Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

tracé, à quelques égards, sous l'influence du mécontentement et des contrariétés que causaient, à Bonaparte, l'insoumission et les coups de main des Arabes.

Il ordonna à Reynier de se tenir concentré à Salhieh et à Belbeis, de punir les tribus d'Arabes qui s'étaient révoltées, de tâcher d'en obtenir des chevaux et des otages, de presser les travaux de Belbeis, afin qu'on pût y placer bientôt quelques pièces de canon, d'approvisionner le plus possible Salhieh. «La meilleure manière, ajoutaitil, de punir les villages qui se sont révoltés, c'est de prendre leur cheyk El-Beled et de lui faire couper le cou, car c'est de lui que tout dépend.'»

La province de Charqyeh était la plus arriérée pour la rentrée des contributions et la levée des chevaux ; le général en chef pensait que les villages qui n'avaient pas vu les troupes ne se regarderaient pas comme soumis; il désirait donc que Reynier envoyât cinq ou six colonnes mobiles dans les différens points de son commandement, et qu'il fit ensuite occuper Qatieh, où son intention était de faire construire un fort".

Le général en chef écrivit à Fugières : « Il est nécessaire que vous portiez le plus grand respect à la ville de Tantah, qui est un objet de vénération pour les Mahométans. Il faut surtout éviter de rien faire qui puisse leur donner lieu de se

'Lettre du 6 brumaire. 2 Lettre du 22 frimaire.

plaindre que nous ne respectons pas leur religion et leurs moeurs !. »

:

La ville de Tantah, dans la province de Garbyeh, et que les voyageurs européens avaient peu visitée avant l'expédition française, était la plus commerçante de l'intérieur du Delta. Outre qu'elle est située dans un territoire extrêmement fertile, et que ses habitans exercent leur industrie sur le lin qui y croît en abondance, elle est encore le siége de foires annuelles très-renommées ces foires, comme la plupart de celles qui se tiennent en Orient, doivent leur origine à la dévotion superstitieuse des Musulmans, Le tombeau d'un santon célèbre, appelé Seyd-Ahmedel-Bedaouy, était, dans la principale mosquée de Tantah, l'objet d'une grande vénération. La mosquée possédait de grands revenus, et recevait beaucoup d'ex voto. On y allait en pélerinage à deux époques différentes de l'année, à l'équinoxe du printemps et au solstice d'été. Le jour de la fête était annoncé à toute l'Égypte par des courriers porteurs d'un firman du pacha. Les 10 ou 12 okels destinés à plusieurs villes de l'Égypte et à différentes nations mahométanes, étaient alors remplis; les marchands forains occupaient des loges établies dans les rues, et la campagne autour de la ville était couverte de tentes.

Fugières fit une expédition dans cette ville; quoique les troupes se conduisissent bien, les habitans ameutèrent tous les villages voisins et les

'Lettre du 24 vendémiaire.

Arabes, et accueillirent à coups de fusil et de canon le détachement qui se retira en combattant pour sa défense et usa d'une grande modération.

<«< J'ai appris avec peine, écrivit Bonaparte à Fugières, ce qui est arrivé à Tantah. Je désire qu'on respecte cette ville, et je regarderais comme le plus grand malheur qui pût arriver que de voir ravager ce lieu saint aux yeux de tout l'Orient. J'écris aux habitans de Tantah et je vais faire écrire par le divan général. Je désire que tout se termine par négociation'. >>

Fugières répondit que personne n'avait eu plus de respect que lui pour les mœurs et la religion des Musulmans depuis qu'il était en Égypte, et que la conduite qu'avaient tenue les troupes à Tantah en était une preuve.

1

Pour compléter le tableau de la situation des provinces, il nous reste encore à retracer à part, à cause de l'abondance des matières, l'état de celle d'Alexandrie, où commandait Kléber, et celle de Rosette, dont Menou était gouverneur.

ALEXANDRIE ET BAHYREH.

- KLEBER.

La correspondance de Kléber avec le général en chef n'était remplie que de jérémiades, ainsi le général lui-même appelait ses doléances. Les Anglais avaient réuni 26 voiles; il les voyait

que

Lettre du 25 vendémiaire.

il

déjà bombarder les ports d'Alexandrie, et entrer sans hésiter dans ces passes que la marine française avait trouvées dangereuses et impraticables. Dans l'impossibilité de correspondre par mer, trouvait instant d'établir une communication sûre par terre, ainsi que pour protéger l'arrivage des eaux du Nil. La colonne insignifiante du général Dumuy était insuffisante pour remplir cet objet. Afin de pourvoir au service, il vendait du riz; il avait recours à tous les expédiens pour se procurer des fonds. Il ne savait quel parti prendre relativement à l'embargo mis sur la caravelle, sur les bâtimens neutres réduits à un état affreux de misère, ni sur les réquisitions qu'on leur avait faites sans en payer la valeur. Il leur avait donné du riz pour la moitié de la somme qui leur était due. Depuis 35 jours, il était sans nouvelles de l'armée; il courait de mauvais bruits; Kléber avait sur la santé du général en chef des inquiétudes que beaucoup de personnes partageaient. Il lui avait envoyé son aide-de-camp Loyer dans l'espérance qu'il se rendrait à Alexandrie. Enfin, on était menacé de la guerre avec la Porte '.

Quoiqu'il lui restât encore à détruire MouradBey qui occupait la Haute-Égypte et à soumettre l'intérieur du Delta où des partisans des beys avaient les armes à la main, Bonaparte, prévoyant les besoins des provinces de Bahyreh et d'Alexandrie, envoya l'adjudant-général Brives avec un bataillon à Rahmanieh, et le mit aux or

' Lettres de Kléber à Bonaparte, des 23 et 24 thermidor.

dres de Kléber, parce que si les Anglais laissaient des forces dans les parages d'Alexandrie et interceptaient les communications avec Rosette, il devenait indispensable d'occuper le village d'Abouqyr, afin de pouvoir communiquer avec cette ville par terre.

Le général en chef envoya aussi à Alexandrie le général d'artillerie Manscour, pour l'armement des côtes, et pour prendre des renseignemens sur le pays, afin de pouvoir remplacer Kléber lorsque les circonstances lui permettraient de rejoindre l'armée.

1

Il lui ordonna de faire démolir la maison du Musulman qui avait assassiné un canonnier français.

Il lui annonça qu'il ferait filer des troupes sur Rosette dès que cela serait possible; mais qu'il devait n'y pas compter d'ici à plusieurs jours, et tirer parti de ses propres forces. Quant à l'argent, il ne doutait pas que la contribution extraordinaire ne fût rentrée, et il avait fait des fonds pour la marine. « Dans ce pays, lui mandait-il, les choses ne sont pas encore assises; chaque jour y porte une amélioration considérable. Je suis fondé penser que dans quelques jours nous commence→ rons à être maîtres. L'expédition que nous avons. entreprise exige du courage de plus d'un

à

genre'.» A la réception de la lettre de Kléber, du 23 thermidor, Bonaparte donna au général Marmont

'Lettre du 28 thermidor.

« ZurückWeiter »