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Aussi, une séance hasardée de la convention lui avait-elle semblé préférable à une insurrection dans les rues. Cette confiance le perdit. Cambon et BillaudVarennes commencèrent l'attaque, et le discours de Robespierre, d'abord décrété pour l'impression, fut rapporté et renvoyé à l'examen du comité de salut public.

Premier triomphe obtenu par les ennemis de l'incorruptible, aux cris de vive la république!

Au club des jacobins, le soir du même jour, Robespierre lut son discours, qui fut couvert d'applaudissements. Ses amis l'engagèrent à marcher en armes contre la convention. Il refusa,-par peur ou par scrupule. Robespierre n'était pas Danton. La nuit donc fut calme en apparence.

Mais les ennemis du tyran se sont réunis tous, à la voix de Tallien. Les uns et les autres se sont dit : « Vous pleurez Vergniaud, nous pleurons Danton; réconcilions leurs ombres en frappant Robespierre. »>

Ç'en est fait l'incorruptible est lui-même consigné comme « ennemi du bien public dans l'inventaire des humains (a). »

Le lendemain, la lutte se continue: Couthon, Saint-Just, Robespierre, d'une part; de l'autre, Tallien, Billaud-Varennes et Vadier. On s'accuse, on se défend. Après les reproches, les injures; après les injures, les menaces. Les conventionnels, pendant la discussion, crient plusieurs fois : A bas le tyran! L'arrestation du général Henriot, commandant de la garde nationale parisienne, ainsi que celle de son état-major, sont décrétées. La convention annonce qu'elle se fait permanente. Successivement, on propose et on décide d'incarcérer Boulanger, Dufraisse et Dumas, le président du tribunal révolutionnaire. Vadier met au jour tous les actes les plus secrets de son ancien compère, en les rembrunissant. Il l'accuse d'avoir dit à l'accusateur public lors du procès de la mère de Dieu : « Vous ne jugerez pas cette drogue. » Tallien l'accable, à propos de son discours de la veille. Robespierre répond par des cris, couverts eux-mêmes par les murmures désapprobateurs de la convention. Le député Louchet tranche la question, et propose de décréter Robespierre d'arrestation; Lozeau ajoute d'accusation. La chute du triumvir va vite. Il appelle le président président des brigands; il adjure la montagne. Mais un député, Charles Duval, lui porte le dernier coup en s'écriant: << Estce que cet homme sera toujours le maître dans la convention? » Les deux frères sont perdus. On les arrête, et de tous côtés, les cris de vive la liberté! vive la république! se font entendre. Saint-Just, Couthon et Lebas, éprouvent le même sort, et Fréron a déclaré « que la patrie en ce jour, et la liberté, sont sorties de leurs ruines (b).

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En apprenant l'arrestation de Robespierre et des autres députés, la com

(a) Expression propre de Robespierre.

(b) Moniteur universel, séance du 9 thermidor an II

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Ce maitre impérieux n'est pas qu'un vel coupable.
Il invoquait la force et la force l'accuble,
D'autant plus, malheureux, and son regne est passe,
Que sur son propre sort lui même a prononcé,
Que rien en sa faveur ne peut se faire enterdre,
Et qu'à la pitie même il ne peut plus pretendre.
publiques insulter son tripas;

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Et mourant dans ta tange, on ne le plaindra pas.

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mune ne se laissa pas dominer par cette terrible défaite. Fleuriot, maire, Payan, agent national, appelèrent à son de caisse les officiers municipaux. Il était cinq heures. Le conseil-général du département s'assembla, et deux membres nommés par lui, furent chargés « d'inviter les citoyens à s'unir à leurs magistrats, pour sauver la patrie et la liberté. » (a)

C'est pitié de voir comment alors, ces mots-là se trouvaient dans tous les discours, et motivaient toutes les actions les plus opposées. Mais il ne faut pas s'arrêter là. Lisez, voici l'adresse au peuple de Paris, faite par le conseilgénéral :

<«< Des scélérats dictent des lois à la convention qu'ils oppriment. On poursuit Robespierre, qui fit déclarer le principe consolant de l'existence de l'EtreSuprême et de l'immortalité de l'âme; Saint-Just, cet apôtre de la vertu qui fit cesser les trahisons au Rhin et au Nord, qui, ainsi que Lebas, fit triompher les armes de la république, avec Couthon, ce citoyen vertueux, qui n'a que le corps et la tête vivants, mais qui les a brûlants de l'ardeur du patriotisme (b); Robespierre le jeune, qui présida aux victoires de l'armée d'Italie. Eh! quels sont leurs ennemis! un Amar, noble de trente mille livres de rente; Dubarran, vicomte, et des monstres de cette espèce; Collot d'Herbois, le partisan de l'infâme Danton, comédien qui dans l'ancien régime, avait volé la caisse de sa troupe; Bourdon (de l'Oise), qui calomnia sans cesse la commune de Paris; ce Barrère qui appartient à toutes les factions (c) tour à tour, et qui a fait fixer le prix des journées des ouvriers, pour les faire périr de faim. Voilà les scélérats que le conseil te dénonce; peuple, lève-toi, ne perdons pas le fruit du 10 août et du 31 mai, et précipitons au tombeau tous les traîtres. »>

Puis, le conseil proclama « l'insurrection contre les oppresseurs du peuple qui voulaient faire périr ses défenseurs; «appela à lui les autorités constituées, la force armée, les sections, et leur fit jurer à toutes l'union et la fraternité, le salut de la patrie. Henriot dirigeait le mouvement qui allait s'opérer. La gendarmerie se rangea sur la place de la Maison-Commune. On battit la générale dans les rues. La garde citoyenne s'arma en partie. Les canonniers des sections étaient prêts. Henriot cria aux armes! et engagea les passants à marcher sur la convention nationale. Mais, chemin faisant, il fut pris, et conduit au comité de sûreté générale. Entrave de quelques heures seulement à l'insurrection, car les députés arrêtés dans la journée, et Henriot lui-même, ne tardèrent pas à être délivrés. Alors, la position de la commune sembla s'améliorer encore. Lebas écrivit au commandant du camp de la plaine des Sablons, de faire marcher contre la convention, les élèves de la patrie vaine demande, le commandant était arrêté. Le conseil-gé

a) Arrêté de la commune du 9 thermidor (27 juillet 1794).

b) On sait que Couthon était impotent.

e Barrère, a-t-on dit, avait dans sa poche deux discours différents, le ༡ thermidor, pour prononcer l'un ou lantre, selon que Robespierre serait ou non triomphant.

néral envoya des proclamations aux différents maires de la banlieue, notamment à celui de Bercy.

« Maire et patriotes de Bercy,

« Robespierre et les patriotes les plus purs de la convention ont été arrêtés par des conspirateurs, et remis aussitôt en liberté par le peuple souverain. Accourez à la Commune de Paris avec vos armes, pour sauver la chose publique : le tocsin sonne pour donner l'éveil aux amis de la patrie (a). »

Il n'y avait plus à reculer Robespierre avait échoué à la tribune, et ses amis voulaient le défendre avec le secours du canon. Henriot donc, redevenu commandant de l'artillerie, pointa ses pièces sur la Convention. Les insurgés furent mis hors la loi. Cela ne déplaisait qu'à Robespierre il délibéra, et pendant ses incertitudes, des citoyens des différentes sections vinrent offrir leurs bras au président de l'assemblée. A minuit, « partout le peuple était à la hauteur de la liberté; partout on entendait les cris de vive la république! vive la convention nationale!» (b le peuple avait juré de mourir pour ses mandataires, qu'une force armée respectable environnait. Cependant, Henriot agissait à la place de Robespierre. Il envoya un gendarme portant l'ordre aux troupes qui l'offusquaient de se retirer au plus tôt. Le député Ferraud fit arrêter ce gendarme. Quelques militaires avaient aussi abandonné la cause des insurgés (c). Tardivement, Robespierre se décida à triompher ou à succomber d'après le sort des armes. On l'allait voir se mesurer avec Barras. Il avait organisé un comité des douze et une commission exécutive. La place de Grève était couverte d'hommes, de bayonnettes, de canons. Jamais l'insurrection n'avait davantage revêtu le caractère d'une guerre civile.

Ce fut vers cette place que se dirigèrent, à deux heures du matin, les troupes de la convention. Elles investirent la maison commune, et les huissiers de la représentation nationale, torches en main, lurent hautement à la multitude le décret qui frappait les rebelles. Comme par un jeu de la fortune, le peuple délaissa ces derniers. Il criait :Périssent les traîtres et les tyrans! Quelques employés pénétrèrent dans la salle des communes où délibéraient trente-six municipaux revêtus de leur écharpe. Le président, effrayé, laissa tomber la sonnette de ses mains. Chacun s'enfuit. Robespierre jeune sauta par une fenêtre, puis se jeta du haut en bas de la corniche de la façade de l'Hôtel-deVille. Lebas et Robespierre aîné, voulurent se tuer avec un pistolet; mais le premier seul réussit. Robespierre avait tout simplement la joue fracassée. Les municipaux furent arrêtés. Prisonniers et blessés, tous furent conduits,

(a) Cette proclamation a été affichée dans Berey.

b) Discours de Barrère, dans la séance de nuit.

c) Comptes-rendus de Ferrand et de Fréron à la convention. M'me séance.

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