ils laissèrent la vie aux débris de la garnison qui furent conduits au quartier-général. A cinq heures du soir, l'armée était entièrement maîtresse de la ville; mais les généraux n'étaient

plus maîtres de l'armée. Après avoir détruit ses ennemis, elle s'appropriait leurs dépouilles. Pendant 24 heures, Jaffa fut livré au pillage et à tous les excès qui l'accompagnent.

L'armée perdit 50 hommes et eut 200 blessés. Le chef de brigade Lejeune fut tué sur la brèche; il fut vivement regretté, et les soldats de son corps le pleurèrent comme leur père 1. On trouva dans la ville 50 pièces de canon dont 30 de campagne, des munitions de guerre, plus de 400,000 rations de biscuit, 2,000 quintaux de riz et quelques magasins de savon. Il y avait dans le port environ 15 petits bâtimens de transport et un de 150 tonneaux.

De la garnison de Jaffa, composée de 4,000 hommes, il périt plus de la moitié dans l'assaut et le sac de la ville; le reste, déduction faite des Égyptiens, Mamlouks, Alepins et Damasquins, fut passé par les armes, 'du 18 au 192.

<«< Cette ville, écrivit Bonaparte au Directoire, a été livrée pendant 24 heures au pillage et à toutes les horreurs de la guerre qui jamais ne m'a paru si hideuse. J'ai renvoyé à Damas et à Alep plus de 500 individus de ces deux villes, ainsi que 4 à 500 personnes en personnes en Égypte. J'ai pardonné aux Mamluks et aux kachefs que j'ai pris à ElArych; j'ai pardonné à Omar-Makram, cheyk du Kaire. Abdallah-Aga 3, général de Djezzar, a eu

'Lettre de Bonaparte au Directoire, du 23 ventôse.

Lettres de Bonaparte à Dugua, à Kléber, à Marmont et au Directoire, des 19, 20 et 23 ventôse.

3 C'était l'ancien commandant de Jaffa; il avait été remplacé à

l'adresse de se cacher parmi les gens d'Égypte et de venir se jeter à mes pieds. J'ai été clément envers les Égyptiens autant que je l'ai été envers peuple de Jaffa; mais sévère envers la garnison qui s'est laissée prendre les armes à la main '.

On a fait un crime à Bonaparte d'avoir ordonné de passer par les armes cette partie de la garnison qu'avait épargnée la fureur du soldat. Ce fut un Anglais, son ennemi personnel, ennemi acharné de la France qui le premier l'en accusa, et, pour aggraver encore cette action, accompagna son récit de détails controuvés et d'exagérations dictées par la haine. L'accusation fut répétée sur le continent par les nombreux échos de l'Angleterre. La clameur devint si générale, qu'en France même les amis de Bonaparte passèrent condamnation et gardèrent le silence. Tant qu'il fut puissant et que l'Europe fut à ses pieds, il dédaigna lui-même toute explication; écoutons celle qu'il a donnée quand il fut tombé dans l'adversité :

« Dans la garnison de Jaffa, on découvrit un grand nombre de soldats turcs que j'avais faits prisonniers, peu de temps auparavant, à El-Arych, et envoyés à Bagdad, après qu'ils m'eurent donné leur parole de ne plus servir, ou du moins de ne plus porter les armes pendant l'espace d'un an.

ce poste par Abou-Saab, et dirigeait l'armée active du pacha d'Acre, de concert avec Abdallah, pacha de Damas.

'Lettre du 23 ventôse.

'Robert-Thomas Wilson, Histoire de l'expédition de l'armée britannique en Égypte. Londres, 1803.

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