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Sa Majesté a répondu en ces termes :

"Sénateurs,

"Ce que vous me dites m'est fort agréable. J'ai à cœur la gloire et la puissance de la France; mais mes premieres pensées sont pour tout ce qui peut perpétuer la tranquillité intérieure, et mettre à jamais mes peuples à l'abri des déchirements des factions et des horreurs de l'anarchie. C'est sur ces ennemies du bonheur des peuples que j'ai fondé, avec la volonté et l'amour des Français, ce trône auquel sont attachés désormais les destinées de la patrie.

"Des soldats timides et lâches perdent l'indépendance des nations, mais des magistrats pusillanimies détruisent l'empire des lois, les droits du trône et l'ordre social lui-même.

"La plus belle mort serait celle d'un soldat qui périt au champ d'honneur, si la mort d'un magistrat périssant en défendant le souverain, le trône et les lois n'était plus glo rieuse encore.

"Lorsque j'ai entrepris la régénération de la France, j'ai demandé à la Providence un nombre d'années déterminé. On détruit dans un moment, mais on ne peut réédifier sans le secours du temps. Le plus grand besoin de l'Etat est celui de magistrats courageux.

"Nos peres avaient pour cri de ralliement: Le roi est mort, vive le roi! Ce peu de mots contient les principaux avantages de la monarchie. Je crois avoir bien étudié l'esprit que mes peuples ont montré dans les différents siecles; j'ai réfléchi à ce qui a été fait aux différentes époques de notre histoire; j'y penserai encore.

"La guerre que je soutiens contre la Russie est une guerre politique. Je l'ai faite sans animosité; j'eusse voulu lui épargner les maux qu'elle-même s'est faits. J'aurais pu armer la plus grande partie de sa population contre ellemême, en proclamant la liberté des esclaves ; un grand nom bre de villages me l'ont demandé, mais lorsque j'ai connu Pabrutissement de cette classe nombreuse du peuple russe, je me suis refusé à cette mesure qui aurait voué à la mort Mon armée et aux horribles supplices bien des familles. a essuyé des pertes, mais c'est par la rigueur prématurée de la saison.

"J'agrée les sentiments que vous m'exprimez'
VOL. XL.

G

Après cette audience, le Conseil-d'Etat, conduit et introduit dans les mêmes formes, a été présenté à S. M. par S. A. S. le prince archichancelier de l'Empire.

S. Exc. M. le comte Defermon, ministre-d'état, président de la section des finances, a parlé en ces termes : "SIRE,

"Le premier besoin qu'éprouvent avec tous vos fideles sujets les membres de votre Conseil-d'Etat, est d'apporter aux pieds du trône de V. M. leurs félicitations sur son heureux retour, et de lui exprimer les sentiments de reconnaissance dont ils ont été pénétrés en apprenant que V. M. venait combler par sa présencee les vœux et les espérances de ses peuples.

"Tandis que, pendant l'absence de V. M., nous nous occupions des travaux qu'elle a daigné nous confier, et que tous nos instants étaient consacrés à l'exécution de ses ordres pour le bonheur et la prospérité de l'Empire, nous étions loin de penser qu'aucun Français pût méconnaître les principes sacrés et conservateurs qui nous ont tirés de l'anarchie et doivent à jamais nous en garantir.

"Sire, nous avons vu avec la plus profonde douleur l'attentat commis par un homme en délire, qui par un premier crime constaté, avait déjà mérité une peine que V. M. avait eu la générosité de lui remettre; mais sa tentative n'a servi qu'à prouver à nos anciens ennemis l'inutilité de pareils complots, et à mettre dans un nouveau jour le sincere attachement de tous les fonctionnaires de l'Empire pour la constitution que V. M. lui a donnée. Toutes les parties de l'Empire ont donné la preuve de leur attachement, et tous vos sujets ont rivalisé avec les fonctionnaires publics, de respect pour les principes, et d'attachement à votre personne sacrée et à son auguste dynastie.

"Dieu qui protége la France, la préservera longtemps du plus grand des malheurs; mais dans cette circonstance, tous les cœurs se rallieraient autour du prince qui est l'objet de nos vœux et de nos espérances, et chaque Français renouvellerait à ses pieds ses serments de fidélité et d'amour pour l'Empereur que la constitution appelle à succéder.

"Nous avons été sensibles aux récits que renferme le dernier bulletin de la grande-armée : quelle admiration ne doit pas inspirer le développement du plus auguste caractere

pendant ce mois de périls et de gloire, où les peines du cœur n'ont rien pu ôter à la force de l'esprit ?

"Quel sentiment ne doit pas faire naître chez une nation vraiment généreuse le tableau fidele de ses pertes imprévues, en voyant que le génie tutélaire de la France à su en prévenir les effets et en faire l'occasion d'une gloire nouvelle? V. M. parut-elle jamais mieux à la hauteur de ses destinées que dans ces moments où la fortune semblait essayer en armant les éléments, de rappeler qu'elle peut être inconstante.

"Que nos ennemis s'applaudissent, s'ils le veulent, des pertes matérielles que nous ont occasionnées la rigueur de la saison et l'âpreté du climat ; mais qu'ils calculent nos forces, qu'ils sachent qu'il n'est point d'efforts et de sacrifices dont, à l'exemple de V, M., la nation française ne soit capable pour réaliser ses glorieux projets.

"Nous ne pouvons, Sire, offrir à V. M., comme tout votre Empire, eu reconnaissance de ses travaux et de ses soins paternels, que l'expression de nos sentiments de respect, d'admiration et d'amour. Nous osons espérer que V. M., daignera accueillir cet hommage avec la même bonté dont elle n'a cessé d'honorer la fidélité et le dévouement de son Conseil-d'Etat."

S. M. a répondu en ces termes :

"Conseillers-d'Etat,

"Toutes les fois que j'entre en France, mon cœur éprouve une bien vive satisfaction. Si le peuple montre tant d'amour pour mon fils, c'est qu'il est convaincu par sentiment des bienfaits de la monarchie.

"C'est à l'idéologie, à cette ténébreuse métaphysique qui, en recherchant avec subtilité les causes premieres, veut sur ses bases fonder la législation des peuples, au lieu d'approprier les lois à la connaissance du cœur humain et aux leçons de l'histoire, qu'il faut attribuer tous les malheurs qu'a éprouvés notre belle France. Ces erreurs devaient et ont effectivement amené le régime des hommes de sang. En effet, qui a proclamé le principe d'insurrection comme un devoir? qui a adulé le peuple en le proclamant à une souveraineté qu'il était incapable d'exercer? qui a détruit la sainteté et de respect des lois, en les faisant dépendre, non des principes sacrés de la justice, de la nature des choses

et de la justice civile, mais seulement de la volonté d'une assemblée composée d'hommes étrangers à la connaissance des lois civiles, criminelles, administratives, politiques et militaires? Lorsqu'on est appelé à régénérer un Etat, ce sont des principes constaniment opposés qu'il faut suivre. L'histoire peint le cœur humain; c'est dans l'histoire qu'il faut chercher les avantages et les inconvénients des différentes législations. Voilà les principes que le Conseil-d'Etat d'un grand Empire ne doit jamais perdre de vue, il doit y joindre un courage à toute épreuve, et à l'exemple des présidents Harlay et Molé, être prêt à périr en défendant le souverain, le trône et les lois.

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J'apprécie les preuves d'attachement que le Conseild'Etat m'a données dans toutes les circonstances. J'agrée ses sentiments."

Des lettres arrivées le 9, de la côte d'Hollande, par un navire parti le 7 d'Ostende, annoncent que la totalité des troupes françaises, abandonnées si lâchement par leur misérable Empereur, se sont ren dues par capitulation aux géneraux russes Wittgenstein et Tschitchagoff. Il paraît, à ce qu'on mande, qu'elles avaient été si complétement cernées de toutes parts par l'activité et la vigilance des Russes, qu'il ne leur restait plus d'autre alternative. Leurs provisions étaient totalement épuisées, et depuis plusieurs jours leurs officiers de tous les rangs, les désertaient par douzaines à la fois. On ajoute cependant que les généraux qui étaient restés à la tête de leurs troupes, ont eu l'adresse de se procu rer de meilleures conditions que celles qui avaient été accordées aux corps de Davoust et de Ney. On mande qu'ils seront libres, sur parole de ne pas servir du tout pendant la guerre. L'avant-garde de l'armée russe était entrée dans le Duché de Varsovie, ce qui avait obligé toutes les troupes qui se trouvaient dans ce duché, à se concentrer. On y avait ordonné à la hâte de nouvelles levées.

Le capitaine du navire qui apporte ces glorieuses nouvelles, dit qu'on croyait en France que le gouvernement en était en possession mais qu'il ne jugeait pas prudent de les publier. Le silence absolu que les papiers de Paris jusqu'au 4, observent sur les mouvements et la situation de la grande armée, confirme ces nouvelles, ainsi que le retour de nombre d'officiers dont on annonce l'arrivée à Paris, sans faire mention des raisons pour lesquelles ils ont quitté leurs corps. Les dépêches de Lord Cathcart nous informaient que l'on continuerait de poursuivre l'ennemi sans relâche, et conséquemment elles nous préparaient à un semblable résultat. Il est probable que c'est l'armée de Titschagoff qui a détruit ainsi le reste des fuyards.

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