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la solitude n'est que rarement troublée par des gazelles, des lièvres, des sauterelles et des

rats. >>

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Dans le sein de ces plages arides, nommées à juste titre océan de sable, il existe plusieurs oasis où la végétation se montre avec d'autant plus de charmes que ce qui les entoure est plus stérile. Ce sont, au milieu du désert, des espaces habités, arrosés par des sources et ombragés par des bosquets. Sans le chameau, animal patient, sobre, et capable, par sa constitution, de rester longtems sans boire ni manger, l'homme ne pourrait parcourir des régions où il faut porter avec soi de quoi apaiser sa faim et sa soif; même avec le secours de cet animal, il succomberait dans l'immense étendue de ces déserts, si les premiers voyageurs qui ont osé s'y aventurer n'avaient découvert, de loin en loin, dans la terre ou à sa surface, des sources ou plutôt des mares d'une eau saumâtre, et n'y eussent creusé des puits où on renouvelle les provisions d'eau. Ces mares et ces puits tracent depuis un temps in mémorial au milieu du désert, des routes dont on ne saurait s'écarter sans s'exposer à une mort certaine. Cependant, combien il est aisé de s'égarer dans des lieux où l'uniformité des objets qui entourent le voyageur ne lui présente aucun point de reconnaissance; où des sables mouvans, soulevés par la tempête, viennent effacer les pas de ceux qui

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Voyages en Syrie et en Égypte, t. 1, p. 373.

l'ont précédé, et l'engloutissent lui-même dans leurs tourbillons! Enfin, pour comble de désastres, dans cette affreuse solitude, où les ossemens des hommes et des animaux qui ont péri dans une route si périlleuse, avertissent le voyageur du sort qui le menace, le kamsim dessèche en peu de minutes la végétation et suffoque les êtres animés, à moins qu'ils n'appuient leur bouche contre le sol pour échapper au souffle empoisonné de ce vent brûlant..

C'est dans les déserts arides de l'Égypte, de l'Arabie, de la Syrie et de la Mésopotamie, habités autrefois par les Hébreux, que des tribus nomades se sont élevées les premières à l'idée sublime d'un seul Dieu; c'est là qu'à pris naissance cette religion qui, nommée judaïque, chrétienne ou mahométane, selon les modifications qu'elle a reçue, s'est répandue sur la plus grande partie du globe. Aujourd'hui, ces diverses contrées sont sous la domination de l'islamisme; cette croyance est la dernière qui s'y soit propagée. Non-seulement elle a entièrement effacé les autres religions qui l'y avaient précédée, mais elle s'est, bien plus que celles-ci, étendue dans l'Afrique et dans l'Asie, parce que le génie de son fondateur l'avait appropriée aux habitans de ces climats. Un grand nombre de nations auparavant chrétiennes ou plongées dans l'idolâtrie, les peuplades errantes qui, de temps immémorial, vivaient dans le paganisme ou le pur déisme, l'ont adoptée.

Avant l'arrivée des Français en Égypte, il ne

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restait plus dans ce pays qu'un petit nombre de chrétiens, divisés en plusieurs sectes, avilis et opprimés par les Égyptiens qui les méprisaient.

Il se trouvait parmi les musulmans trois races d'hommes, qui n'avaient entre elles ni les mêmes mœurs ni la même langue. Les Arabes, ou naturels du pays; les Ottomans, ou Osmanlis; et les Mamelucks, originaires, de Circassie.

Les Arabes formaient la masse de la population; leur langue était la langue vulgaire. Ils reconnaissaient pour chefs les grands-cheyks descendans de ceux des Arabes qui avaient conquis l'Égypte au commencement de l'hégire. C'étaient à la fois l'élite de la nation et les docteurs de la loi. Ils étaient propriétaires de villages et d'un grand nombre d'esclaves.

Les Arabes se divisaient en deux grandes classes bien distinctes; les cultivateurs et les Bédouins ou Arabes errans. Ceux-ci purement guerriers et pasteurs, habitaient le désert, escortaient les caravanes et s'occupaient spécialement de l'éducation des bestiaux, tels que chameaux, bêtes à laine et chevaux, qu'ils faisaient paître dans les oasis ou sur la lisière des terres cultivées.

La classe qui s'adonnait à l'agriculture se composait des Arabes cultivateurs proprement dits et des Felláh. Les écrivains qui on traité cette partie les ont presque toujours confondus. Cependant les cultivateurs différaient des felláh par leur physionomie, leurs manières et leur caractère. Le sang arabe s'était tellement perpétué sans mélange dans leurs familles qu'on ne pouvait les

race,

distinguer des Bédouins. Outre les traits de leur ils en avaient conservé l'esprit de dispute, de chicane et de rapacité. Ils n'avaient point ces vertus si vantées des Arabes, la franchise, la foi religieuse pour leur parole, le penchant à l'hospitalité. Ils étaient faux, et par-dessus tout voleurs, extrêmement adroits et audacieux. Ils arrêtaient les fellâh, pillaient les barques et dépouillaient les marchands et les voyageurs.

Ils avaient perfectionné l'agriculture et l'industrie agricole beaucoup plus que les fallâh; leurs terres étaient mieux entretenues, mieux arrosées, et leurs villages plus peuplés. C'est à eux qu'appartenaient presque exclusivement la culture et la fabrication du sucre dans la Moyenne-Égypte. Ils avaient des chevaux et des chameaux en grand nombre. Au premier signal de guerre, on voyait ces cultivateurs monter à cheval, s'armer de lances comme les Bédouins, et camper dans la plaine à côté de leurs maisons. Ils étaient presque toujours armés, et faisaient la loi dans les marchés et dans les villages. C'était surtout dans la HauteÉgypte, dans les provinces éloignées de la capitale, qu'existaient ces désordres; dans la BasseÉgypte, ils étaient moins puissans.

Les fellâh étaient les ilotes de l'Égypte. On ignore leur origine. Il est à croire qu'ils sortaient du mélange des diverses races qui avaient successivement dominé sur l'Égypte. Dans ce pays comme en France, comme dans toute l'Europe, pour ceux qui vivaient du bien d'autrui, sans peine ni travail, il n'était rien de plus vil que la

charrue. Aussi les Bédouins regardaient-ils ces paysans comme des être nés pour travailler à leur nourriture. Ils leur avaient donné le nom de felláh, c'est-à-dire homme de boue, et ne s'alliaient jamais avec eux.

Mais c'était surtout chez les Bédouins que se retrouvait le type primitif de la vieille nation arabe. Ils avaient conservé dans toute leur pureté la langue, les moeurs et le caractère des âges d'Abraham et de Jacob, dont les écrivains sacrés nous ont transmis l'histoire. Ils étaient divisés en tribus commandées par des cheyks qui combattaient à leur tête en temps de guerre. Ils campaient sous des tentes, dans l'intérieur du désert, ou sur les limites des terres cultivées. Leurs camps ressemblaient à de grands villages; l'abondance y régnait presque toujours. Ces Arabes étaient sobres, endurcis à la fatigue, excellens cavaliers. Ils n'avaient point de prêtres, se dispensaient des pratiques de la religion, buvaient du vin quand il en avaient, et s'ils faisaient le pélerinage de la Mekke, c'était plutôt pour les bénéfices qu'ils en retiraient que dans un but religieux. Leur passion dominante était l'avidité de l'argent; l'aspect d'une pièce d'or les faisait sourire. Il n'y avait chez eux d'autres lois que des lois domestiques, inséparables de leurs moeurs patriarcales. Il régnait dans leur camp une grande liberté, et par une espèce de convention tacite, rarement elle dégénérait en licence. Chacun d'eux avait presque toujours en propriété deux chevaux, deux chameaux, quelques moutons, un fusil, une tente;

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