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les prévenir. Cependant les victoires des troupes républicaines ayant enlevé aux rebelles tout espoir de succès, le comte de Bourmont abandonna leur cause et fit sa soumission à la république. Il vint s'établir à Paris, où il épousa mademoiselle de Bec de Lièvre, d'une ancienne famille de Bretagne. Se montrant alors très-empressé de plaire au premier consul, il réussit, en courtisan adroit, à lui inspirer de la confiance et acquit du crédit auprès de lui. Le jour de l'explosion de la machine infernale, il se rendit dans la loge de Bonaparte et demanda la punition des jacobins qu'il accusa d'être les auteurs de cet attentat. Mais cette dénonciation avait donné des doutes au gouvernement sur la bonne foi du comte de Bourmont; Fouché, ministre de la police, fit surveiller sévèrement sa conduite. Quelque temps après, de nouveaux soupçons s'étant élevés contre lui, il fut renfermé au Temple, transféré ensuite à la citadelle de Dijon, et de là à celle de Besançon, d'où il réussit à s'évader deux ans après, et se réfugia en Portugal avec sa famille. Ses biens ne furent point séquestrés. Rentré en France après la prise de Lisbonne par le général Junot, en 1808, le comte de Bourmont, qui n'avait encore montré qu'un attachement fort suspect à la nouvelle cause qu'il avait embrassée, parut alors s'y dévouer franchement. Il fut nommé colonel adjudant-commandant de l'armée de Naples, d'où il passa à l'état-major du prince Eugène, avec lequel il fit la campagne de Russie. Employé en 1813, dans le 11 corps, il assista aux batailles qui furent livrées sur les bords de l'Elbe. Nommé général dans le courant d'octobre de cette année, il eut, en 1814, le commandement d'une brigade du corps de réserve, avec lequel il se signala par sa défense de Nogent, où il fut blessé. Sa belle conduite, dans cette circonstance, lui valut le grade de général de division. Il n'en fut pas moins un des premiers à reconnaître l'autorité du roi Louis XVIII, qui le décora du titre de grand of

ficier de la Légion d'honneur et le nomma commandant de la 6 division militaire à Besançon. Il était encore dans cette ville à l'époque où Napoléon débarqua sur les côtes de la Provence. L'ordre lui fut alors donné de se réunir au maréchal Ney, et il fut témoin de la défection des troupes. Pendant les Cent jours, M. de Bourmont se rendit à Paris, s'insinua de nouveau dans les bonnes grâces de l'empereur, et obtint le commandement de la 6 division du corps d'armée, commandé par le général Gérard. Il prit la route de Flandre; et, la veille de la bataille de Waterloo, il passa à l'ennemi. Il figura ensuite dans les procès du maréchal Ney et du général Bonnaire, et contribua beaucoup par ses dépositions à la condamnation du premier. En 1816, il fut nommé commandant de l'une des divisions de la garde royale. Lorsqu'en 1823, l'armée française entra en Espagne, le comte de Bourmont y commanda la division d'infanterie de la garde royale attachée au corps de réserve. En 1829, il fit partie du ministère Polignac, avec le portefeuille de la guerre. Ce fut lui qui, en 1830, commanda l'expédition d'Alger. Il dut à cette circonstance de n'être pas impliqué dans le procès des ministres après la révolution de juillet. Charles X, après la prise d'Alger, n'avait pas craint de nommer M. de Bourmont maréchal de France; le nouveau gouvernement fut mieux inspiré, en refusant de lui reconnaître ce titre, et en lui donnant le lieutenant-général Clausel pour remplaçant dans le gouvernement d'Afrique. Depuis lors, M. de Bourmont essaya de ranimer la guerre de la Vendée, où il accompagna la duchesse de Berri dans sa folle entreprise. Il mit aussi son talent militaire au service de don Miguel en Portugal. Ce dernier acte a autorisé le gouvernement à lui appliquer tout ré cemment les dispositions du code concernant les Français qui servent en pays étranger sans autorisation : M. de Bourmont a cessé d'être Français. Telle devait être la fin de l'homme

qui abandonna la Vendée pour la république, Napoléon pour les Bourbons, les Bourbons pour Napoléon, puis enfin, par une dernière trahison, la plus infâine de toutes, déserta les rangs français au moment du combat. Vainement ses fils, animés de sentiments qui les honorent, ont tout fait pour laver son nom : il est des taches qui ne s'effacent pas. La France admire leur piété filiale, elle plaint leur malheureuse destinée; mais, tout en les plaignant, elle ne peut sacrifier l'honneur national à des exigences de famille, et persiste dans sa triste conviction. D'ailleurs, que pourrait son indulgence contre la flétrissure historique de l'ordre du jour qui annonce la désertion de leur père; contre cette autre flétrissure historique renfermée dans ce mot de l'empereur à SainteHélène « Bourmont est une de mes

erreurs. »

BOURNAZEL, terre et seigneurie dans le Rouergue, à trente-quatre kilomètres nord-est de Montauban, érigée en marquisat en 1624.

BOURNON (Jacques-Louis, comte de), né à Metz, quitta le service militaire à l'époque de la révolution, et alla grossir le nombre des émigrés. Après avoir fait la campagne de 1792, il se rendit en Angleterre, où il s'adonna exclusivement à son goût pour les sciences naturelles. La minéralogie, spécialité dans laquelle il avait déjà acquis quelque renom, fut le principal objet de ses études, et il ne tarda pas à être admis dans le sein de la société royale de Londres. Il fut un des savants qui contribuèrent le plus à la formation de la société géologique, dont les travaux ont aidé la science à faire de nouveaux progrès. Revenu à Paris, en 1814, M. de Bournon reprit le chemin de Londres, en 1815, et ce ne fut qu'après la seconde restauration qu'il effectua son retour définitif en France. Alors Louis XVIII le nomma directeur général de son cabinet de minéralogie.

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BOURNON MALLARME (Comtesse de), membre de l'Académie des Arcades de Rome, née à Metz, en 1754,

a publié un grand nombre de romans, dont la plupart ont eu du succès à l'époque où ils ont paru, mais qui sont complétement oubliés maintenant. (Voyez ROMANS.)

BOURNONVILLE, terre et seigneurie du Boulonnais, à douze kilomètres E. de Boulogne, érigée en duché en 1600.

BOUROTTE (dom François-Nicolas), bénédictin de la congrégation de SaintMaur, fut un de ceux qui terminèrent l'Histoire générale du Languedoc, dont le cinquième volume, publié par dom Vaissette, s'arrêtait à l'année 1643. On a en outre de lui: Mémoire sur la description géographique et historique du Languedoc. 1759, in -4°; Recueil de lois et autres pièces relatives au droit public et particulier du Languedoc. Paris, 1765, in-4°; Arrêts et décisions qui établissent la possession de souveraineté et propriété de Sa Majesté sur le fleuve le Rhöne d'un bord à l'autre. Paris, 1765, in-4°; Précis analytique du procès intenté à la province du Languedoc par les états de Provence, concernant le Rhône et ses dépendances. Paris, 1771, in-4°. Dom Bourotte était né à Paris en 1710; on ne sait pas au juste la date de sa mort.

BOUROTTE, sergent d'artillerie, s'aperçut, le 16 avril 1807, au siége de Nice, qu'un obus venait de traverser le parapet et de s'introduire dans le petit magasin à poudre de la batterie où il savait que plusieurs bombes et obus chargés étaient déposés. Sans hésiter, Bourotte pénètre en rampant sur les genoux dans ce réduit, où la mort paraissait inévitable; il saisit l'obus, recule et le fait rouler au milieu de la batterie, où il éclata à l'instant sans blesser personne. La croix de la Légion d'honneur fut accordée à ce brave.

BOURREAU. Voyez EXÉCUTEUR des arrêts de justice criminelle.

BOURRÉE. Cette danse, d'un mouvement fort gai, et à deux temps, est originaire d'Auvergne. A la voir aujourd'hui à Paris, reléguée, avec ses petites allures, dans quelques ca

barets fréquentés par de pauvres Auvergnats, qui devinerait le rôle brillant qu'elle a longtemps joué en France? Introduite à la cour par Marguerite de Valois, fille de Catherine de Médicis, qui avait les jambes fort belles, la bourrée y succéda aux basses danses, où l'on marchait au lieu de sauter. Elle fut très à la mode depuis Charles IX jusqu'à Louis XIII, et redevint en vogue sous la régence. Aujourd'hui par un effet des vicissitudes éternelles de la mode, elle est bannie de la bonne société, où la basse danse a repris son empire.

BOURRÉE (Edme-Bernard),.né à Dijon en 1652, et mort dans la même ville, le 26 mai 1722, était de la congrégation de l'Oratoire. Prédicateur, théologien, il a, en outre, composé un assez grand nombre d'ouvrages. Quelques-uns touchent indirectement à l'histoire de France, comme les Conférences ecclésiastiques du diocèse de Langres, 1684, 2 vol. in-12, et l'Abrégé de la vie du père François de Cluny, prêtre de l'Oratoire. 1698,

in-12.

BOURRELIER (Nicolas de Malpas), né à Dôle en 1606, fut conseiller au parlement de Franche-Comté en 1674, et mourut dans sa ville natale en 1681. Nous ne le mentionnons ici que parce qu'il prononça, en 1632, l'Oraison funebre de Cleriadus de Vergy, gouverneur de Franche-Comté. BOURRELIERS. La corporation des bourreliers était une des plus anciennes de Paris. La chevalerie, et les jeux que préférait la noblesse, avaient, dès les premiers temps du moyen âge, donné naissance à de nombreux métiers, qui s'étaient partagé la fabrication des divers objets qui composaient l'équipement du chevalier et le harnachement de sa monture. Ces métiers, plus nombreux qu'on ne le croirait d'abord, parvinrent bientôt à un assez haut degré de prospérité, puis que les artisans qui les pratiquaient trouvaient, en se livrant aux spécialités les plus restreintes, les moyens de s'enrichir. Les bourreliers, par exemple, ne s'occupaient que de la fabrica

tion des colliers et des dossiers des selles; les autres parties de l'équipement étant du ressort d'autres corporations, telles que celles des selliers, des lormiers, ou faiseurs de brides et de mors, des blasonniers et des chapuiseurs de selles et d'arçons. Ces corporations si voisines devaient sou vent empiéter les unes sur les autres; aussi elles étaient souvent en contes tation, et le soin de les maintenir dans leurs attributions respectives n'etait pas le moins pénible de ceux auxquels devait se livrer la garde de la prévôté de Paris.

Du reste, les statuts de la commu. nauté des bourreliers n'avaient pour objet que d'assurer la bonne qualite des objets fabriqués par ces artisans. Ils ne contenaient aucune disposition remarquable, et qui mérite d'être citée. Au moment où les corporations furent supprimées, il fallait, pour être admis dans celle des bourreliers, avoir fait cinq années d'apprentissage, deux années de compagnonnage, et présenter un chef-d'oeuvre, dont les fils de maîtres seuls étaient exempts. Le brevet coûtait soixante-douze` livres, et la maîtrise neuf cent cinquante livres.

BOURRIENNE (Louis-Antoine Fau velet de), né à Sens en 1769, fut à l'école de Brienne le condisciple, l'ami et le confident de Napoléon. Il alla ensuite à Leipzig étudier le droit et les langues étrangères; puis il visita la Pologne, et, à son retour en France en 1792, il fut nommé secrétaire de légation à Stuttgardt, où il se rendit quelques jours avant le 10 août. La guerre qui éclata entre l'Allemagne et la France le ramena un instant à Paris; mais il retourna presque aussitôt à Leipzig, et s'y maria. Ses intelligences avec un agent de la république française excitèrent les soupçons émigrés, alarmèrent les autorités, et l'électeur de Saxe ordonna l'arrestation de ces deux personnages. Après soixante-dix jours de captivité, de Bourrienne fut mis en liberté, se vit forcé de quitter immédiatement la Saxe et de rentrer en France. Il

des

mais il

avait été inscrit sur la liste des émigrés quoique n'inspirant que peu de confiance au gouvernement, il parvint cependant à se faire rayer. Mais il resta dans l'oubli jusqu'en 1797, époque où des triomphes dont l'histoire n'offre point d'exemple fixaient déjà sur Napoléon l'attention du monde. Bourrienne se décida alors à écrire à son ancien condisciple pour lui demander l'autorisation de se rendre auprès de sa personne. Le général de l'armée d'Italie l'invita à venir le joindre sur-le-champ à Gratz en Styrie, et dès qu'il fut arrivé, il le fit son secrétaire intime, l'emmena dans toutes ses expéditions, l'établit auprès de lui au palais des Tuileries, et le fit nommer conseiller d'Etat, le 20 juillet 1801; mais cet excès de confiance et de faveur cessa tout à coup. Compromis par la banqueroute de la maison Coulon, de Bourrienne ne put cacher la part qu'il avait prise aux opérations de cette maison, et Napoléon, irrité, l'éloigna de son cabinet. Il parvint pourtant, aidé de Fouché, à se faire nommer chargé d'affaires de France à Hambourg, avec le titre d'envoyé extraordinaire près le cercle de BasseSaxe. Il conserva cet emploi jusqu'en 1810, époque où des plaintes nombreuses engagèrent l'empereur à envoyer à Hambourg un homme de confiance pour y examiner la conduite du chargé d'affaires. Ce commissaire évalua à deux millions de fr. les exactions commises par de Bourrienne. Napoléon se montra indulgent, et condamna seulement le coupable à restituer la moitié de cette somme. Mais cette affaire avait entraîné des longueurs, et 1814 était déjà arrivé que Bourrienne n'avait pas encore effectué sa restitution. A peine le gouvernement provisoire fut-il institué, qu'il alla offrir ses services au prince de Talleyrand. Celui-ci lui fit donner la direction générale des postes, et le gouvernement provisoire lui accorda la remise du million que l'empereur l'avait condamné à restituer. Mais à l'arrivée de Louis XVIII, de Bourrienne fut obligé de céder sa place à M. Ferrand. Il fut alors nommé

conseiller d'État honoraire. Le 12 mars 1815, au moment où l'empereur sortit de l'île d'Elbe, de Bourrienne fut nommé préfet de police. Son premier acte fut de signer l'ordre d'arrêter le duc d'Otrante (Fouché), qui lui avait rendu d'éminents services. Il alla ensuite avec d'autres transfuges, dont il était le digne collègue, composer le conseil de cette dynastie que l'étranger nous imposait, et contre laquelle la France épuisée faisait ses derniers efforts. Louis XVIII le nomma alors son chargé d'affaires à Hambourg; mais il n'eut pas le temps de remplir cette place. Après la seconde restauration, il fut nommé conseiller d'État, et, peu de temps après, fut envoyé par le département de l'Yonne à la chambre des députés. Il y vota constamment avec la majorité. Réélu en 1821, il sapa sans ménagement, dans son rapport sur le budget, les institutions libérales, et rien de tout ce qui tient à la gloire de la nation ne fut épargné; aussi reçut-il de l'opposition le surnom d'Omar. Réélu à la chambre septennale, il y vota dans le sens de M, de Villèle, dont il rédigeait, dit-on, chaque année le budget, service qui était annuellement payé au prix de cent mille francs. Mais bientôt le dérangement de sa fortune devint tel, qu'il fut forcé de s'enfuir en Belgique pour échapper à ses créanciers. Il se réfugia à Fontaine-l'Évêque, près Charleroy, chez la duchesse de Brancas, et trouva le moyen de s'y créer de nouvelles ressources, en vendant pour soixante mille francs, au libraire Ladvocat, le droit de publier, sous son nom, dix volumes de ses mémoires. Ces mémoires, rédigés sur des notes fournies par de Bourrienne, par M. de Villemarest, contiennent sur Napoléon des calomnies qui ont achevé de perdre Bourrienne dans l'opinion publique. Cet homme était encore en Belgique à l'époque de la révolution de juillet. La nouvelle de cet événement le chagrina vivement. Son esprit s'égara tout à fait, et l'on fut obligé de le conduire près de Caen, dans une maison destinée au traitement des

aliénés. C'est là qu'il mourut en 1834. BOURRU (Edme-Claude), dernier doyen et bibliothécaire de l'ancienne faculté de médecine de Paris, mort en 1823, à quatre-vingt-seize ans, est auteur d'un assez grand nombre de traductions de livres anglais, et de quelques ouvrages qui ont eu peu de succès. Nous citerons seulement son Éloge funèbre du docteur Guillotin, 1814, in-4°.

BOURSAULT (Edme), né à Mucitl'Évêque en Bourgogne, au mois d'octobre 1638, et mort à Montluçon, le 15 septembre 1701, est un de ces auteurs dramatiques qui, au dix-septième siècle, eurent de la vogue à défaut de gloire, et dont quelques productions sont encore estimées aujourd'hui. On joue et on applaudit encore le Mercure galant, qui est la meilleure comédie de Boursault. Lorsqu'il vint à Paris, en 1651, il ne savait encore que le patois de sa province; quelques années après il était devenu un écrivain assez remarquable pour qu'on le chargeât de composer un livre destiné à l'éducation du dauphin. Boursault plaisait par les qualités du cœur, aussi bien que par celles de l'esprit; son caractère franc et ouvert lui fit beaucoup d'amis. Il fut lié avec la plupart des gens de lettres ses contemporains, si l'on en excepte Molière, contre lequel il se crut des griefs et qu'il eut l'imprudence d'attaquer dans une satire. Molière prit sa revanche dans l'Impromptu de Versailles, et nomma même son adversaire dans la scène où il le jouait. Ce qui fait plus d'honneur à Boursault que tout l'esprit qu'il mit dans cette querelle, c'est la manière dont, à une autre époque de sa vie, il se conduisit à l'égard de Boileau. Étant receveur des tailles à Montluçon, il apprit que Boileau, qui était venu à Bourbonne pour sa santé, se trouvait, par le manque imprévu d'argent, dans le plus grand embarras. Il accourut aussitôt, quoique Boileau l'eût maltraité dans se satires, et lui offrit sa bourse avec une générosité si franche, qu'il lui fit accepter un prêt de deux cents louis. A une grande vivacité d'esprit, Bour

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sault joignait une indépendance de caractère et d'opinions qui nuisit quelquefois à sa fortune. Dans sa jeunesse, une gazette qu'il rédigeait et qui lui avait valu d'abord une pension de deux mille francs, fut supprimée à cause de la liberté avec laquelle il y attaquait plusieurs personnages de cour et entre autres le confesseur de la reine. Le hardi journaliste n'échappa même à la Bastille que par la protection du grand Condé. Plus heureux au théâtre, il vit représenter quatre-vingts fois de suite le Mercure galant, pièce dont le fond est très-léger, mais où l'on trouve ce qui, au défaut de caractères et en l'absence d'un plan et d'une action, peut faire vivre un ouvrage au théâtre, de la gaieté. Dans les détails, Boursault a une gaieté si aisée, si naturelle, qu'il s'approche souvent du vrai comique, et que quelques endroits de son dialogue rappellent le style de Molière. Ce n'est qu'une pièce à tiroirs; mais des scènes telles que celle des procureurs, et cette autre où un soldat ivre s'irrite des solécismes qu'une irrégularité de la langue lui fait commettre, attestent un génie vif, enjoué, facile. Les mêmes qualités se retrouvent, quoique à un degré inférieur, dans les deux comédies d'Esope à la ville et d'Esope à la cour. La dernière ne fut jouée qu'après la mort de Boursault, et l'on en supprima à la représentation quelques vers qui parurent une allusion maligne à Louis XIV. A la ville et à la cour, Ésope est un homme d'esprit, un moraliste aimable: mais, à la ville, il a le tort de débiter des fables composées pour la plupart sur des sujets déjà traités par la Fontaine, et, à la cour, le tort bien plus grand encore d'être ce que ne sont point or dinairement les bossus ni les sages, c'est-à-dire, amoureux. Témoins de ses succès, les amis de Boursault lui proposèrent de le présenter aux suffrages de l'Académie. Il refusa, disant qu'il n'était point assez instruit : il est vrai qu'il ne savait ni le latin ni le grec; mais la manière dont il écrivait le français le rendait digne du fauteuil, et son refus d'y prétendre est un trait

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