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de ses fatigues, établir une administration provisoire du pays, organiser les divers services, et se mettre, par une position retranchée à l'abri de toute surprise.

Le 15 thermidor, le général Leclerc fut envoyé à El-Kanqah pour y prendre position et observer Ibrahim-Bey, avec un corps de cavalerie et d'infanterie et deux pièces d'artillerie légère, tirés de la division Reynier qui était à la Koubeh. Leclerc arriva le 16 à El-Kangah, situé à moitié chemin du Kaire à Belbeïs, sans rencontrer l'ennemi, et y fit bâtir des fours. L'intention du général en chef était de faire constamment occuper ce village. Il ordonna qu'on y établît une boulangerie et qu'on y réunît le plus de légumes, blé et riz que possible, qu'on s'y retranchât en crénelant quelques maisons et en creusant des fossés. L'exécution de ces mesures fut confiée à Reynier. Il reçut donc l'ordre de se porter sur ce point avec le reste de sa division. Un autre motif décidait Bonaparte à le faire occuper en force. Plusieurs cheicks étaient réunis à Belbeïs avec Ibrahim-Bey et la caravane y était à chaque instant attendue.

« A El-Kanqah, écrivit le général en chef à Reynier, vous vous trouverez au milieu de plusieurs tribus d'Arabes. Faites ce qu'il vous sera possible pour leur faire entendre qu'ils n'ont rien gagner à nous faire la guerre; pour qu'ils nous envoient des députations, et pour qu'ils vivent tranquilles sans nous attaquer, vous leur enverrez de mes proclamations.

à

Vous vous tiendrez en garde contre les attaques
TOME I Guerre d'Égypte.

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que pourrait vous faire Ibrahim-Bey. Vous vous retrancherez dans le village de manière à être à l'abri de toute insulte, et, une heure avant le jour, vous ferez faire des reconnaissances, afin d'être prévenu, et de pouvoir me prévenir aussi, avant que la cavalerie ne soit sur vous. Vous interrogerez en détail tous les hommes qui viendraient de Belbeïs ou de Syrie, et vous m'enverrez leurs rapports. Si la caravane se présentait pour venir, vous l'accueillerez de votre mieux; mais vous ne dissimulerez pas au bey qui l'escorte, s'il y était encore, que mon intention est, comme je lui ai fait écrire, qu'arrivés à la Koubeh, les Mamlouks livrent leurs armes et leurs chevaux, excepté lui et les siens.

Je n'attends pour me mettre en marche et me porter à Belbeïs que la construction des fours et l'établissement de la boulangerie 1. »

Tandis que le général en chef faisait ces dispositions, Leclerc était attaqué, le 18 au point du jour, par un corps de 4,000 hommes Mamluks, Arabes et fellâh; il les contint par son artillerie et les força enfin, à quatre heures du soir, à se retirer. Mais ayant consommé toutes ses munitions, sa position n'était plus tenable, lui-même fit donc aussi sa retraite.

Murat, qui était à Qelioub, entendant la canonnade, marcha avec un bataillon qu'il commandait et en prévint le général en chef, qui donna l'ordre à Dugua de se rendre avec un bataillon de la 75°.

Lettre du 18 thermidor.

à Qelioub, pour être à la disposition de Murat'; mais, dès que Reynier parut avec sa division, il repoussa cette nuée d'Arabes et de fellâh avec lesquels Leclerc était toujours aux prises, leur tua quelques hommes et reprit position à El-Kanqah. Alors Bonaparte se disposa à quitter le Kaire pour marcher lui-même contre Ibrahim-Bey, l'éloigner du théâtre des principales opérations, et délivrer l'Égypte de l'influence des Mamlouks. Il fit partir la division commandée par le général Lannes et celle de Dugua.

En prescrivant à l'ordonnateur en chef d'envoyer chaque jour à l'armée la quantité de vivres qui lui était nécessaire, il lui donnait des instruc-. tions sur les subsistances du Kaire. La police de cette ville lui semblait exiger que le blé y fût maintenu à un bon prix, et pour cela qu'on en fit vendre tous les jours une certaine quantité au tarif, ce qui procurerait en outre de l'argent. Il recommandait d'avoir en magasin le plus de farine qu'on pourrait, et de fabriquer dans 10 jours 300,000 rations de biscuit pour assurer les subsistances de l'armée dans ses routes, et qu'elle ne mourût pas de faim dans ses opérations.

Le général délégua pendant son absence des pouvoirs extraordinaires au général Desaix dont la division, dans la position où elle se trouvait, avait le double but de garantir la province de Gizeh, et de former une réserve pour le Kaire. Il avait donc la liberté de faire faire à sa division et

'Lettre du 18 thermidor.

à la garnison de cette ville tous les mouvemens qu'exigeraient les circonstances. Le commandant de la place était tenu de l'instruire de tous les événemens qui pourraient exiger des mesures extraordinaires, et le chef de bataillon Beauvoisin, commissaire près le divan du Kaire, de lui rendre compte tous les jours des séances. 50 ou 60 hommes avec un officier devaient chaque jour être expédiés au général en chef pour lui porter les dépêches, et s'il arrivait un courrier de France, il recommandait de ne l'envoyer que fortement escorté '.

Bonaparte partit pour l'armée. Ibrahim-Bey ne l'attendit point et se retira vers Salhieh, emmenant avec lui une grande partie de la caravane de la Mekke qu'il avait rencontrée ou qui l'avait rejoint. Un parti d'Arabes traînait le reste dans le désert. Sous prétexte de la préserver du pillage des Français, ces escortes, arabes et mamlouks, l'avaient pillée. Avant d'arriver à Belbeïs, l'armée aperçut les Arabes, les mit en déroute, délivra environ 600 chameaux chargés d'hommes, de femmes et d'enfans. A Koraïm, où l'armée coucha le 23, elle trouva une autre partie de la caravane toute composée de marchands qui avaient été d'abord arrêtés par Ibrahim-Bey, ensuite relâchés et pillés par les Arabes. Le pillage devait avoir été considérable. Un seul négociant assura qu'il perdait 200,000 écus en schals et autres marchandises des Indes. Il avait avec lui ses femmes. Bo

'Lettre du 20 thermidor.

naparte leur donna à souper. « Plusieurs d'entre elles paraissaient avoir une assez bonne tournure, mais leur visage était couvert selon l'usage du pays, usage auquel l'armée s'accoutumait le plus difficilement. » Bonaparte fit conduire au Kaire tous ces débris de la caravane.

Le 24, à 4 heures après midi, l'avant-garde, composée d'environ 300 hommes de cavalerie, arriva en vue de Salhieh, le dernier lieu habité d'Égypte. Au moment où elle y entrait, IbrahimBey venait d'en sortir; on le voyait défiler avec ses trésors, ses femmes et une grande quantité de bagages. Environ 1,000 Mamlouks formaient son arrière-garde. Un parti de 150 Arabes, qui avait été avec eux, proposa aux Français de charger ensemble pour partager le butin. La nuit approchait, les chevaux étaient exténués de fatigue; l'infanterie était encore éloignée d'une lieue et demie. Bonaparte lui envoya l'ordre d'accélérer sa marche. En attendant, il poursuivait Ibrahim. Des détachemens de cavalerie, emportés par leur fougue, et sans doute aussi par l'espoir de s'emparer des trésors du bey, chargèrent avec impétuosité les Mamlouks, et s'ouvrirent un passage à travers leurs rangs. Ils y furent enveloppés ; la charge devint générale, les guides suivirent les hussards; les aides-de-camp, les généraux, se jetèrent dans la mêlée. Bonaparte resta presque seul. Des deux côtés, on se battit en désespérés. Chaque officier, chaque soldat soutenait un combat

1 Lettre de Bonaparte au Directoire, du 2 fructidor (19 août).

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