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n'aurait peut-être pas hésité, son cœur l'aurait entraîné vers les hommes sincèrement patriotes, convaincu qu'on ne s'appuie solidement que sur ce qui résiste; mais, depuis, l'Orient avait habitué ses yeux au spectacle du ́despotisme, et développé en lui une tendance naturelle vers le côté matériel, mais poétique cependant, des choses de la vie.

Cependant il hésite encore, et résistant aux avances réitérées de Sieyès, dont il méprise le caractère, il cherche à entrer légalement au pouvoir, en se faisant nommer directeur à sa place. Malheureusement il n'a que trente ans, et la constitution en exige quarante pour être admis au gouvernement de l'Etat. Gohier et Moulins, les deux hommes les plus estimables du Directoire, et à qui il s'est ouvert de préférence, le repoussent au nom de la loi et ajournent à dix ans son ambition qui ne peut plus attendre. Voyant alors qu'il n'a plus rien à espérer de la légalité, il se décide à briser une constitution qui le déclare inhabile à gouverner, lui qui a déjà deux fois fait l'apprentissage du commandement, suprême, d'abord en Italie, puis en Égypte; lui qui dispose de l'armée; lui, enfin, que les encouragements de la France et les applaudissements d'une multitude de flatteurs ont confirmé dans le sentiment de sa supériorité. Poussé à bout par de mesquines jalousies, traité comme un être dangereux, parce qu'il a triomphé de l'ennemi plus souvent que les autres, il se rappelle que c'est lui qui a sauvé la Convention au 13 vendémiaire, en mitraillant les sections de Paris, et le Directoire au 18 fructidor, en lui envoyant Augereau, l'un de ses lieutenants. Dans sa passion, aucun scrupule ne peut plus l'arrêter; il oublie que cette constitution qu'il va violer, c'est lui-même qui en a assuré le triomphe contre les royalistes. Ce Sieyès qu'il déteste et qu'il méprise, il va le trouver, lui tendre la main et faire un pacte avec lui.

Dès ce moment, Napoléon n'eut plus le choix de sa conduite; il fut condamné à réunir autour de lui tous les ambitieux subalternes. Talleyrand et

Fouché devinrent les dépositaires de ses pensées secrètes, et mirent les tristes ressources de leur habileté à son service. Sa maison fut le foyer d'une vaste conspiration, pour le succès de laquelle on employa tour à tour l'intrigue et la corruption, jusqu'à ce que l'heure de la violence fut arrivée. Il serait trop long d'entrer dans le détail de tous les moyens auxquels les instruments de ses projets eurent recours, et dont la responsabilité pèse sur son caractère, qu'il y ait pris ou non une part directe; il suffira de montrer les principaux fils de cette singulière comédie qui modifia si profondément la marche de la révolution. Si quelque chose peut excuser Napoléon, c'est que, mieux que personne, il connaissait le côté défectueux de la constitution de l'an III; c'est que le but auquel il tendait, était évidemment louable, et que, lui personnellement, se proposait sincèrement le bien et la gloire de la France. Même encore à Sainte-Hélène, il ne voyait que le beau côté de son entreprise; comme Scipion, il disait pour toute réponse à ses accusateurs : « Nous protestons que nous avons sauvé notre pays; venez avec nous en rendre grâce aux dieux; » justification plus fière que juste, pour ceux qui croient qu'il aurait pu sauver la France par de meilleurs moyens et aussi d'une manière plus durable. Mais, dira-t-on, le Directoire lui avait fait une nécessité de la révolte. Et quand cela serait! Il fallait en appeler du Directoire à la nation, non pas par l'intrigue et par les armes, mais ouvertement et avec noblesse. Jamais la France ne fut jalouse et parcimonieuse envers lui, et, s'il ne s'était refusé à fournir des garanties raisonnables, elle l'aurait certainement mis au-dessus d'une loi aveugle. Son impatience l'a fait monter plus tôt; mais son impatience aussi a précipité la fin de son règne.

Une fois résolu à la lutte, il eut bientôt fait son plan de bataille; et saisissant l'à-propos avec son tact or dinaire, ses intrigues et ses avocats à l'avant-garde, ses grenadiers en réserve, il donna le signal de l'attaque.

Un grand nombre de voix lui étant gagnées dans le Conseil des Anciens que présidait Lucien, son frère, ce fut avec le secours de cette assemblée qu'il entreprit de porter les premiers coups au Conseil des Cinq-Cents, où la corruption avait eu moins de prise, parce qu'on y avait encore foi dans la démocratie. Le Directoire était ce qui l'embarrassait le moins. Des cinq membres qui le composaient, trois étaient à sa dévotion Sieyès et Roger-Ducos agissaient d'intelligence avec lui; Barras, après avoir essayé de travailler pour lui-même ou pour les Bourbons, avait fini par lui promettre son assistance; quant à Moulins et à Gohier, qui persistaient à ne pas vouloir trahir leur mandat, outre qu'ils ne formaient qu'une minorité, l'inexpérience du premier et la bonhomie du second laissaient pour ainsi dire carte blanche. Ce qui se préparait, allait leur montrer quel fond il faut faire sur un gouvernement à cinq têtes, et combien il est facile de le renverser. Afin de mieux endormir Gohier, le général Bonaparte s'invita à dîner chez lui avec sa famille pour le 18 brumaire; il voulut même l'avoir à déjeuner pour le même jour avec sa femme.

Dès le 15, Napoléon et Sieyès avaient arrêté toutes leurs dispositions. Il fut convenu que le Conseil des Anciens, s'autorisant de l'article 102 de la constitution, décréterait la translation du Corps législatif à Saint-Cloud, et nommerait le général Bonaparte commandant en chef de la garde du Corps législatif, des troupes de la division militaire de Paris et de la garde nationale.

Le 18, en effet, après avoir entendu des discours virulents dans lesquels Cornudet, le Brun et Fargues peignirent sous de vives couleurs les dangers dont la république était menacée, et la conspiration permanente des coryphées du manége pour rétablir le règne de la terreur, le Conseil des Anciens rendit à huit heures du matin le décret en question. Il est vrai qu'un grand nombre de membres étaient absents: les douteux, parce qu'ils n'avaient été convoqués que pour plus

tard; les patriotes, parce qu'ils ne l'avaient pas été du tout. A huit heures et demie, le messager d'État qui en était porteur arriva au logement de Napoléon. Il en trouva les avenues remplies d'officiers de la garnison, d'adjudants de la garde nationale, de généraux, et de trois régiments de cavalerie. C'est que, la veille, Napoléon avait eu le soin de faire prévenir les officiers de la garnison et les quarante adjudants de la garde nationale, qu'il les recevrait le 18, à six heures du matin. Tous les généraux de l'armée, présents à Paris, avaient reçu la même invitation. Chacun d'eux, ou du moins chacun de ceux qui n'étaient pas dans le secret de la conspiration, crut que l'invitation était pour lui seul. Augereau et Bernadotte seuls ne furent pas prévenus; mais Joseph amena Bernadotte qui, après une honorable protestation au nom de la liberté (*), refusa formellement son concours et se retira. A la réception du message, Napoléon fit ouvrir les battants des portes ; et sa maison étant trop petite pour contenir tant de monde, il s'avança sur le perron, reçut les compliments des officiers, les harangua, et leur dit qu'il comptait sur eux tous pour sauver la France. En même temps, il leur apprit que le Conseil des Anciens, autorisé par la constitution (ce qui n'était pas parfaitement exact), venait de le revêtir du commandement de toutes les troupes; qu'il s'agissait de prendre de grandes mesures, pour tirer la patrie de la position affreuse où elle se trouvait; qu'il comptait sur leurs bras et leur volonté; qu'il allait monter à cheval, pour se rendre aux Tuileries. L'enthousiasme fut extrême; tous les officiers tirèrent leurs épées, et promirent assistance et fidélité. Alors Napoléon se tourna vers Lefèvre, qui avait le commandement de la division militaire, lui demandant s'il voulait rester près de lui, ou retourner près du Directoire. Lefèvre, fortement ému,

(*) Voyez l'article BERNADOTTE dans la Biographie des hommes du jour par MM. Sarrut et Saint-Edme, et dans l'Encyclopédie des gens du monde, t. III, p. 367.

ne balança pas. Napoléon se mit aussitôt à cheval, et partit, à la tête des généraux, des officiers et des quinze cents chevaux auxquels il avait fait faire halte sur le boulevard, au coin de la rue du Mont-Blanc. Il donna ordre aux adjudants de la garde nationale de retourner dans leurs quartiers, d'y faire battre la générale, de faire connaître le décret qu'ils venaient d'entendre, et d'annoncer qu'on ne devait plus reconnaitre que les ordres émanés de lui.

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Il se rendit ensuite à la barre du Conseil des Anciens, environné de son brillant cortége. Il dit : «Vous êtes la sagesse << de la nation; c'est à vous d'indiquer, << dans cette circonstance, les mesures qui peuvent sauver la patrie je << viens, environné de tous les géné<<< raux vous promettre l'appui de << leurs bras. Je nomme le général a Lefèvre mon lieutenant. Je remplirai fidèlement' la mission que vous « m'avez confiée qu'on ne cherche << pas dans le passé des exemples sur « ce qui se passe. Rien dans l'histoire << ne ressemble à la fin du dix-hui« tième siècle; rien dans le dix-hui« tième siècle ne ressemble au 'mo<< ment actuel. »

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Toutes les troupes étaient réunies aux Tuileries; il en passa la revue aux acclamations unanimes des citoyens et des soldats. Il donna le commandement des troupes chargées de la garde du Corps législatif au général Lannes, et au général Murat le commandement de celles qui devaient être envoyées à Saint-Cloud. Moreau fut chargé de la garde du Luxembourg, où Moulins et Gohier, qui n'avaient voulu entendre à aucun accommodement, furent retenus prisonniers, quoique les mémoires de Napoléon, auquel ce récit est emprunté presque textuellement, n'en conviennent pas, et disent même le contraire. Deux proclamations, l'une au peuple, l'autre à l'armée, apprirent à tout Paris ce qui venait d'avoir lieu. Le Conseil des CinqCents, forcé par le texte de la loi d'obéir au décret du conseil des Anciens en ce qui concernait la translation

du Corps législatif, et menacé de périr sous les coups des grenadiers s'il réclamait contre l'illégalité flagrante de la nomination de Bonaparte au commandement général des troupes, céda à la force et ajourna sa séance au lendemain 19, en convenant de se réunir à Saint-Cloud. Cambacérès, ministre de la justice, Fouché, ministre de la police, et tous les ministres qui ne demandaient qu'une occasion pour adorer le soleil levant, se hâtèrent de courir aux Tuileries.

Après s'être ainsi rendu maître de Paris, Napoléon songea à la journée du lendemain. C'était peu d'avoir renversé le gouvernement existant, il fallait faire reconnaître, par le Corps législatif, le gouvernement nouveau, qui devait se composer de Napoléon, Sieyès et Roger-Ducos, prenant le titre de consuls. Pour détruire, la connivence d'une partie du Conseil des Anciens avait suffi; pour édifier, avec quelque apparence de légalité du moins, le concours du Conseil des Cinq-Cents devenait indispensable. La tentative était audacieuse; aussi avait-on eu la précaution d'éloigner le Corps législatif de Paris, dont la population aurait pu faire contrepoids à l'armée, et où les directeurs opposants auraient pu être délivrés de leur prison par un mouvement insurrectionnel. A Saint-Cloud, au contraire, toutes les fraudes, tous les mensonges seraient permis, et, au pis aller si le Conseil des Cinq-Cents restait inexorable, le Conseil des Anciens était déjà trop compromis pour reculer.

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Le 19, Saint-Cloud fut le théâtre d'une seconde scène militaire qui, comme celle de la veille, se termina encore à l'avantage de Napoléon, mais où le sys-tème comminatoire fut impuissant et où il fallut recourir à la violence. Le Conseil des Cinq-Cents, auquel on ne pouvait cette fois enlever la parole, fit craindre un instant que cette arme, mise au service de la loi, ne balançât la puissance des baïonnettes. Vainement avant l'ouverture de la séance, les partisans de Napoléon essayèrent

T. III. 28 Livraison. (DICT. ENCYCL., ETC.)

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de lui gagner ou de lui acheter des suffrages; dès le début de la délibération, l'Assemblée rejeta avec indignation la proposition que fit Émile Godin de nommer une commission de sept membres pour faire un rapport sur la situation de la république. En revanche, elle accueillit avec un enthousiasme indicible la motion de Delbrel et de Grand-Maison, qui, malgré les efforts du président Lucien, de Boulay de la Meurthe et de leurs amis pour les en empêcher, demandèrent que l'assemblée prêtât de nouveau serment à la constitution de l'an III. Après l'appel nominal qui dura plus de deux heures, tous les députés, et Lucien lui-même, renouvelèrent leur premier serment.

Voyant la mauvaise tournure que prenaient les choses, apercevant déjà des signes d'hésitation dans les rangs de ses soldats, et craignant que le Conseil des Anciens lui-même, électrisé par cet exemple de patriotisme, ne prît une résolution analogue, Napoléon se présenta devant cette assemblée, à qui une lettre de Lagarde, secrétaire général du gouvernement, venait d'annoncer que quatre membres du Directoire ayant donné leur démission (*), et le cinquième ayant été mis en surveillance (**), il n'y avait plus de Directoire. Se remettant peu à peu, après quelques instants de trouble, Napoléon adjura, dans les termes les plus pressants, le Conseil des Anciens de prendre un parti et de pourvoir au salut de la république; mais son éloquence un peu novice ne toucha guère que les grenadiers, dont les bonnets s'apercevaient aux portes de

(*) Cela était complétement faux, puis que, comme on vient de le voir, Moulins et Gohier étaient retenus prisonniers au Luxembourg, pour n'avoir pas voulu donner leur démission.

(**) C'était encore là une supercherie. Ce cinquième membre était Sieyes, l'un des instigateurs du complot, et qui, pour dissimuler sa trahison et faire croire qu'il était effectivement en surveillance, resta constamment enfermé dans une voiture à la suite des troupes du général Bonaparte.

la salle, et auxquels l'orateur avait fait une invocation. Linguet, se levant tout à coup, lui dit d'une voix forte : « Général, nous applaudissons « à ce que vous dites; jurez donc avec << nous obéissance à la constitution « de l'an III, qui seule peut mainte« nir la république. » Le piége était habilement tendu, Napoléon en parut un moment accablé; mais recueillant toutes ses forces, et démasquant enfin son ambition, il s'écria : « La << constitution de l'an III! vous n'en << avez plus ! Vous l'avez violée au « 18 fructidor, quand le gouverne« ment a attenté à l'indépendance du Corps législatif ! Vous l'avez violée « au 30 prairial an VII, quand le « Corps législatif a attenté à l'indépendance du gouvernement! Vous << l'avez violée au 22 floréal, quand, « par un décret sacrilége, le gouver<< nement et le Corps législatif ont at«< tenté à la souveraineté du peuple, << en cassant les élections faites par << lui! La constitution violée, il faut << un nouveau pacte, de nouvelles ga<<< ranties. >>

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Telles sont du moins les paroles dont il accepta la responsabilité. On ne peut disconvenir qu'elles avaient beaucoup de sens, et qu'après de si flagrantes violations de la loi, Gohier, Moulins et le parti national furent coupables en lui refusant une dispense d'âge, qui lui aurait permis d'entrer d'une manière moins brusque au pouvoir, et qui ne l'y aurait pas laissé sans contre-poids. En admettant même qu'un homme de cette nature serait toujours parvenu à son idéal, au commandement suprême, il n'y serait arrivé que par transitions, à mesure qu'il aurait fait ses preuves, et qu'il aurait perfectionné son éducation politique, véritablement supérieure sous quelques rapports, mais encore si défectueuse sous quelques

autres.

Quoi qu'il en soit, la sortie de Napoléon rendit le courage à ses nombreux partisans dans l'Assemblée; elle fut chaleureusement appuyée par Cornudet et par Régnier. Cependant, comme

il parlait d'intrigues dont il était entouré, de prétendus patriotes qui lui avaient proposé, pour purifier les Conseils, d'en exclure les plus sincères amis de la patrie, on le somma de nommer les coupables. Il prononça les noms de Barras et de Moulins, qu'il accusa de lui avoir proposé de le mettre à la tête d'un parti tendant à renverser tous les hommes qui avaient des idées libérales; mais lorsqu'on le pressa de révéler des faits plus graves, il fut très-empêché de le faire. Cependant, d'Alphonse ayant demandé que l'assemblée réitérat le serment de fidélité à la constitution de l'an III, cette motion excita des murmures. Bien qu'une grande partie de l'assemblée penchât en faveur de Napoléon, le Conseil des Anciens ne pouvait ou n'osait agir. Le succès de la journée dépendait évidemment du Conseil des Cinq-Cents, à qui appartenait l'initiative; là était le noeud du problème; Napoléon ne craignit pas de s'y présenter.

C'était risquer son dernier enjeu. L'exaltation du Conseil des CinqCents était portée au comble. Bigonnet, comparant le serment unanime de l'assemblée à celui du Jeu de Paume, avait dit « Le premier a fondé la liberté, le second la consolidera. » On délibérait sur la lettre dans la quelle Barras annonçait sa démission, lorsque parut le général Bonaparte, suivi de grenadiers qui s'établirent à la porte de la salle des séances. L'agitation qui a lieu alors ne peut se décrire, toute l'assemblée se lève comme un seul homme; de toutes parts on crie: Vive la république!... A bas le tyran!... Vive la constitution de l'an III!... Hors la loi le dictateur!... A bas le Cromwell! Que faites-vous, téméraire ? lui dit Bigonnet. Retirez-vous; vous violez le sanctuaire des lois, ajoute un autre. Est-ce donc pour cela, général, que tu as vaincu? s'écrie Destrem. On l'entoure, on le repousse, et il tombe dans les bras de ses soldats qui l'emportent.

Est-il vrai, comme on l'a prétendu,

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que parmi les représentants qui se précipitèrent sur lui, il y avait des mains armées de poignards? N'est-ce pas plutôt une de ces fables comme les conspirateurs en inventèrent tant, pendant les deux journées de brumaire? Ce qui le prouve, c'est que, si l'on avait réellement attenté aux jours de son frère, Lucien n'eût pas continué de présider, et n'eût pas fait des instances pour que Napoléon fût rappelé dans l'assemblée et entendu. « Le mouvement qui vient d'avoir << lieu au sein du Conseil, » dit-il aussitôt qu'il lui fut possible de se faire entendre, « prouve ce que tout le « monde a dans le cœur, ce que moi« même j'ai dans le mien. Il était cependant naturel de croire que la « démarche du général n'avait pour objet que de rendre compte de la « situation des affaires, de quelque objet intéressant la chose publique ; « mais je crois que, en tout cas, nul << de vous ne peut lui supposer des « projets liberticides. » — «Que le géné<< ral soit traduit à la barre pour rendre compte de sa conduite! » dit une voix. Dans l'espoir qu'on donnerait suite à cette demande, Lucien cède le fauteuil de la présidence à Chasal. Mais Bertrand du Calvados demande que l'on commence par décréter que le général Bonaparte n'est pas le commandant des grenadiers qui composent la garde du Conseil. Blin propose de déclarer que les six mille hommes qui entourent l'Assemblée font partie de la garde du Corps législatif. « Je « ne m'oppose pas, répond Lucien, à << la proposition; mais je dois faire « observer que les soupçons paraissent << s'élever avec bien de la rapidité et «< peu de fondement. Un mouvement, même irrégulier, aurait-il déja fait ou«blier tant de services rendus à la liber«<té! Je demande qu'avant de prendre << aucune mesure vous appeliez le gé<< néral. » Les cris Hors la loi ! Aux voix! La mise hors la loi contre le général Bonaparte ! furent les seules réponses qu'obtint Lucien, qui venait de reprendre sa place au fauteuil.

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On le somma lui-même de mettre.

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