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CHAPITRE III,

Précautions prises dans le palais Quirinal, et motifs qui engagèrent le Pape à rester à Rome.

Tous les hommes sages prévoyaient que l'Empereur Napoléon exécuterait la menace qu'il avait faite, d'enlever au St. Siége la puissance temporelle, et de changer le gouvernement de Rome. Ils savaient qu'après cet événement, le Pape et le sacré Collège seraient • transportés hors de la capitale; parce qu'il serait impossible au nouvel ordre de choses de marcher en paix et sans inconvénient, tandis que le Souverain légitime resterait à Rome. Car, si, dans les autres royaumes, on en a toujours agi ainsi, lorsque le Souverain avait abdiqué ou avait été déposé, cette mesure devenait encore plus indispensable vis-àvis du Pape; parce que le Souverain Pontife, même dépouillé de la puissance temporelle, demeurait encore un personnage d'une trèshaute dignité, et conservait encore, par sa juridiction spirituelle, une fort grande influence.

En effet, peu de jours après que les Français

se furent emparés de la ville de Rome, ils chassèrent les Cardinaux napolitains, sous prétexte qu'ils avaient refusé de prêter le serment d'obéissance et de fidélité à Joseph Bonaparte, que son frère avait nommé Roi des Deux-Siciles. Quelques semaines après, tous les Cardinaux, originaires des divers pays dont se composait le royaume d'Italie, eurent le même sort.

On commença dès ce moment à craindre plus que jamais que le St. Père ne fût enlevé avec violence de son siége et transporté hors de Rome; parce qu'on attendait de jour en jour le changement de Gouvernement.

Dès les premiers jours de mon ministère, un Cardinal m'avait dit qu'il avait reçu, d'un des Officiers de la légation française, une lettre, dans laquelle on disait qu'on avait écrit de Paris que le moment était arrivé, d'éloigner l'ortolan de la vigne; paroles qui désignaient le Pape et Rome.

Monseigneur Cristaldi me raconta, dans le mois d'août, qu'une lettre du cardinal de la Somaglia annonçait comme très-prochain le changement de Gouvernement.

Au commencement de septembre, on apperçut les avant-coureurs de quelque violente entreprise de la part des Français contre la

personne sacrée du Pape et son gouvernement. Sur le soir, on vit, dans le quartier qu'ils habitaient, la garde se renforcer sur la place du Mont Cavallo; des sentinelles furent posées à l'ouverture des rues, qui, de là, conduisent au centre de la ville, et jusqu'à la colonnade du palais apostolique. Ils portèrent même l'audace jusqu'à vouloir visiter les caisses, les paniers et les paquets qui sortaient du palais Quirinal, et un grand nombre de chevaux de poste étaient prêts à partir.

La nuit du cinq au six septembre, un peu avant minuit, je fis sortir secrètement du palais, J. Tibère Pacca, mon neveu, et l'envoyai dans la maison Piccolomini, où il trouva Monseigneur Arezzo, gouverneur de Rome. Le Prélat me fit dire que les avis et les rapports qu'il recevait de toutes parts, lui faisaient craindre pour cette nuit-là même une attaque de la part des Français sur le palais apostolique; que leurs partisans s'en étaient vantés en présence de plusieurs personnes; que toute l'armée française était réunie dans ses quartiers; qu'à la poste, on tenait vingt-cinq chevaux prêts, quoiqu'on n'attendît aucune personne de marque ni de Naples, ni d'aucune ville de la haute Italie. Mon neveu m'ayani fait connaître toutes ces circonstances, j'or

donnai au sieur Amryn, chef des Gardes du palais Quirinal, d'observer si toutes les grandes portes en étaient exactement fermées. Je lui prescrivis de veiller pendant toute la nuit, par lui-même et par d'autres personnes fidèles, à la garde du palais. Je fis ouvrir toutes les portes de món appartement, et celles des appartemens du Pape, qui correspondaient avec les miens, afin de pouvoir, en cas de besoin, courir plus promptement chez lui et l'avertir. Je né voulus pas lui donner ce soir-là aucune connaissance de mes craintes, pour ne pas l'inquiéter mal à propos; parce qu'il n'était pas certain que les Français dûssent rien entré prendre cette nuit. Le lendemain, je reçus dès le matin la nouvelle de mon arrestation, et l'ordre de sortir de Rome dans les vingtquatre heures, pour me rendre à Bénévent, ma patrie, comme je l'ai dit ci-dessus. Le même jour, on se saisit des cardinaux Antonnelli, doyen du sacré Collége, et Arezzo, gouverneur de la ville, et ils reçurent comme moi l'ordre de sortir de Rome. (1) Depuis ce moment, le St. Père fit tenir toujours fermée la porte principale du palais, qui donne sur la place, et il fit ouvrir seulement la petite porte, pour

(1) Pièces justificatives. No. 3.

la commodité des gens du palais, des personnes qui venaient à son audience et de ses Ministres, afin de ne pas entraver la marche des affaires. Sa Sainteté donna également l'ordre exprès de ne laisser entrer aucun Français, quel que fût son grade. L'arrestation et l'exil de Messeigneurs les cardinaux Antonnelli et Arezzo, et la mienne à moimême, étaient sans doute une disposition préalable au coup de main que l'on devait tenter sur le palais du Souverain Pontife. On voulait profiter du trouble, qui devait naturellement naître dans l'intervalle, qui séparerait le départ des Ministres de l'installation de leurs suc

cesseurs.

Mais on peut conjecturer que la résolution prise par le St. Père, de venir lui-même en personne me délivrer de la main des Français, le discours plein de noblesse, de force et de dignité qu'il avait adressé à l'Officier français qui me gardait à vue, le mécontentement du peuple, qui éclatait alors, et faisait connaître quels étaient ses sentimens pour le gouvernement du Pape et pour les troupes étrangères cantonnées à Rome, firent suspendre et différer pour quelque temps l'invasion du palais et l'enlèvement du Pape. Je cherchai alors à connaître quel pouvait être le plan que les

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