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tière. Mais Lothaire eut bientôt recours à lui, et lui céda pour obtenir son appui, toutes ses conquêtes en Lorraine. Ce traité lui aliénait la France. En 983, profitant de la mort d'Othon II, et de la minorité de son fils, il rompit subitement la paix qu'il avait conclue avec l'Empire, et envahit de nouveau la Lorraine; agression qui devait lui rendre un peu de popularité. Aussi jusqu'à la fin de son règne, aucune rebellion déclarée ne s'éleva contre lui. Mais chaque jour son pouvoir allait en décroissant; l'autorité, qui se retirait de lui, pour ainsi dire, passa aux mains du fils de Hugues-le-Grand, Hugues, comte de l'Ile-de-France et d'Anjou, qu'on surnommait Capet ou Chapet.

« Les difficultés de tout genre que présentait, en 987, une quatrième restauration des Carlovingiens, effrayèrent les princes d'Allemagne; ils ne firent marcher aucune armée au secours du prétendant Charles, frère de l'avant-dernier roi, et duc de Lorraine sous la suzeraineté de l'Empire. Réduit à la faible assistance de ses partisans de l'intérieur, Charles ne réussit qu'à s'emparer de la ville de Laon, où il se maintint jusqu'au moment où il fut trahi et livré par l'un des siens. Hugnes Capet le fit emprisonner dans la tour d'Orléans, où il mourut. Ses deux fils Louis et Charles, nés en prison et bannis de France après la mort de leur père, trouvèrent un asile en Allemagne, où se conservait à leur égard l'ancienne sympathie d'origine et de parenté. »

« L'avénement de la troisième race est, dans notre histoire nationale, d'une bien autre importance que celui de la seconde; c'est, à proprement parler, la fin du règne des Franks et la substitution d'une royauté nationale au gouvernement fondé la conquête. Dès-lors, notre histoire devient simple; c'est toujours le même peuple, qu'on suit et qu'on reconnaît malgré les changemens qui surviennent dans les mœurs et la civilisation. L'identité nationale est le fondement sur lequel repose depuis tant de siècles l'unité de dynastie. >>

par

Toutefois l'avénement d'une dynastie nouvelle fut à peine remarqué dans les provinces éloignées. Qu'importait aux seigneurs de Gascogne, de Languedoc, de Provence, de savoir

si celui qui portait vers la Seine le titre de roi, s'appelait Charles ou Hugues Capet. Pendant long-temps le roi n'aura guère plus d'importance qu'un duc ou un comte ordinaire. C'est quelque chose cependant qu'il soit au moins l'égal des grands vassaux, que la royauté soit descendue de la montagne de Laon, et sortie de la tutelle de l'archevêque de Reims. Les derniers Carlovingiens avaient souvent lutté avec peine contre les moindres barons. Les Capets sont de puissans seigneurs, capables de faire tête par leurs propres forces au comte d'Anjou, au comte de Poitiers.

Parvenus au terme de la domination des Allemands, à l'avénement de la nationalité française, nous devons nous arrêter un moment. L'an 1000 approche, la grande et solennelle époque où le moyen-âge attendait la fin du monde. En effet un monde y finit. Portons nos regards en arrière. La France a déjà parcouru deux âges dans sa vie de nation...

Dans le premier, les races sont venues se déposer l'une sur l'autre, et féconder le sol gaulois de leurs alluvions. Par dessus les Celtes, se sont placés les Romains, enfin les Germains, les derniers venus du monde. Voilà les élémens, les matériaux vivans de la société..

Au second âge, la fusion des races commence et la société cherche à s'asseoir. La France voudrait devenir un monde social, mais l'organisation d'un tel monde suppose la fixité et l'ordre. La fixité, l'attachement au sol, à la propriété, cette condition impossible à remplir, tant que durent les immigrations de races nouvelles, elle l'est à peine sous les Carlovingiens; elle ne sera complétement remplie que par la féodalité. C'est alors que l'homme prend racine et s'incorpore à la terre. La boi, de personnelle qu'elle était, devient territoriale. Tout se divise et s'isole. L'histoire devrait, s'il était possible, obéir à ce mouvement, se disperser aussi, et suivre sur tous les points où elles s'élèvent, les dynasties féodales. La véritable histoire de France est alors celle des fiefs plus que celle de la royauté.

CHAPITRE VII.

Avénement des Capétiens [987]. L'an 1000. Conquête des Deux-Siciles et de l'Angleterre pendant le onzième siècle.

C'ÉTAIT une croyance universelle au moyen-âge, que le monde devait finir avec l'an mil de l'incarnation. Avant le christianisme, les Étrusques aussi avaient fixé leur terme à dix siècles, et la prédiction s'était accomplie. Le christianisme, passager sur cette terre, hôte exilé du ciel, devait adopter aisément ces croyances. Le monde du moyen-âge n'avait pas la régularité extérieure de la cité antique, et il était bien difficile d'en discerner l'ordre intime et profond. Ce monde ne voyait que chaos en soi; il'aspirait à l'ordre, et l'attendait dans la mort.

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Cette croyance à la proximité du jugement dernier se fortifia dans les calamités qui précédèrent l'an mil, ou suivirent de près. Il semblait que l'ordre des saisons fût interverti, que les élémens suivissent des lois nouvelles. Une peştę terrible désola l'Aquitaine; la chair des malades semblait frappée par le feu, se détachait de leurs os, et tombait en pourriture. Ce fut encore pis quelques années après. La famine ravagea tout le monde'; l'on vit les hommes se manger les uns les autres.

Ces excessives misères brisèrent les cœurs et leur rendirent un peu de douceur et de pitié. Pendant les jours saints de chaque semaine (du mercredi soir au lundi matin), toute guerre était interdite : c'est ce qu'on appela la paix, plus tard, la trève de Dieu. Dans cet effroi général, la plupart ne trouvaient un peu de repos qu'à l'ombre des églises. Ils apportaient en foule, ils mettaient sur l'autel des donations de terres, de maisons, de

serfs. Mais le plus souvent tout cela ne les rassurait pas; ils aspiraient à quitter l'épée, le baudrier, tous les signes de la milice du siècle; ils se réfugiaient dans l'église. Le premier des Capétiens, Hugues Capet, ne voulut jamais porter la couronne ; il lui suffit de la chappe, comme abbé de Saint-Martin de Tours.

Les Capets passaient généralement pour une race plébéienne, saxonne d'origine. Leur aïeul Robert-le-Fort avait défendů le pays contre les Normands. Eudes combattit șans cesse les empereurs qui soutenaient les derniers Carlovin giens. Ses successeurs, qui durent le trône à la popularité de leurs belliquenx ancêtres, cherchèrent, sans doute par le conseil des prêtres, à se rattacher au passé, et par de fointaines alliances avec le monde grec à primer les Carlovingiens en antiquité. Hugues Capet demanda pour son fils la main d'une princesse de Constantinople. Son petit-fils Henri Ier épousa la fille du czar de Russie, princesse byzantine par une de ses aïeules qui appartenait à la maison macédonienne. La prétention de cette maison était de remonter à Alexandre-leGrand, à Philippe, et par eux à Hercule. Le roi de France appela son fils Philippe, et ce nom est resté jusqu'à nous commun parmi les Capétiens.

L'élévation de cette dynastie fut l'ouvrage des prêtres; Hugues assura ou rendit aux églises et aux monastères leurs biens et leurs immunités. Elle fut aussi l'ouvrage du duc de Normandie, Richard-sans-Peur. Blois, Tours et Chartres se trouvaient entre les mains d'une autre maison normande qui possédait en outre les établissemens éloignés de Provins, Meaux et Beauvais; ceux-ci descendaient d'un Thiébold, selon quelques-uns parent de Rollon. Rivaux jaloux des Normands de Normandie, les Normands de Blois refusèrent quelque temps de reconnaître Hngues Capet, en haine de ceux qui l'avaient fait roi. Mais il les apaisa en faisant épouser à son fils, le roi Robert, la fameuse Berthe, veuve d'Eudes Jer de Blois (fils de Thibaut-le-Tricheur) (995). Cette veuve, héritière du royaume de Bourgogne par le roi Rodolphe son frère, pouvait donner aux Capets quelques prétentions sur

ce royaume, légué par Rodolphe à l'empire, Aussi le pape allemand Grégoire V, créature des empereurs, saisit-il le prétexte d'une parenté éloignée pour forcer Robert de quitter sa femme et l'excommunier sur son refus (998). On connaît l'histoire ou la fable de l'abandon de Robert, délaissé de ses serviteurs, et la légende de Berthe, qui accoucha d'un monstre.

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Mais l'année suivante, succéda à Grégoire V, un Français, un ami des Capétiens, Gerbert, qui renoua ainsi pour long-temps l'alliance du Saint-Siége et du trône de France. Ce Gerbert, disent les contemporains., n'était pas moins qu'un magicien. C'est du diable qu'il apprit la merveille des chiffres arabes, et l'algèbre, et l'art de construire une horloge. Moine à Aurillac, chassé, réfugié à Barcelone, il se défroque pour aller étudier les lettres et l'algèbre à Cordoue. Dela, il passe à Rome. Le grand Othon le fait précepteur de son fils, de son petit-fils; puis il professe aux fameuses écoles de Reims; il a pour disciple notre bon roi Robert. Secrétaire et confident de l'archevêque, il le fait déposer, et obtient sa place par l'influence d'Hugues Capet. Ce fut une grande chose pour les Capets d'avoir pour eux un tel homme ils le font archevêque, et il aide à les faire rois. Obligé de se retirer près d'Othon III, il devient archevêque de Ravenne; enfin pape. I juge les grands, il nomme des rois (Hongrie, Pologne), il donne des lois aux républiques, il prêche la croisade; il règne par le pontificat et par la science.

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Robert ayant été obligé de répudier Berthe avant l'avénement de Gerbert, et le fils que Berthe avait d'un premier lit ayant détruit la puissance de la maison de Blois et Champagne dans une vaine entreprise contre l'empire, la maison d'Anjou prévalut. L'angevin Foulques Nerra fit épouser au roi Robert sa nièce Constance, fille du comte de Toulouse. Robert put à son aise, sous la tutelle de sa femme, composer des hymnes et vaquer au lutrin.

Plus tard ce fut le tour des Normands de dominer Robert. Ils entreprirent de lui donner la Bourgogne, ce qui soumettait à leur influence le cours supérieur de la Seine. Son fils cadet, de même nom que lui, fut le premier duc capétien de

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