Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

sur les masses qui voulaient reprendre la position. Les généraux Dulauloy et Drouot, avec soixante pièces de batterie de réserve, se portèrent en avant. Enfin le duc de Trévise, avec les divisions Dumoutier et Barrois de la jeune garde, se dirigea sur l'auberge de Klein-Baschwitz, coupant le chemin de Wurtchen à Bautzen. L'ennemi fut obligé de dégarnir sa droite pour passer à cette nouvelle attaque. Le prince de la Moskowa en profita et marcha en avant. Il prit le village de Preisig, et s'avança, ayant débordé l'armée ennemie, sur Wurtchen. Il était trois heures après midi, et lorsque l'armée était dans la plus grande incertitude du succès et qu'un feu épouvantable se faisait entendre sur une ligne de trois lieues, l'empereur annonça que la bataille était gagnée.

L'ennemi, voyant sa droite tournée, se mit en retraite, et bientôt la retraite devint une fuite.

A sept heures du soir, le prince de la Moskowa et le général Lauriston arrivèrent à Wurtchen. Le duc de Raguse reçut alors l'ordre de faire un mouvement inverse de celui que venait de faire la garde, occupa tous les villages retranchés et toutes les redoutes que l'ennemi était obligé d'évacuer, s'avança dans la position d'Hochkirch, et prit ainsi en flanc toute la gauche de l'ennemi, qui se mit alors dans une épouvantable déroute. Le duc de Tarente, de son côté, poussa vivement cette gauche et lui fit beaucoup de mal.

L'Empereur coucha sur la route au milieu de la garde, à l'auberge de Klein-Baschwitz. Ainsi l'ennemi, forcé dans toutes les positions, laissa en notre pouvoir le champ de bataille couvert de ses morts et de ses blessés, et plusieurs milliers de prisonniers.

Le 22, à quatre heures du matin, l'armée française se mit en mouvement. L'ennemi avait fui toute la nuit par tous les chemins et dans toutes les directions. On ne trouva les premiers postes qu'au delà de Weissenberg, et il n'opposa de résistance qu'en arrière de Reichenbach. L'ennemi n'avait pas encore vu notre cavalerie.

Le général Lefebvre-Desnouettes à la tête de quinze cents chevaux de lanciers polonais et des lanciers rouges de la garde, chargea dans la plaine de Reichenbach la cavalerie ennemie et la culbuta. L'ennemi, croyant qu'ils étaient seuls, fit avancer une division de

cavalerie et plusieurs divisions s'engagèrent successivement. Le général Latour-Maubourg, avec les quatorze mille chevaux et les cuirassiers français et saxons, arriva à leur secours et plusieurs charges de cavalerie eurent lieu. L'ennemi, tout surpris de trouver devant lui quinze à seize mille hommes de cavalerie quand il nous en croyait dépourvus, se retira en désordre. Les lanciers rouges de la garde se composent en grande partie des volontaires de Paris et des environs. Le général Lefebvre-Desnouettes et le général Colbert, leur colonel, en font le plus grand éloge. Dans cette affaire de cavalerie le général Bruyère, général de cavalerie légère de la plus haute distinction, a eu la jambe emportée par un boulet.

Le général Reynier se porta avec le corps saxon sur les hauteurs au delà de Reichenbach et poursuivit l'ennemi jusqu'au village de Haltendorff. La nuit nous prit à une lieue de Goerlitz. Quoique la journée eût été extrêmement longue, puisque nous nous trouvions à huit lieues du champ de bataille, et que nos troupes eussent éprouvé tant de fatigues, l'armée française aurait couché à Goerlitz; mais l'ennemi avait placé sur la hauteur en avant de cette ville un corps d'arrière-garde, et il avait fallu une demie heure de jour de plus pour la tourner par la gauche. L'Empereur ordonna donc qu'on prît position.

Dans les batailles du 20 et du 21 le général wurtembergeois Franguemont et le général Lorencer ont été blessés. Notre perte dans ces deux journées peut s'évaluer à onze ou douze mille hommes. Le soir de la journée du 22, à sept heures, le grand maréchal duc de Frioul étant sur une petite éminence à causer avec le duc de Trévise et le général Kirgener, tous les trois pied à terre et assez éloignés du feu, un des derniers boulets de l'ennemi rasa de près le duc de Trévise, ouvrit le bas ventre au grand maréchal, et jeta roide mort le général Kirgener. Le duc de Frioul se sentit aussitôt frappé à mort; il expira deux heures après. Dès que les postes furent placés et que l'armée eut pris ses bivouacs l'Empereur alla voir le duc de Frioul. Il le trouva avec toute sa connaissance et montrant le plus grand sang-froid. Le duc serra la main de l'Empereur, qu'il porta sur ses lèvres. Toute ma vie, lui dit-il, a été consacrée à votre service, et je ne la regrette

qu'autant qu'elle pouvait encore vous être utile.

[ocr errors]

Duroc, lui

dit l'Empereur, il est une autre vie. C'est là que vous irez m'attendre et que nous nous retrouverons un jour! Oui, Sire, mais ce sera dans trente ans, quand vous aurez triomphé de vos ennemis et réalisé les espérances de notre patrie. . . J'ai vécu en honnéte homme ; je ne me reproche rien. Je laisse une fille: V. M. lui servira de père. L'Empereur, serrant la main droite du grand maréchal, resta un quart d'heure la tête appuyée sur sa main gauche dans le plus profond silence. Le grand maréchal rompit le premier le silence! - Ah! Sire, allez-vous-en! ce spectacle vous fait mal! L'Empereur, s'appuyant sur le duc de Dalmatie et sur le grand écuyer, quitta le duc de Frioul sans pouvoir lui dire autre chose que ces mots : Adieu donc, mon ami. S. M. se retira dans sa tente et ne reçut personne pendant toute la nuit.

Un parlementaire envoyé par l'ennemi portait plusieurs lettres où l'on croit qu'il est question de négocier un armistice.

Toute la Saxe est délivrée de ses ennemis; demain l'armée française sera en Silésie.

L'ennemi a brûlé beaucoup de bagage, fait sauter beaucoup de parcs, disséminé dans les villages une grande quantité de blessés. Ceux qu'il a pu emmener sur des charrettes n'étaient pas pansés; les habitants en portent le nombre à plus de dix-huit mille. Il en est resté plus de dix mille en notre pouvoir.

La ville de Dresde et le ministre saxon ont mis la plus grande activité à approvisionner l'armée, qui n'a jamais été dans une plus grande abondance.

Ce récit de la bataille de Wurtchen ne peut être considéré que comme une esquisse. L'état-major général recueillera les rapports qui feront connaître les officiers, soldats et les corps qui se sont distingués.

Dans le petit combat du 22, à Reichenbach, nous avons acquis la certitude que notre jeune cavalerie est, à nombre égal, supérieure à celle de l'ennemi.

Nous n'avons pu prendre de drapeaux : l'ennemi les retire toujours du champ de bataille. Nous n'avons pris que dix-neuf canons, l'ennemi ayant fait sauter les parcs et les caissons. D'ailleurs l'Empereur tient sa cavalerie en réserve, et, jusqu'à ce qu'elle soit assez nombreuse, il veut la ménager.

27 mai 1813.

Le 26 le quartier général du comte Lauriston était à Haynau. Un bataillon du général Maison a été chargé inopinément, à cinq heures du soir, par trois mille chevaux, et a été obligé de se replier sur un village. Il a perdu deux pièces de canon et trois caissons qui étaient sous sa garde. La division a pris les armes ; l'ennemi a voulu charger sur le 153 régiment; mais il a été chassé du champ de bataille, qu'il a laissé couvert de morts. Parmi les tués se trouvent un colonel et une douzaine d'officiers des gardes du corps de Prusse, dont on a apporté les décorations.

On ramasse bon nombre de prisonniers; les villages sont pleins de blessés ennemis.

Leignitz est une assez jolie ville de dix mille habitants. Les autorités l'avaient quittée par ordre exprès, ce qui mécontente fort les habitants et les paysans du cercle. Le comte Daru a été chargé en conséquence de former de nouvelles magistratures.

Tous les gens de la cour et toute la noblesse qui avaient évacué Berlin s'étaient retirés à Breslau; aujourd'hui ils évacuent Breslau, et une partie se retire en Bohême.

Les lettres interceptées ne parlent que de la consternation de l'ennemi et des pertes énormes qu'il a faites à la bataille de Wurtchen.

Le 29, à dix heures du matin, le comte Schouwaloff, aide de camp de l'empereur de Russie, et le général Kleist, général de division prussien, se sont présentés aux avant-postes. Le duc de Vicence a été parlementer avec eux. On croit que cette entrevue est relative à la négociation de l'armistice.

Les ouvrages qui défendaient le champ de bataille de Wurtchen sont très-considérables; aussi l'ennemi avait-il dans ces retranchements la plus grande confiance. On peut s'en faire une idée quand on saura que c'est le travail de dix mille ouvriers pendant trois mois; car c'est depuis le mois de février que les Russes travaillaient à cette position, qu'ils considéraient comme inexpugnable.

Il paraît que le général Wittgenstein a quitté le commandement de l'armée combinée : c'est le général Barclay de Tolly qui la commande.

L'armée est dans le plus beau pays possible; la Silésie est un jardin continu, où l'armée se trouve dans la plus grande abondance de tout.

50 mai 1813.

Un convoi d'artillerie d'une cinquantaine de voitures, parti d'Augsbourg, s'est éloigné de la route de l'armée et s'est dirigé d'Augsbourg sur Bayreuth : les partisans ennemis ont attaqué ce convoi entre Zwickau et Chemnitz, ce qui a occasionné la perte de deux cents hommes et de trois cents chevaux qui ont été pris, de sept à huit pièces de canon et de plusieurs voitures qui ont été détruites; les pièces ont été reprises. S. M. a ordonnné de faire une enquête pour savoir qui a pris sur soi de changer la route de l'armée; que ce soit un général ou un commissaire des guerres, il doit être puni selon la rigueur des lois militaires, la route de l'armée. ayant été ordonnée d'Augsbourg par Wurtzbourg et Fulde.

Le général Poinsot, venant de Brunswick avec un régiment de marche de cavalerie fort de quatre cents hommes, a été attaqué par sept à huit cents hommes de cavalerie ennemie près de Halle; il a été fait prisonnier avec une centaine d'hommes; deux cents hommes sont revenus à Leipsick.

Le duc de Padoue, est arrivé à Leipsick, où il réunit sa cavalerie pour balayer toute la rive gauche de l'Elbe.

T. III.

« ZurückWeiter »