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17 févrie

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» ni cédé ses droits, ni renoncé à la réunion de la Bel

gique. » On assure que c'est le soir du combat de Champaubert (le 10), qu'il dit cette autre phrase, si mal rapportée dans l'ouvrage de M. de Pradt : « Enfin, je puis être encore une fois maître du monde. » Peu de jours avant la bataille d'Austerlitz (2 décembre 1805), l'empereur Alexandre avait fait offrir la paix à Napoléon, à condition qu'il rendrait la Belgique à l'empereur d'Autriche, l'Italie à ses anciens souverains, et laisserait la Hollande indépendante. Justement indigné de l'arrogance d'Alexandre, Napoléon pouvait s'écrier alors: «Allez dire à votre souverain que, si la paix » n'est possible qu'à ces conditions, il ne les obtiendrait » pas, quand même son armée serait campée sur les » hauteurs de Montmartre. » Devrait-il, aujourd'hui, conserver de semblables prétentions; et, battu dans toute l'Europe, refuser ces articles à la porte de Paris?

Près de Nangis (Seine-et-Marne), de fortes divisions austro-russes, en marche sur Paris par les rives de la Seine, sont mises en déroute par l'empereur qui, parti-le 15 de Montmirail, avec sa garde et le maréchal Ney, est, la veille, arrivé à Guignes, par Meaux, ayant fait vingt-huit lieues en deux jours. Là, ralliant partie des troupes des maréchaux Victor, Oudinot, il réunit près de cinquante mille combattans: le résultat de cette journée est, pour l'ennemi, une perte de cinq mille hommes, d'autant de prisonniers, et d'une douzaine de canons. Elle serait plus considérable, si Victor avait agi avec plus de décision l'empereur, fort mécontent de la conduite de ce maréchal, lui retire son commandement, et le confie au général Gérard, dont le rare mérite a brillé dans cette occasion, comme il brilla dans beaucoup d'autres circonstances. Les Français ne comptent guère qu'un millier des leurs

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hors de combat, tandis que l'ennemi perd, avec la moitié de ses soldats, quatorze canons. L'issue de ces combats, livrés sur différens points, détermine aussitôt à battre en retraite sur Troyes, le généralissime des alliés, qui compte encore plus sur les intrigues ourdies par les cabinets alliés à Paris, que sur la force de leurs armées, et qui est d'ailleurs plus versé dans l'art des négociations, que dans la science militaire.

Le combat de Montereau (Seine-et-Marne) est la r8 févr. continuation des actions de la veille. Le prince royal de Wirtemberg, impétueusement attaqué, perd environ sept mille hommes; les généraux Gérard, Pajol; ont la plus grande part à ce résultat. Près de trois mille Français sont mis hors de combat.. C'est pendant cette affaire que Napoléon dit gaiement à ses soldats, qui murmuraient en le voyant s'exposer: «Ne craignez >> rien, mes amis, le boulet qui me tuera n'est pas en» core fondu. »

Monsieur, comte d'Artois (frère de Louis XVI), 21 févr. parti secrètement d'Édimbourg, a débarqué dans l'île d'Heligoland, d'où un bâtiment anglais l'a transporté à Lubeck; il n'a pas quitté l'Écosse avec l'approbation, avec l'appui du ministère britannique; au contraire, il a caché son départ, et mis une très-grande réserve dans sa conduite; il arrive à Vesoul. A mesure que les armées alliées s'avancent dans l'intérieur de la France Monsieur, comte d'Artois, fait les plus grands efforts pour ranimer l'esprit public des Français en faveur de la maison de Bourbon; mais les souverains alliés ne lui permettent d'exercer aucune autorité, de déployer aucun caractère officiel; ils s'opposent à toutes les démarches politiques, à toutes les publications royalistės qui pourraient être favorables à la cause de la maison

22 févr.

de Bourbon; les généraux autrichiens défendront même que les proclamations de Monsieur, comte d'Artois, se répandent dans la Franche-Comté, et un imprimeur de Vesoul sera arrêté et enlevé, pour avoir consacré ses presses à la cause de la royauté !!!

A Méry-sur-Seine (sept lieues nord-nord-ouest de Troyes), la division Boyer arrête, repousse le corps de Sacken, appartenant à l'armée de Silésie, et l'empêche de profiter de ce passage important, qui porterait l'ennemi sur le flanc et les derrières de Napoléon. On peut citer sur ce combat une anecdote qui peint le caractère du soldat français c'était le jour du mardi-gras; nos conscrits ayant trouvé des masques dans une boutique, les prirent, et se battirent masqués ! Voltaire n'a-t-il pas dit :

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Ces fous sont pleins d'honneur:

» Ainsi qu'au bal ils courent aux batailles. »

24 févr. L'empereur reprend Troyes, après plusieurs actions particulières avec l'arrière-garde de l'armée alliée

en retraite.

Cette ville est la seule dans toute la France où percent quelques faibles lueurs de royalisme (V. le 7). Chose étonnante! et qui serait inexplicable, si on ne considérait pas les principes consacrés et les intérêts créés par la révolution! Pas une ville, pas un bourg, pas un hameau ne déclinent l'autorité de Napoléon, ne se révoltent contre lui, ne se détachent de son gouvernement c'est que les Français ont une haine profonde contre l'ancien régime, en redoutent le retour, et croient trouver encore dans Napoléon une garantie formidable contre les revendications et les vengeances qu'ils supposent que les émigrés ne manqueraient pas

d'exercer si le gouvernement impérial était renversé : le despotisme politique dont Napoléon accable les Français, son ambition et les calamités qu'elle entraîne sur la France, leur semblent encore moins insupportables que les abus de l'ancien ordre de choses, que les prétentions des classes privilégiées de l'ancienne monarchie : ils restent soumis et même dévoués au despote que sa propre conservation oblige, pardessus tout, de défendre aujourd'hui les intérêts nationaux et l'intégrité, du territoire. A peine quelques lueurs de royalisme se font apercevoir à Troyes, aussitôt les terreurs de Napoléon, dont la sagacité s'était endormie sur ce danger, se manifestent dans ses dispositions contre les partisans des Bourbons. Un décret impérial porte: «Tout Français au service d'une des

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puissances dont les troupes envahissent le territoire » de l'empire, et tout Français qui aura porté les » signes ou les décorations de l'ancienne dynastie, se » ront déclarés traîtres, jugés par des commissions militaires, condamnés à mort, et leurs biens seront confisqués. »>

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L'importance des anciens souvenirs n'a pu s'apprécier que fort tard. La concentration du pouvoir, ramenant les institutions monarchiques, rappelait involontairement l'image des Bourbons à mesure que Napoléon déployait un caractère irascible, absolu, opiniâtre, inflexible, les hommes d'un âge mûr aimaient à se retracer les abus paisibles, la facile condescendance, la bénévole pusillanimité du gouvernement des deux derniers princes; et, lorsqu'un bras de fer comprimait la plainte, les anciens souvenirs de la monarchie des Bourbons venaient déposer au fond des cœurs contre le despotisme de Napoléon; ainsi, la route qui devait ramener à la monarchie tempérée se

frayait insensiblement ! L'arbitraire du gouvernement, chaque jour plus injuste ou plus découvert, avait aliéné de lui cette partie de la nation qui est, à la fois, éclairée et industrieuse : la destinée voulait que le rétablissement des rois suivit le règne d'un soldat parvenu dans une république ! Cette fois seulement l'instinct des émigrés aura deviné ; ils atteindront le but de leurs youx, quòique leurs efforts imprudens, autant qu'inhabiles, les en aient sans cesse écartés: mais il faudra que les plus étranges événemens aient neutralisé leurs innombrables fautes, depuis qu'ils abandonnèrent Louis XVI aux Tuileries, pour aller le défendre à Coblentz !!!

Napoléon avait aussi pour les personnes de l'ancienne cour un goût de parvenu. Il les combla de faveurs, et en remplit son palais; il les tenait près de sa personne, depuis qu'il prit l'état de représentation des rois de France, croyant ajouter quelque chose à sa dignité, en se faisant servir par les mêmes hommes qui servirent à Versailles: c'est la plus grande faute que pût commettre Napoléon, Le général, Rapp lui avait dit un jour: «Ne mettez des émigrés, des an» ciens nobles, ni dans vos armées, ni dans vos pa» lais, ni dans les emplois publics, et je réponds du » poste. » Une vanité puérile abusa la sagacité de celui dont la conduite dans les affaires paraissait tracée par le publiciste de Florence, et lui en fit négliger ce seul conseil: « Ne rendez jamais aux hommes la moitié de ce qu'ils ont perdu, car ils s'en serviraient contre vous.» En effet, ces anciens courtisans de Versailles, que le nouveau monarque environnait de sa protection, ne retrouvant qu'une partie des avantages d'autrefois, recevaient à deux genoux, mais sans reconnaissance, des grâces qui leur semblaient incomplètes :

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