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France, lui enlevaient ses bâtimens, qu'ils conduisaient à Rostock, à Wismar et autres ports de la Baltique, et en faisaient les équipages prisonniers pour les envoyer en France! Plus de cinquante bâtimens avaient été pris ainsi en pleine paix dans le courant de 1811, et Napoléon faisait retenir ceux-là même dont. son conseil des prises avait prononcé la restitution!! Tantôt il voulait envoyer des douaniers français dans les ports de Suède; tantôt, nouveau Minotaure, il lui demandait des tributs d'hommes et voulait des matelots suédois pour le service de sa marine impériale : et cette tyrannie, déjà si odieuse, s'aggravait encore par le ton insultant dont son ministre à Stockholm assaisonnait ses notes; au point qu'un jour, ce ministre venant d'en remettre une, le prince royal lui dit : « M. Alquier, vous vous croyez donc toujours procon» sul! détrompez-vous; vous ne résidez pas auprès » d'un gouvernement établi par l'épée de votre maître : » jamais je ne mettrai sous les yeux du roi mon père, » une pièce aussi insolente que votre note. »

Malgré tout ce que le roi avait à supporter dans sa soumission au cabinet français, le roi et le prince royal ne pouvaient faire déclarer ouvertement la Suède contre Napoléon; car, excepté le commerce et sa clientèle, elle était encore toute pour lui! Ce fut le mauvais génie de Napoléon qui le porta à changer lui-même ces favorables dispositions en faisant envahir la Pomeranie: la nouvelle n'en parvint à Stockholm que le 11 février. Le prince royal, en lisant le rapport, ne fit entendre que ces mots : « Puisqu'il le >> veut absolument, il faut le satisfaire................. Il lui en >> coûtera cher!..... » Le lendemain, il fit informer le cabinet de Londres et l'empereur de Russie que la Suède était en guerre contre Napoléon!! Le prince

royal envoya aussitôt des agens chargés d'établir une parfaite harmonie entre la Suède, la Russie et l'Angleterre. C'est au prince royal que fut due principalement la paix entre la Russie et la Porte ottomane, signée à Bucharest. Dans cette circonstance décisive, le prince royal fit preuve d'une activité et d'une habileté diplomatiques également remarquables.

Pour qu'on puisse mieux juger de l'immensité de la faute que fit Napoléon, en forçant les Suédois à se séparer de l'alliance française, quelques faits peu connus peuvent être encore cités.

Avant de s'engager par aucun traité contre Napoléon, même après l'invasion de la Pomeranie, le prince royal lui écrivit la lettre suivante : « Sire, les rapports

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qui viennent d'arriver portent, qu'une division de » votre armée, aux ordres du prince d'Eckmühl, a » envahi le territoire de la Poméranie suédoise, dans » la nuit du 26 au 27 janvier. Cette division a pour» suivi sa marche, est entrée dans la capitale du du» ché, et s'est emparée de l'île de. Rugen. Le roi >> attend que votre majesté fasse connaître les motifs qui ont pu la porter à agir d'une manière aussi con>> traire aux traités existans. Mes anciens rapports avec » votre majesté m'autorisent à la supplier de ne pas » tarder à faire connaître ces motifs, pour que je puisse » donner au roi mon opinion sur le système politique » que la Suède doit adopter désormais. L'outrage qui » lui est fait si gratuitement est vivement senti par la » nation, et doublement par moi, sire, qui suis chargé » de l'honneur de la défendre. Si j'ai contribué à ren» dre la France triomphante, si j'ai constamment sou» haité de la voir heureuse et respectée, il n'a jamais » pu entrer dans ma pensée de lui sacrifier les intérêts, » l'honneur et la nationalité du pays qui m'a adopté.

26 janv.

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» Votre majesté, si bon juge dans les cas de ce genre, a déjà pénétré ma résolution. Peu jaloux de la gloire et » de la puissance qui vous environnent, sire, je le suis beaucoup de ne pas être regardé comme vassal: votre majesté commande à la majeure partie de l'Europe; » mais sa domination ne s'étend pas jusqu'au pays où j'ai été appelé. Mon ambition se borne à le défendre >> et je le regarde comme le lot que la Providence m'a départi. L'effet que l'invasion dont je me plains a » produit sur le peuple peut avoir des conséquences » incalculables, et, quoique je ne sois point Coriolan » et que je ne commande pas à des Volsques, j'ai assez >> bonne opinion des Suédois pour vous assurer, sire, qu'ils sont capables de tout oser et de tout entre>> prendre pour venger des affronts qu'ils n'ont point » provoqués, et pour conserver des droits auxquels » ils tiennent peut-être autant qu'à leur existence. »

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Ce ne fut que deux mois après cette funeste invasion, et quand il n'y eut plus d'espoir de rapprochement avec Napoléon, que le roi de Suède conclut son traité d'alliance avec la Russie.

Un décret impérial réunit la Catalogne à la France, et divise cette province en quatre départemens. Un second décret, du 2 février, la placera sous l'administration de deux conseillers d'état intendans (Degerando, Chauvelin), chargés de procéder à l'organisation judiciaire, administrative et financière de cette nouvelle partie de l'empire; leur résidence est fixée à Barcelone, à Gironne; ils ont sous eux quatre auditeurs-préfets à Barcelone, Lérida, Gironne, Puycerda. « Les intendans nou's soumettront les usages et » les circonstances de localité..... pour les concilier » avec les principes de la législation. » Les désastres

dont les armes françaises seront accablées dans cette campagne, ne pourront décider Napoléon à l'abandon de la Catalogne. Au contraire, il décrétera, le 7 mars 1813, de nouvelles dispositions pour simplifier l'administration de ces départemens ultra-Pyrénées, aussi froidement que s'il s'agissait des départemens baignés par la Loire.

On imaginerait difficilement à quels actes arbitraires s'était porté le maréchal Augereau, pendant tout le temps de son commandement en Catalogne, et combien de calamités cette province avait essuyées : ils ne sont pas étrangers aux désastres de la guerre d'Espagne 1.

1 Le maréchal Augereau avait pris le commandement de l'armée de Catalogne dans les derniers jours de septembre 1809, et avait remplacé le général Saint-Cyr.

Aprés la reddition de Gironne, le maréchal, précédé par de glorieux souvenirs, revêtu de toutes ses décorations (parmi lesquelles on distingue le grand cordon de l'ordre royal espagnol de Charles III), entre en grand appareil militaire dans Barcelone avec le titre de gouverneur de la Catalogne, et vient prendre son quartier dans ce magnifique palais du gouvernement, où, trente ans aupavant, il avait monté la garde comme simple garde wallone! Son premier soin, en arrivant dans cette ville, est de renvoyer en France de la manière la plus dure, le brave général Duhesme, gouverneur de Barcelone, officier d'un mérite distingué (le même qui, blessé à Waterloo, sera massacré par les Prussiens, 1815.) Les chefs de l'administration militaire sont présentés au maréchal : il croit reconnaître parmi eux un homme dont il a eu à se plaindre : il l'accueille de coups de cravachè en l'apostrophant des noms les plus injurieux : un tel acte révolte les personnes présentes à cette scène, et, toutes, s'empressent de rendre les témoignages les plus honorables sur la victime de cette violence.. Cet homme était directeur de l'hôpital militaire de Barcelonne établi à l'arsenal (Las Atresanas.)

Le maréchal prend un arrêté qui enjoint aux autorités espagnoles de la province d'employer, pour la rédaction de leurs actes administratifs, le patois catalan: cette mesure, qui a pour but de capter la bienveillance des Catalans, produit un effet tout contraire.

« La Catalogne doit sa richesse à son commerce, » à son industrie, à ses manufactures; de là vient que, » dans toutes les guerres, elle a fait et fera toujours >> des sacrifices immenses pour ne pas devenir, même momentanément, province française; parce que cette » réunion entraînerait la ruine inévitable de ses fabri» ques, qui ne peuvent, sous aucun rapport, soute>> nir la concurrence avec les nôtres. C'est néanmoins » la seule province que Napoléon ait voulu réunir à la France, tant les difficultés avaient de charmes pour » lui.. Il l'organisa en plusieurs départemens, et dé

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Marescal de papel (maréchal de papier), telle est la qualification donnée au général en chef par les habitans de Barcelone dont les murs sont placardés de proclamations, d'arrêtés, etc.

Après la prise de Gironne, le maréchal Augereau avait dit qu'une grande sévérité était indispensable à la soumission de la Catalogne. Aussi, tous les paysans pris les armes à la main étaient pendus sans miséricorde eux, leurs pères, mères, femmes, fils et filles, à de vastes potences dressées sur la grande route de Gironne à Figuières : la plupart de ces malheureux, en allant à la mort, refusaient les secours de la religion, et périssaient en maudissant, en exécrant leur féroce oppresseur. L'on a vu pendre à Barcelone, en 1811 (peu de mois après la prise de Tarragone par le général Suchet), deux malheureux, l'un tailleur, l'autre jardinier, pour avoir dit que Tarragone avait été repris par les Espagnols; madame la duchesse de Bourbon demande au gouverneur de Barcelone la grâce des deux condamnés; elle lui est refusée avec tous les égards dus à une princesse adorée des Barcelonais. L'on a vu et entendu un intendant de Napoléon, se faisant appeler de ******* *****, intrigant déhonté, concussionnaire des plus avides, ancien bas-officier, se réjouir hautement du supplice de ces deux infortunés et se glorifier d'avoir décidé le général, gouverneur de Barcelone, à les faire exécuter !! Cet acte de sévérité révolte même les Français et met le comble à l'exaspération des habitans.

Ce peut aller de pair avec les Lecchi, les Henriod, etc., monstres exécrables dont les Catalans conserveront long-temps le souvenir! Enfin, Augereau fut remplacé dans son commandement, en mai 1810, par M. le duc de Tarente qui adopta, arrivée, un plan de conduite tout-à-fait différent.

dès son

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