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chure du temps, la danse est devenue l'idole des Farisiens. Du petit au grand, du riche au pauvre, c'est une fureur, c'est un goût universel. »

<< On danse aux Carmes où l'on égorgeait, on danse aux Jésuites, au Séminaire Saint-Sulpice, aux Filles-Sainte-Marie, dans trois ou quatre églises, chez Ruggieri, chez Lucquet, chez Mauduit, chez Wentzel, à l'hôtel Thélasson, à celui du salon des ci-devant princes; on danse partout. >>

Deux événements, en dehors de la politique, éveillèrent dans le peuple des sentiments divers. Lafayette, arraché des prisons d'Olmutz, était arrivé pour la deuxième fois à Paris, sans que sa présence y fit la moindre sensation. D'un autre côté, à la suite d'un traité entre la France et les États-Unis, Bonaparte avait ordonné un deuil public pour l'anniversaire de la mort de Washington.

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De Washington à Lafayette, il y avait la différence d'un génie philanthropique à un homme populaire.

Tout tenir dans sa main; élever tel individu, anéantir tel autre, voilà quelle était la volonté du premier consul. Pour cela, il ne se servait pas du système de corruption directe, mais, indirectement, par des moyens habiles et à lui connus, il arrivaït à ôter aux populations toute admiration qu'elles pouvaient avoir pour d'autres hommes que pour des soldats. Que les masses pris sent de funestes habitudes, qu'elles se livrassent à des mœurs déplorables, peu lui importait à lui, pourvu qu'aux jours où se célébraient les fêtes des victoires, elles s'écriassent: Vive le premier consul! Panem et circenses, — telle a toujours été, telle sera longtemps encore la pensée politique de l'ambitieux lorsqu'il s'adresse aux classes infimes du peuple.

La loterie, que le directoire avait rétablie, prit donc sous le consulat un accroissement malheureux. Les tirages étaient plus fréquents. Elle fournissait un aliment à l'immoralité et à la misère. On voulut publier des caricatures sur cette institution, mais le ministre de la police y mit ordre. Le Vampire, que nous reproduisons, a été vendu sous la couverture (a); et, parmi les pièces satiriques répandues dans le public, nous ne pouvons rapporter que ces quelques vers, car la police veillait attentivement sur toute chose.

L'ANCIENNE ET LA NOUVELLE LOTERIE.

Quoi, monsieur, dans votre patric

On tire encor la loterie!

Me dit hier un étranger,

Vous ne faites donc que changer!

N'était-ce pas comme immorale
Qu'on avait proscrit la royale?
Pourquoi retomber aujourd'hui

(a) Communiquée par M. Bosq, graveur.

Dans le mal que vous avez fui?
Eh! citoyen, lui répondis-je,
Qu'en cela rien ne vous afflige;
Nous avons corrigé le jeu;
Le quine nous mettait en feu,
Nous faisait battre la campagne
Rêver cent châteaux en Espagne,
Et n'était jamais que zéro ;
Mais aujourd'hui chacun opine
Qu'on peut, en un seul numéro,

Gagner beaucoup plus qu'en un quine.

La conscription commençait à devenir rigoureuse et désastreuse pour les familles. Toutefois, ceux qui se plaignaient avaient aussitôt la bouche fermée, non pas parce que le gouvernement leur répondait liberté et égalité, mais parce qu'il les enrôlait au nom de la gloire et de l'honneur. Les fils quittaient volontiers leur vieille mère pour avoir leur part des décorations militaires promises par le premier consul «< aux guerriers qui auront rendu des services éclatants en combattant pour la République. »

Bonaparte avait pour lui les classes inférieures du peuple; pour les hautes classes, il se les attachait en distribuant des places aux hommes << dont il était content. » Une pièce excessivement curieuse est la liste des hommes qui ont provoqué ou favorisé le 18 brumaire; et les emplois auxquels ils ont été appelés dans le nouvel ordre de choses. Il faut la citer, comme donnant une idée de la puissance et de la fortune présentes et futures de Bonaparte :

Sieyes et Roger-Ducos, directeurs. D'abord consuls provisoires, puis sénateurs.

Lemercier, président du conseil des anciens. Sénateur.

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Lucien Bonaparte, président du conseil des cinq cents. - Ministre de

l'intérieur.

Lebrun, du conseil des anciens.

-

Troisième consul.

Cornet, Fargues, Beaupuy, membres de la commission des inspecteurs du conseil des anciens.

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Sénateurs.

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Baraillon, de la même commission. - Membre du corps législatif.

Cornudet, Depeyre, Herwyn, Lenoir-Laroche, Péré, Rousseau, Vernier, Porcher, Vimard, du conseil des anciens.

Sénateurs.

Lahary, Goupil-Préfeln fils, Sédillez, Laussat, Chassiron, Caillemer, du conseil des anciens.

Tribuns.

Perrin, Chatry-Lafosse, Dalphonse, du conseil des anciens. - Membres du corps législatif.

Regnier, Crétet, du conseil des anciens.

Conseillers d'état.

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Cabanis, Villetard, Creuzé-Latouche, Jacqueminot, Chollet, du conseil des cinq-cents. Sénateurs.

Chazal, Chénier, Bérenger, Daunou, Émile Gaudin, Beauvais, Matthieu. Thiessé, Gourlay, Ludot, Thibaut, Chabaud-Latour, Barra, du conseil des Tribuns. cinq cents.

Cazenave, Darracq, Devinck-Thierry, Frégeville, Girot-Pouzol, Crochon, Scherlock, du conseil des cinq cents. Membres du corps législatif. Boulay de la Meurthe, du conseil des cinq cents. Conseiller d'état. Augereau, du conseil des cinq cents. Nommé général en chef de l'armée française en Batavie.

Cambacérès ministre de la justice.
Fouché, ministre de la police.

Second consul.

Maintenu dans ses fonctions.

Talleyrand, ex-ministre. - Replacé au ministère des relations extérieures. Bernadotte, ex-ministre de la guerre.

Conseiller d'état.

Lecouteulx, président de l'administration centrale de la Seine. - Sénateur. Réal, commissaire du directoire exécutif près cette administration. Conseiller d'état (a).

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En vérité, avec de pareils résultats, Bonaparte avait eu de quoi prendre en pitié les opposants à sa domination. Les gens qui, au traire, pouvaient lui être utiles, tenaient à peu près ce langage: « Le directoire et les deux conseils sont partis, tant mieux. Oh! que je me sens soulagé! sept cent cinquante m'écrasaient. » Ou bien: « Vieux habits, vieux galons! >> (b).

Tout, d'ailleurs, tendait à aveugler le peuple. Le triomphe de Bonaparte était représenté comme étant aussi le Triomphe de la République (c). On Il importe de le remarquer, «< une fête avait successivement célébré, au Courage; » une fête à la Bienfaisance, » une fête « à Saint-Vincent de Paul, preuves du retour aux idées religieuses, mais aussi de l'abolition des mœurs républicaines.

Nous ne pouvons ici passer sous silence une découverte fort importante, et qui pendant une, année entière occupa activement les esprits. Il s'agit de la vaccine. Le 1er juin, les premiers essais de l'inoculation de la vaccine furent faits à Paris, sur trente enfants. Dès qu'ils entendirent parler de ce préservatif contre la petite vérole, les Parisiens se divisèrent en deux camps. Des caricatures attaquèrent tantôt les partisans de la vaccine, tantôt les membres de la Faculté; même on représenta ainsi le combat de la vaccine avec cette dernière.

(a) Cette liste a été dressée par MM. Buchez et Roux, dans leur Histoire parlementaire de la révolution française.

(b) Collection de M Laterrade.

(c) Cette gravure historique est tirée du cabinet de M Maurin.

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