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louks qui, ne pouvant maîtriser leurs chevaux, furent culbutés les uns sur les autres. Une horrible confusion régna dans le fond du ravin, et les Français y firent un grand carnage. Kassan-Bey, plusieurs kachefs et un émir y trouvèrent la mort. Aly, kachef de Kassan-Bey, fut pris avec un grand nombre de Mamluks.

Toute l'armée d'Abdallah fut dispersée. On dit même que ce pacha, sur le point d'être surpris dans sa tente, fut contraint de se sauver à pied, à moitié habillé. L'ennemi abandonna ses bagages, son artillerie ses provisions de bouche et de guerre, 50 chameaux, plus de 100 chevaux, laissant sur le champ de bataille 150 tués et plus de 300 prisonniers. Les fuyards ne commencèrent à se rallier qu'à Kan-lounes.

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Après ce combat, Kléber et Reynier firent tirer contre le fort et commencer des boyaux d'approche; mais n'ayant pas assez de munitions pour battre en brèche, ils sommèrent la garnison de se rendre et poussèrent une mine sous l'une des tours du château. Elle fut éventée, et l'ennemi refusa de livrer la place. On se contenta d'en resserrer le blocus, en attendant des munitions.

Cependant Bonaparte partit de Qatieh le 27 pluviôse, alla coucher au puits de Bir-el-Abd, le 28 à celui de Meçoudiah, et arriva le 29 à El-Arych. Malgré tous les soins pour assurer les vivres, les provisions de bouche n'avaient pu suivre les troupes; elles avaient souffert de grandes privations. Quoique on eût fait route sur un sol où la végétation était presque nulle, on avait rencontré dans

les bas-fonds une espèce de petite oseille rafraîchissante, d'un goût agréable, et qui avait servi à calmer le tourment aigu de la soif. Le 30, toute l'armée se trouva réunie à El-Arych. Elle prit position sur des dunes de sable entre le village et la mer. Bonaparte fit canonner une tour du fort, et, dès que la brèche fut praticable, sommer l'ennemi de se rendre. La garnison, forte de 1,600 hommes, était composée de Mamlouks, d'Arnautes, de Maugrabins et d'habitans de la Caramanie, barbares indisciplinés et presque indépendans de leurs chefs. L'aga Ibrahim qui les commandait dut les consulter l'un après l'autre avant de répondre à la sommation de Bonaparte. Ils refusèrent de livrer leurs armes et leurs bagages, clause sur laquelle insistait le général en chef. « Vous demandez les armes et les chevaux de la garnison, répondit Ibrahim-Aga; ceci nous a paru contraire aux principes de générosité que vous avez la réputation de professer, et c'est une chose qui ne s'est jamais vue. La mort nous paraît préférable à la honte, à l'humiliation de nous dessaisir de nos armes, et dussions-nous tous périr jusqu'au dernier, nous ne consentirons point à une condition que personne de nous n'a jamais acceptée. Voilà notre dernière résolution; si vous ne l'approuvez pas, nous nous résignerons à la volonté de Dieu. »

Rien n'était plus facile à Bonaparte que d'enlever d'assaut le château d'El-Arych; mais il fallait sacrifier des hommes, et il lui importait de ménager son armée, à l'ouverture de la campagne. It consentit donc à laisser sortir la garnison avec ses

armes. Il fut conclu, le 2 ventôse, une capitulation portant que les troupes commises à la garde du fort en sortiraient pour se rendre à Bagdad par le désert, et qu'on leur donnerait un étendard tricolore et un sauf-conduit. Les agas qui les commandaient jurèrent par Moïse, Abraham et Mahomet, de ne point servir dans l'armée de Djezzar. Trois ou quatre cents Maugrabins demandèrent à servir dans l'armée française; Bonaparte en fit un corps auxiliaire. On trouva dans le fort près de 250 chevaux, deux canons démontés et une provision de vivres pour 15 jours.

sur

Bonaparte crut faire une chose politique en expédiant de suite au Kaire les drapeaux enlevés à l'ennemi, 6 kachefs et une trentaine de Mamlouks prisonniers. En les envoyant au général Dugua, il l'engageait à se concerter avec le cheyk El-Mohdy et les principaux membres du divan pour célébrer une petite fête à la réception des drapeaux, et à faire en sorte qu'ils fussent suspendus aux voûtes de la mosquée de Jémil-Azar, comme un trophée de la victoire remportée par l'armée d'Égypte s Djezzar et sur les ennemis des Égyptiens. «Quant aux Mamluks prisonniers, écrivait-il, mon intention est qu'ils soient bien traités, qu'on leur restitue leurs maisons; mais que l'on exerce sur eux une surveillance particulière. Vous leur réitérerez la promesse que je leur ai faite de leur faire du bien si j'apprends à mon retour que vous avez été content de leur conduite. » Il chargeait Dugua de faire dire aux habitans du Kaire et de Damiette qu'ils pouvaient envoyer des caravanes en Syrie,

que leurs marchandises y seraient respectées et bien vendues; il lui recommandait de faire filer des munitions de bouche et de guerre par toutes les occasions ; de lui écrire souvent, par les moyens les plus sûrs, et de lui envoyer sous bonne escorte les dépêches importantes qui pourraient lui arriver de France ou de la Haute-Égypte.

Pour fêter l'arrivée des drapeaux conquis, Dugua profita de la fête du Beïram ou clôture du rhamadan, qui tombait, cette année, le 18 ventôse (8 mars). Comme au premier jour de l'an en Europe, ce jour est celui des visites et des cadeaux ; les Français en rent aux principaux du Kaire. Des salves d'artillerie furent tirées de tous les forts. On éleva sur les minarets de la mosquée de JémilAzar les drapeaux pris à El-Arych; et, pendant trois jours, des détachemens protégèrent contre les Arabes les pélerinages que les habitans allaient faire à la ville des tombeaux. Quelques jours après, le 26, on fit la belle procession du kesoueh, c'était le grand voile brodé en or que la caravane de la Mekke portait chaque année pour couvrir les tombeaux de Mahomet et de sa fille Fatime. Le peuple manifesta beaucoup de joie. On vit, pour la première fois, les femmes, quoique voilées, se porter avec affluence dans les rues.

Cependant il importait à Bonaparte de sortir promptement du désert, où son armée éprouvait beaucoup de privations. Il laissa la division Reynier à El-Arych avec ordre d'attendre que le fort fût entièrement évacué et nettoyé, car il était infecté de la peste; d'en augmenter les fortifications et

de ne partir que lorsque le parc d'artillerie serait en marche.

Le 4 ventôse, Kléber, formant l'avant-garde, partit à la tête de sa division et de la cavalerie pour se porter sur Kan-lounes. Les divisions Bon et Lannes se mirent en route pour le suivre à quelque distance.

Le 5 ventôse, Bonaparte partit d'El-Arych avec l'état-major, escorté par 100 guides à cheval et un détachement de 100 dromadaires. Arrivé au santon de Cheyk-Zoé, il remarqua avec étonnement que les fossés dans lesquels les Arabes cachaient leur paille, leurs blés et leurs racines n'avaient pas été fouillés. Il ne trouva pas un soldat, ce qu'il s'expliquait par la crainte que les Bédouins inspiraient aux traîneurs. Arrivé aux deux colonnes de granit rouge qui séparent l'Afrique de l'Asie, et près desquelles se trouve le beau et profond puits de Refah, il fut alarmé de ne pas voir de traces d'eau répandue par les divisions qui avaient dû y passer. Il continua sa route sur KanIounes; mais au lieu d'y trouver son armée, il aperçut un corps de Mamlouks qui gardait ce village, et, dans le lointain, le camp d'AbdalahPacha. Des officiers lui conseillèrent de retourner promptement à El-Arych; mais Bonaparte repoussa cet avis. Il sentit que, s'il prenait la fuite, il attirerait sur lui les Mamlouks, et résolut de faire un coup d'audace. A la tête de ses guides, il marcha rapidement sur Kan-Iounes. Les Mamlouks d'Ibrahim, prenant ce corps pour la tête de l'armée française, se replièrent à la hâte sur

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