Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

Il y a quelque temps, Sire, que l'or Paris et dans vostre cour un certain le Mot à l'aureille (2), comme s'il eus mystérieux secrets de vostre Estat, c chacun désireux d'en entendre la lectu

(1) La pièce suivante, écrite après la mort principalement pour but d'attaquer son succe la Vieuville. Ce dernier ne conserva pas l royale, et fut remplacé quelques mois aprè Richelieu. Nous ne croyons pas que la pièce par aucun historien; cependant elle intére par les faits curieux qu'elle contient, mais mens qu'elle porte, les détails qu'elle donne sonnages qui faisaient alors partie du conseil (2) On croit que le cardinal de Richelie pamphlet.

.

servy

d'entretien à toutes les bonnes compagnies, parmy lesquelles chacun s'est meslé d'en dire son opinion; en quoy les jugemens se sont rencontrez assez divers, les uns soustenans que cest escrit n'estoit remply que d'impostures; autres, au rebours, qu'il ne falloit mettre la main à la plume pour en raconter si peu; autres, que cet escrivain ne s'estoit amusé qu'à dépeindre les deffauts extérieurs du surintendant, sans cotter les fautes qu'il commet contre l'Estat. Autres s'estomacquoient contre cet escrit sans en pouvoir dire les raisons; autres asseuroient qu'il y avoit assez de vérité pour servir d'advertissement au procez de la Vieuville (1). Mais tous se sont rencontrez et demeurez d'accord que ce n'avoit esté que la passion qui avoit animé cet autheur, lequel d'abord se faict assez cognoistre pour un chétif pensionnaire que le despit de se voir biffé de dessus l'estat a mis aux champs pour déclamer contre le marquis, tout prest à chanter la palinodie, et de le louer hautement comme le plus parfait des hommes, au cas qu'on le vueille restablir et lui faire toucher finance, ainsi qu'il se peut facilement recueillir par la lecture de son discours.

C'est bien la vérité, Sire, que la calomnie et la flatterie sont ordinairement ces deux puissans fléaux qui persécutent et ruinent tous ceux qui sont eslevez aux grandes charges, et qui, par divers moyens, sapent insensiblement leur fortune; la mesdisance envieuse s'efforce de noircir toutes leurs actions, et la complaisance flatteuse

(1) La disgrâce du marquis de la Vieuville suivit de près la publication de la Voix publique. Au commencement d'août 1624, il fut arrêté et conduit au château d'Amboise, où il resta longtemps captif. Ce fut l'époque de l'avènement de Richelieu à la direction suprême des affaires.

avec laquelle on les chatouille en leurs erreurs est celle qui faict périr tous les jours la pluspart des grands dans l'entretien de leurs deffauts.

Qui se peut garantir de ces périlleux escueils se peut dire heureux et sage tout ensemble. Le premier s'évite par une suitte de généreuses actions, lesquelles, avec le temps, ramènent les passions à la raison et font bouquer l'envie, la vraye vertu n'estant subjette à s'estonner par le bruit d'un vaudeville. Et pour le second, l'homme ne s'y laisse surprendre quand il a plus d'appréhension de faillir que de présomption d'avoir bien faict.

Or, ce que j'ay maintenant à représenter à Vostre Majesté n'est pas un discours de médisance ny de raillerie complaisante; c'est une vérité, la plus importante, Sire, qui puisse estre aujourd'huy annoncée à un grand Roy, dans l'urgente nécessité du restablissement de ses affaires. Ce n'est pas aussi la pensée d'un simple particulier, mais celle de tous les gens de bien et de tous les judicieux personnages de vostre Estat; en un mot, c'est la voix publique.

[ocr errors]

Chacun sçait, et l'expérience a peu faire cognoistre à Vostre Majesté que tout le bonheur d'une monarchie despend de la composition du conseil du prince; s'il a près de sa personne ou dans l'administration de ses affaires des gens bien censez, d'expérience solide et de probité recogneue, asseurément son règne est heureux; le corps de son royaume s'affermit dans l'ordre, et la prospérité remplit ses subjets de biens, à la gloire du prince et bénédiction du peuple. Si, au rebours, ceux qui sont recognus avoir basty leur fortune aux despens de leur prince et des ruynes publiques subsistent dans le crédit, sans crainte d'estre recherchez ny punis de leurs meffaits, si les meschans s'y auctorisent et les

ignorans y tiennent les resnes du gouvernement, infailliblement le monarque et la monarchie se consomment dans leurs propres confusions; le peuple languit sous l'oppression, et la calamité générale donne courage aux voisins d'en projetter l'usurpation et d'en avancer la ruine.

La mémoire des choses passées, Sire, peut faire ressouvenir Vostre Majesté si ceste thèse est véritable ou non; et pour luy faire cognoistre clairement que tous les malheurs qui ont affligé vostre couronne ont pris leur source de ce deffaut, je ne craindray de représenter succinctement aux yeux de Vostre Majesté les choses qu'elle a veu elle-mesme durant ces années dernières. Que si quelques bons Pères luy ont quelquesfois persuadé que les péchez ou désobéissances de ses subjets avoient attiré l'ire de Dieu sur nos testes et procuré les calamitez qui ont opprimé la France tant du temps de la Ligue que depuis le coup parricide qui a porté le Roy vostre père au tombeau, on leur peut aussi alléguer, Sire, que l'infidélité et ignorance de ceux ausquels Vostre Majesté avoit confié le maniement de ses affaires y ont contribué beaucoup plus que les péchez de vos subjets, que la malice estrangère a sceu abuser de faux prétextes, à quoy mesme nostre foiblesse a consenty pour complaire à des dominations étrangères qui ont sceu d'autre costé astucieusement gaigner les esprits de ceux ausquels Vostre Majesté s'est confiée le plus.

[ocr errors]

Si tous ceux qui ont possédé l'honneur de vos bonnes graces et entrepris l'administration de vos affaires eussent eu les intentions droictes, et autant pensé à vous servir qu'à establir leur fortune, asseurément, Sire, Vostre Majesté n'auroit ressenty les desplaisirs qu'elle a receus, son Estat n'auroit esté désolé comme il est, ny

le pauvre peuple souffert les misères qu'il endure encore aujourd'huy.

Permettez, Sire, que je prenne un peu les choses de plus loing; disons que Villeroy et le chancelier Sillery, avec leur fausse réputation de probité imaginaire, ont empoisonné la pluspart des esprits de vostre conseil, et, par leur première conivence avec le marquis d'Ancre, ont jetté les premiers fondemens de tous nos malheurs, chacun d'eux n'ayant pensé qu'à régner ou à complaire à autruy pour régner, sans se soucier que deviendroit Vostre Majesté, ny la Royne vostre mère, ny l'Estat, pourveu qu'ils subsistassent en crédit à quelque prix que ce fust. C'estoit le but de leur ambition; et comme chacun d'eux vouloit commander absolument, cela fut cause que ces trois ne peurent durer longuement en bonne intelligence.

A ces trois succédèrent trois autres, avec leurs supposts, lesquels, au lieu de prendre exemple sur le courant de la fortune de celuy qu'ils avoient fait tuer, feirent au contraire cent fois pis que ceux en la place desquels ils s'establirent.

A la vérité, le mareschal d'Ancre dissipa les finances de la Bastille avec le consentement de Villeroy et du chancelier, à quoy Mangot, Barbin et l'évesque de Luçon ne résistèrent pas comme ils devoient; puis sur la fin il persécuta les grands du royaume; mais Luynes, non content d'avoir ravy les grandes richesses de cet estranger, il a volé à la face du conseil le plus beau du domaine de Vostre Majesté et tous les plus clairs deniers de vostre espargne, et, sans considérer le bien de vostre service, il s'est tout-à-faict jetté dans la faction d'Espagne pour s'appuyer contre la Royne vostre mère, s'estant si estroittement ligué avec l'Espagnol qu'en sa

« ZurückWeiter »