argent à estre braves et avoir grand équipage, et dans peu de temps ils meurent de faim et sont contraincts de quitter vos armes, là où, quand les empescheriez par vos édicts de toutes ces vanitez et folles despences, ils auront tousjours de l'argent et seront des années toutes entières dans les armées de Vostre Majesté, et ne serez point que n'ayez force soldats et cinq cens volontaires auprès de vous, où je vous ay veu plus de vingt fois que n'en aviez pas trente. Pour ce qui est des marchands, habitans et gens du tiers-estat, il faut qu'ils ne se meslent que de leur traffic, et non de la plume ni de l'espée, si ce n'est pour garder leur ville, ny qu'eux ny leurs femmes ne portent ny soyes, ny pierreries, ny dentelles, non plus que ceux de la justice, et les paysans de bonne toile toute simple. Ainsi faisant, dans peu de temps ils seront tous riches et vous pourront servir toute leur vie, chacun en sa vaccation, sans s'incommoder nullement. Et un poinct qui est aussi notable que pas un, c'est que * les juges n'entrent nullement dans les maisons de ville, ny ne soient capitaines des villes, ny ne se meslent que de leur mestier; car autrement dans peu de temps ils vous feront voir qu'ils possèdent la France à leurs volontez. Et afin que les ecclésiastiques, gentilshommes et thrésoriers n'ayent aucuns sujets de voler et prendre vos deniers, ostez la vénalité des offices et des charges; car ils disent tout haut qu'ils ne peuvent achepter des charges ni offices si chères, s'entretenir, eux, leurs femmes et leurs enfans, si somptueusement, sans prendre de vos deniers et de vostre pauvre peuple. Croyez, Sire,. que, si vous faites la présente révocation, vous ne perdrez jamais ce nom de Louys-le-Juste et serez le plus puissant qui se puisse voir; car Dieu sera bien servy, la justice sera bonne, vostre infanterie sera pleine de gentilshommes, vos marchands feront grand traffic, et vos paysans seront riches pour nourrir vos armées quand elles passeront, et un chacun de toutes les vaccations susdites en priera Dieu de meilleur cœur pour vostre prospérité en ce monde. Mais surtout il faut que Vostre Majesté et vos princes et princesses soyez les premiers à monstrer l'exemple de ceste réformation, et non pas de la rompre, comme fistes de l'édict de porter du clinquant, l'année passée. |