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durables. Mais une perte dont le Dauphin et la Dauphine ne se consolèrent jamais, ce fut la mort du duc de Bourgogne, leur fils aîné; cet enfant extraordinaire par ses heureuses dispo sitions et ses précoces vertus, faisait la joie de sa famille.

Cependant, il restait à ces parens désolés, le duc de Berri (depuis Louis XVI), le comte de Provence (aujourd'hui Louis XVIII), le comte d'Artois, (aujourd'hui MONSIEUR), Madame Clotilde (mariée en 1775 à CharlesEmmanuel de Savoie, prince de Piémont), et l'infortunée princesse Elisabeth, qui fut le dernier fruit de cette union.

Le Dauphin nomma gouverneur des jeunes princes, le duc de la Vauguyon, seigneur d'une valeur et d'une probité reconnues. L'abbé de Radonvillers, membre de l'académie française, fut leur sous-gouverneur. Il leur donna pour précepteur l'évêque de Limoges, prélat qui joignait au savoir la noble franchise des mœurs antiques, et qu'il suffit de nommer pour rappeler l'idée de la vertu. Le P. Berthier, jésuite, l'un des hommes les plus savans de son ordre,

lui fut adjoint; le célèbre abbé Nollet leur donna des leçons de physique, et l'historiographe Moreau leur enseigna l'histoire. Le Dauphin déclara à ces différens instituteurs, qu'il leur transférait toute son autorité, et qu'il voulait que des enfans destinés par leur naissance à commander un jour à la nation, commençassent par respecter eux-mêmes les règles de la dépendance et de la soumission.

Regardant l'éducation de ses fils comme un de ses devoirs les plus sacrés, il voulut y présider lui-même. Deux fois la semaine, le prélat les conduisait à l'appartement du Dauphin : ce prince examinait leur travail, et leur faisait rendre compte de ce qui avait fait la matière de leurs études depuis la dernière répétition. Il savait exciter leur émulation par des récompenses ou des privations ménagées à propos. IL applaudissait tantôt à l'un, tantôt à l'autre. Un terme bien choisi, une règle heureusement appliquée, une construction aisée, un tour élégant, une phrase harmonieuse, devenaient la matière de ses éloges.

Il goûtait surtout la plus vive satisfaction en

découvrant de bonnes qualités dans le cœur de ses enfans; et les personnes préposées à leur éducation, étaient sûres de lui causer la joie la plus sensible, en lui racontant quelque trait de leur part qui annonçât le goût des belles actions. Il portait jusqu'au scrupule l'attention à éloigner d'eux ce qui aurait pu porter là moindre atteinte à l'innocence de leurs moeurs, et quoique leur âge les garantît encore des dangers de la lecture, il avait déjà pris des précautions pour qu'il ne leur tombât entre les mains aucune de ces productions frivoles ou licencieuses, qui, en inspirant le dégoût des études solides, jettent souvent dans un jeune cœur les premières étincelles d'un feu qui doit causer sa perte. « Je me rappelle, disait-il un jour, d'avoir surpris la vigilance de mon précepteur, pour lire quelques romans qu'un valet de chambre m'avait procurés. Je n'apercevais pas alors comme aujourd'hui le poison qu'ils cachaient mais je serais au désespoir que de semblables livres tombassent entre les mains de mes enfans. »

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Le Dauphin saisissait toujours, et faisait

souvent naître les occasions de donner aux jeunes princes quelques leçons utiles: il leur en fit une des plus frappantes lorsqu'on suppléa les cérémonies de leur baptême : après que leurs noms eurent été inscrits sur le registre de la paroisse, il se le fit apporter ; et l'ayant ouvert, il leur fit remarquer que celui qui les précédait, était le fils d'un pauvre artisan, et leur dit ces belles paroles : « Vous le voyez, mes enfans, aux yeux de Dieu les conditions. sont égales, et il n'y a de distinction que celles que donne la vertu : vous serez un jour plus grands que cet enfant dans l'estime des peuples; mais il sera lui-même plus grand que vous devant Dieu, s'il est plus vertueux. »

Le Dauphin était autant aimé de ses enfans, qu'il les aimait lui-même. Un jour où devait se faire une revue générale des troupes qui formaient le camp de Compiègne, ce prince s'était rendu à la tête de son régiment pour attendre le Roi. Ses fils curieux de jouir de ce beau coup d'oeil, passaient devant les lignes dans une voiture découverte. Arrivés auprès du régiment Dauphin, ils témoignèrent

une joie naïve à la vue de leur père. Celui-ci s'approche, leur tend les bras: tous à l'instant se précipitent sur son sein; il les embrasse tendrement l'un après l'autre, et rentre dans les rangs. Toute l'armée applaudit à ce spectacle ravissant. On entendait de toutes parts, officiers et soldats, s'écrier avec transport: <«< Vive notre bon Dauphin! Comme il aime ses enfans! comme il en est aimé! »

Ce prince, guidé dans toutes ses actions par l'amour de son pays, croyait avec raison devoir des soins particuliers à celui de ses fils que l'ordre de la naissance semblait appeler à gouverner un jour la France, et à compter ses frères parmi ses sujets. Quand son fils aîné, le duc de Bourgogne, eut transmis par sa mort tous ses droits au duc de Berri, celui-ci devint alors l'objet principal des attentions du Dauphin. Cependant ce bon père ne déguisait pas toujours une certaine prédilection pour M. le comte de Provence; l'esprit vif et précoce de M. le comte d'Artois flattait aussi beaucoup son orgueil paternel.

Intelligent, appliqué, doué d'une mémoire

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