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j'aye en ce moment des plaintes; on se plaint même des vexations que commettent plusieurs officiers d'état-major'. »

Le 30, le village de Choarah, situé à une portée de canon de Damiette, se révolta; les Arabes s'y réunirent et en firent leur quartier-général. Les premier et deuxième jours complémentaires, ils reçurent beaucoup de renforts par le lac de Menzaleh. La garnison de Damiette fut aussi renforcée par un bataillon de la 25°. Le général Vial se décida le quatrième jour complémentaire, à la pointe du jour, à attaquer Choarah. Le général Andréossy prit le commandement de la flotille, et vint débarquer au-delà du village. L'ennemi, au nombre de 10,000 hommes, était sur une seule ligne occupant tout l'espace depuis le lac de Menzaleh jusqu'au Nil. Le général Vial envoya une compagnie de grenadiers de la 25€ pour attaquer la droite des ennemis, et leur couper la retraite par le lac Menzaleh; dans le temps qu'il les attaquait de front, au pas de charge, ils furent culbutés dans l'inondation du Nil et dans le lac. Le village de Choarah fut emporté et livré aux flammes. Il y eut plus de 1500 hommes tués ou noyés. On leur prit deux belles pièces de canon de quatre, en bronze, et trois drapeaux. Les Français n'eurent qu'un homme tué et quatre blessés.

L'intention de Bonaparte était qu'on mît enfin tout en usage pour s'assurer des deux provinces

• Lettre du 20 fructidor.

de Mansourah et de Damiette; il paraissait croire que, pour y parvenir, on n'avait encore rien fait. Telles furent, en conséquence, les instructions et les ordres qu'il donna à Dugua. Se rendre à Damiette, demander des otages dans tous les villages qui s'étaient mal conduits, tenir sur le lac Menzaleh des djermes armées avec des pièces de trois et de cinq, y faire même entrer une chaloupe canonnière, si elle pouvait y naviguer; s'emparer de toutes les îles du lac, y prendre des otages, s'en rendre entièrement maître, se mettre en correspondance avec le général Lagrange qui commandait à Salhieh; ne point se disséminer; faire une proclamation aux gens du pays, leur représenter qu'ils étaient dupes des propos insensés d'Ibrahim-Bey, qui les exposait à être massacrés tandis qu'il restait tranquille à Gaza; tâcher d'avoir les chefs dans ses mains en feignant de ne pas les connaître; désarmer le plus possible, surtout les villages situés près de la mer et qui pouvaient avoir une influence sur l'embouchure du Nil; s'ils disaient qu'on les exposait aux incursions des Arabes, ne point les écouter, tous ces gens-là étant d'intelligence; faire partir sur-le-champ deux fortes colonnes, l'une pour occuper la ville de Menzaleh, soit par terre, soit par le canal; l'autre pour accompagner le général Andréossy. «< Dussiez-vous, ajoutait Bonaparte, faire marcher toute votre division, il faut que ce général arrive à Péluse. Il faut des exemples sévères, le désarmement, des otages et des têtes coupées. Réunissez la quantité de bateaux nécessaire pour vous por

ter rapidement à Damiette, à Salhieh, à Mansourah; essayez de prendre, par la ruse, HassanThoubar, et, si jamais vous le tenez, envoyez-le

moi au Kaire'. >>

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Le général en chef avait chargé le général Andréossy, officier aussi distingué par la science que par la bravoure, de faire la reconnaissance du lac Menzaleh. Les instructions qui lui furent remises, et le secours d'aides intelligens qu'on lui donna, le mirent dans le cas de donner à ses opérations plus d'étendue et de précision que ne peuvent en avoir ordinairement les reconnaissances militaires. Il pénétra dans le lac Menzaleh le 12 vendémiaire.

Des sept branches qui, au rapport des anciens, conduisaient les eaux du Nil à la mer, il n'en restait plus que deux, la branche Tanitique, débouchant à Omfâreg, et la branche Mendésienne, débouchant à Dibeh. On ne voyait de la branche Pélusiaque que son extrémité réduite presqu'entièrement à un grand canal de fange.

Les îles de Matarieh, les seules du lac qui fussent habitées, contenaient une population de 1100 hommes occupés à la pêche et à la chasse des oiseaux, cupides et si ignorans, qu'ils ne connaissaient point la division du temps en heures, et ne savaient pas, comme les Arabes du désert, l'apprécier par la mesure de leur ombre. La ville de Menzaleh renfermait 2,000 habitans. On y trouvait des manufactures de soie, de toiles à voiles,

'Lettres des 2, 3 et 5 vendémiaire an vII.

des teintureries et quelques autres fabriques de peu d'importance.

par

Il y avait, dans le lac Menzaleh, des îles anciennement habitées, couvertes de décombres, Les presqu'iles de Damiette et de Menzaleh étaient couvertes de belles rizières et de terres à blé, et alimentées par des canaux d'irrigation ayant dans leur voisinage des canaux d'écoulement. Le bassin du lac Menzaleh était un terrain d'alluvion, formé les branches du Nil et non par le mouvement des eaux de la mer, et susceptible de desséchement. Cette contrée présentait, comme toutes les autres parties de l'Égypte, l'aspect d'une grande dépopulation et les ruines de villes autrefois considérables, telles que Tennys, Tounêh, Faramah et Peluse, encore couvertes de fragmens et de débris de monumens. A Tounêh, un heureux hasard offrit à Andréossy, à la surface du terrain, un camée antique sur agate, de 36 sur 29 millimètres, représentant une tête d'homme; le profil avait beaucoup de caractère. Un oeil perçant, un air froid, une lèvre dédaigneuse, et d'autres indices faisaient penser qu'on avait voulu faire la tête de cet Auguste qui sut résister aux charmes de Cléopâtre et surmonter tous les obstacles qui le séparaient du pouvoir'.

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Dans la carte du lac Menzaleh et de ses environs, on rectifia des omissions ou des erreurs qui se trouvaient dans celle de Danville. Andréossy rendit compte de son travail à l'Institut. «En m'aidant,

Ce camée fut donné par Bonaparte à son épouse.

dit-il, sur quelques faits géologiques, de l'autorité des premiers écrivains, je ne les adopterai point exclusivement; mais je consulterai la nature qui était plus ancienne que ces auteurs et qui est eu même temps notre contemporaine. »

Les Arabes de Darne occupaient le village de Doundeh; environnés de tous côtés par l'inondation, ils se croyaient inexpugnables, et infestaient le Nil par leurs pirateries et leurs brigandages. Les généraux Murat et Lanusse reçurent l'ordre d'y marcher, et y arrivèrent le 7 vendémiaire. Après une légère fusillade, les Arabes furent dispersés. Les troupes les suivirent pendant cinq lieues, ayant de l'eau jusqu'à la ceinture, et s'emparèrent de leurs troupeaux, de leurs chameaux et de leurs effets. Il y en eut plus de 200 de tués ou de noyés.

En rendant compte de cette affaire au Directoire, Bonaparte lui fit ce portrait des Arabes: «Ils sont à l'Égypte ce que les Barbets sont au comté de Nice; avec cette grande différence qu'au lieu de vivre dans les montagnes, ils sont à cheval et vivent au milieu des déserts. Ils pillent également Turcs, Égyptiens, Européens. Leur férocité est égale à la vie misérable qu'ils mènent. Exposés des jours entiers dans des sables brûlans, à l'aspect du soleil, sans eau pour s'abreuver, ils sont sans pitié et sans foi. C'est le spectacle de l'homme sauvage le plus hideux qu'il soit possible de se figurer 1. » Ce portrait n'était pas flatté. On voit qu'il était

Lettre du 26 vendémiaire.

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