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naissance à une alliance puissante et respectable.

La révolution française marcha dans ses débuts sous les auspices de Louis XVI. Les grandes fautes des trois ordres, celles de la cour, les mauvais conseils des étrangers, les conseils si perfides de l'Angleterre, qui savait mieux que personne ce que la France gagnerait à une véritable liberté, gâtèrent ces beaux commencements. Les journées des 5 et 6 octobre ne furent point entièrement de fabrique française. Le Roi fut assiégé dans son palais, outragé par la canaille de Paris avec laquelle il fut réduit à capituler, pour sauver ses jours et ceux de la famille royale. Ramené à Paris, la nuit, au milieu d'un tumulte de cannibales, il fut dès ce moment le prisonnier de la révolution; on lui fit subir l'agonie de Jésus-Christ, en même temps qu'on le salua Roi des Français. Il accepta la Constitution qu'il aurait dû donner. Sa fuite à Varennes fut une véritable faute, quand bien même elle aurait réussi; le parti la qualifia de trahison; et, dès ce jour, la mort de cet infortuné monarque fut résolue par une minorité qui projetait dans l'ombre la chute du trône. Le rassemblement de Coblentz, le congrès de Pilnitz, la guerre si ridicule de la Prusse, la retraite plus ridicule encore de l'armée prussienne devant nos légions

non organisées, excitèrent au plus haut degré la rage révolutionnaire, et la France passa subitement du règne de la Législative à celui de la Convention, de la révolution à la terreur. L'Angleterre vit avec joie ces symptômes de destruction pour la France; mais elle' jugea mal son ennemie elle n'entrevit pas la profondeur de l'abîme où son esprit de vengeance allait entraîner l'Europe et elle-même; elle ne sauva point Louis XVI. La France eut, comme l'Angleterre, son grand crime.

Après cet attentat, le cabinet de Saint-James fut étonné de voir la République debout et terrible. Il compta avec effroi les quatorze armées de la Convention qui avait tué son Roi, et il salaria l'Europe pour tâcher de tuer la France. Les commissaires anglais avaient vu dresser l'échafaud. Leurs rapports avec Danton, Robespierre et les comités directeurs, sont avérés.

Pitt voyait avec douleur l'Angleterre augmenter sa dette par les immenses subsides qu'elle payait à l'Europe, pour balancer l'effet des victoires de la République. La Prusse lui échappait; la Russie était loin : elle observait l'Europe; elle ne donnerait que des vaisseaux. L'Autriche seule avait des armées nombreuses et disponibles; elle avait des injures personnelles à venger. Quant à l'Espagne, elle menaçait de sacrifier de bonne

heure ses liens de famille à ce qu'elle croyait être son intérêt. Aussi ce fut vers l'Autriche et le Corps germanique, qu'on appelait l'Empire, que Pitt dirigea les efforts de sa politique; seuls ils soutenaient encore sur le Continent la lutte contre la révolution. La République était assiégée sur le Rhin et sur les Alpes, dans le temps que Toulon tombait au pouvoir des coalisés. De tous côtés la France était bloquée, et l'Angleterre se flattait d'un triomphe prochain, quand Napoléon contribua à la reprise de Toulon.

Deux ans après, Pitt conçut la fatale expédition de Quiberon, qui coûta à la France plusieurs centaines d'officiers de marine, reste des compagnons de Suffren. La flotte anglaise fut spectatrice de la destruction de l'élite de l'émigration, jetée par elle sur les côtes de Bretagne. Douze cents émigrés furent fusillés par les ordres des commissaires de la Convention. Le général Hoche parvint à en sauver un grand nombre. Quand on osa dire dans le Parlement que ces malheureux avaient été sacrifiés par la politique du cabinet, le ministère répondit : Du moins, le sang anglais n'a pas coulé. - Non, sans doute, s'écria Shéridan; mais l'honneur anglais a coulé par tous les pores. Toutes les tentatives de l'Angleterre sur le territoire français n'ont pas eu un sort plus heureux pour ses armes; mais celle

ci ne fut réellement fatale qu'à la France. Pitt ne voulut dire autre chose, sinon qu'il n'en avait coûté que de l'argent à sa nation: comme ministre, il ne pouvait pas faire un plus grand aveu.

L'éloignement dans lequel l'Angleterre tint constamment les Princes français des armées de la Vendée, où ils étaient sans cesse annoncés et vainement attendus, prouve suffisamment le but de sa politique, qui était non le rétablissement du trône des Bourbons, mais la destruction des Français par les Français. Pitt fut en réalité le banquier de la guerre civile; il avait à ses gages tous les fléaux comme toutes les défaites. L'entreprise sur Dunkerque, en 1793, le couvrit de honte. En 1794, il rendit ridicule son Roi, en plaçant momentanément sur sa tête la couronné lui offrit l'insurrection corse. La scène chan

que

gea en 1796. Napoléon parut à la tête de l'armée d'Italie; ses victoires attirèrent tous les regards de l'Angleterre; elle en prévit les résultats, et elle prêta l'oreille aux propositions du Directoire. Les conférences furent ouvertes à Lille; elles étaient utiles à la conservation de son crédit, et facilitaient ses derniers emprunts. Napoléon, en signant les préliminaires de Léoben, le 14 avril 1797, avait imposé la paix autant au Directoire qu'à la maison d'Autriche, veuve de cinq belles armées. La paix pouvait devenir gé

fût

nérale, et le grand œuvre de la révolution être sanctionné à Lille; mais le Directoire ne se sentit pas assez fort, vis-à-vis de la nation, pour soutenir cette grande situation. Il avait besoin de détourner les regards de son administration intérieure; et, pour se créer une nouvelle ressource contre l'attention publique, il rompit brusquement, le 18 septembre, les conférences de Lille. La négociation, quelque difficile qu'elle par elle-même et à cause du Directoire, en raison de son esprit révolutionnaire et de son instabilité constitutionnelle, avait été habilement conduite par Pleville-le-Pelet, Letourneur de la Manche, et Maret qui avait la direction principale des négociations, bons citoyens qui cherchèrent en conscience à assurer le salut de la révolution française par un traité avec son plus dangereux ennemi. Un mois après cette rupture, le 18 octobre, Napoléon signa la paix de Campo-Formio. Sans l'esprit de vertige qui aveuglait le Directoire, la France avait à-la-fois la paix de l'Angleterre et celle de l'Autriche. On ne peut calculer ce que seraient devenues ses destinées à cette époque, où elle avait encore tant d'enthousiasme de patrie : la seule attitude de la nation aurait suffi pour subjuguer l'Europe, et changer son système de gouvernement, puisque telle était la religion d'État en France.

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