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soins à l'organisation de cette école que devait diriger son ami Théodore de Bèze, et favorisait-il en même temps de tout son pouvoir l'établissement de ces presses nombreuses, qui pouvaient si activement servir la fécondité de son esprit et de celui de ses disciples.

Au milieu de travaux aussi multipliés, Calvin trouvait encore le temps d'entretenir une correspondance suivie avec la France, l'Angleterre, l'Allemagne, la Pologne. L'activité de cet homme était prodigieuse. On ne saurait sans injustice lui refuser non plus le mérite d'avoir exercé, dans diverses occasions et à un haut degré, plusieurs des vertus du christianisme. C'est ainsi que, lorsqu'en 1545, la peste désola Genève, on vit le pasteur se multiplier, et exposer maintes fois sa vie pour la conservation de son troupeau; et, à peu de temps de là, c'est à son utile intercession auprès des princes d'Allemagne, que les malheureux sectateurs de Valdo, échappés aux massacres de la Provence, durent un asile et des protecteurs. Son désintéressement, la pureté de ses mœurs, la sincérité de sa conviction ne sauraient être révoqués en doute. Mais, si nous ne balançons pas à lui rendre cet hommage, sous quel jour pouvons-nous présenter la cruelle énergie avec laquelle il poursuivait ses adversaires? Il avait commencé par les envelopper tous dans la désignation de libertins; mais les injures, qui ne lui étaient du reste que trop familières, ne pouvaient satisfaire son dévot ressentiment. Le bourreau était, à cette époque, l'auxiliaire du prêtre; et cet horrible sacrilége ne fut pas du nombre de ceux dont Calvin craignit de souiller son nouveau culte. Sans parler des rigueurs sans nombre que l'homme de Dieu sollicita contre ses ennemis, pouvons-nous passer sous silence la mort de Jacques Gruet, qui fut décapité à Genève le 26 juillet 1547, pour ses écrits contre la réforme, et celle du médecin espagnol Michel Servet, qui y fut brûlé vif, le 27 octobre 1553, pour avoir attaqué le dogme de la Trinité? L'un des griefs consignés dans les motifs de l'arrêt rendu contre le premier, était d'a

voir «mal parlé de M. Calvin; quant au second, condamné comme hérétique par les magistrats du Dauphiné sur des pièces livrées par Calvin lui-même, il venait chercher un asile en Suisse quand il y fut arrêté. C'est par de tels actes que l'apôtre de Genève affermissait sa doctrine contre le principe même du libre examen auquel elle devait son existence....! Le dernier acte important de la vie publique de Calvin fut la mission qu'il remplit, en 1556, à la diète de Francfort, où il contribua à apaiser les différends qui s'étaient élevés dans le sein de l'Église réformée. Les soins incessants qu'il s'était donnés, dès ses premières années, pour assurer le triomphe de la cause qu'il avait embrassée, avaient détruit de bonne heure une santé naturellement peu robuste. Les migraines, la goutte et la gravelle lui causaient depuis longtemps d'affreuses souffrances, quand il mourut, le 27 mai 1564.

Calvin avait le visage pâle et sec; son caractère était un mélange de timidité et de roideur; son esprit était aussi fin qu'actif, son style aussi vif que correct. A ceux de ses ouvrages dont nous avons eu occasion de parler, il faut ajouter des commentaires sur presque tous les livres de la Bible, de nombreux écrits de controverse, et une foule de serinons dont beaucoup n'ont jamais été imprimés. L'édition la plus complète de ses œuvres est celle de Genève, en 12 volumes in-folio. Le dogme le plus saillant de sa doctrine est celui d'une prédestination antérieure même à la prescience divine. Il le développa au chapitre XX1 du 3o livre de son Institution chrétienne, et l'on ne conçoit pas que la plume ne soit pas tombée des mains du théologien quand i! osa écrire ce blasphème que son Dieu, sans autre motif que son bon plaisir, avait destiné la majorité du genre humain à une réprobation éternelle! Quant au libre arbitre, Calvin le croit anéanti par l'effet du péché originel : l'absence du mérite des œuvres de l'homme en est le corollaire naturel. C'est, comme on voit, la doctrine du fatalisme passée dans l'Évangile. Il

n'y a donc pas lieu de s'étonner que, pour en prévenir les épouvantables conséquences, et assurer à la morale la protection qu'elle cherchait en vain dans son dogme, il ait si souvent recouru à des mesures de violente répression!

CALVIN, général de brigade, déploya la plus rare valeur, et concourut à la prise de Naples, en 1799. Le 5 décembre 1800, pendant la campagne d'Italie, ce général, à la tête de trois bataillons de la 24° légère et d'un escadron de hussards, battit l'ennemi qui avait voulu le surprendre, et fit prisonnier un escadron autrichien; Calvin se fit remarquer de nouveau à l'affaire de Monsembano, sur les bords du Mincio; mais il fut tué à la fin de l'action.

CALVINISME. Voy. CHRISTIANISME et SECTES Religieuses.

CALVINISTES. Avant de retracer dans une rapide esquisse le rôle que jouèrent les disciples de Calvin dans cette lutte impie où s'entre-choquèrent pendant deux siècles les intérêts de la terre et du ciel, il convient de jeter un coup d'œil sur les circonstances à la faveur desquelles se développa l'hérésie qui fut la cause ou le prétexte de ce drame douloureux. Les scandales de Rome avaient comblé la mesure. Ce n'était point assez que la cour pontificale étalât aux regards du monde chrétien cet ignoble tarif des indulgences, qui fixait le prix auquel on pouvait obtenir l'absolution de toutes les fautes, depuis la simple rupture du jeûne jusqu'à l'inceste et au meurtre; un pape lui-même, l'impudique Borgia, Alexandre VI, avait souillé la soutane blanche dans la fange des vices les plus déhontés; et ce n'était pas en faisant un casque de la tiare de saint Pierre que le fier Jules II pouvait lui rendre la force morale que lui avait enlevée son prédécesseur. N'oublions pas d'ailleurs que l'ambition temporelle du vicaire du Christ avait plus d'une fois excité le ressentiment des princes de l'Occident avant que sa dictature spirituelle rencontrât l'opposition des peuples. Soit que les désordres fussent descendus du chef aux in

férieurs, ou qu'ils fussent remontés d'eux à lui, l'autel, dans toutes les parties de la domination romaine, voilait d'autres mystères que ceux du tabernacle; et encore le clergé n'avait-il pas toujours la pudeur d'en garder le se⚫cret. Depuis longtemps, les populations étaient accoutumées à se moquer, dans de mordantes épigrammes, des désordres des serviteurs de Dieu. L'indifférence religieuse était devenue générale. La voix de saint Bernard s'était perdue dans le désert quand il avait voulu prêcher la nécessité d'une réformation générale. Nous n'examinerons pas si, comme le dit Bossuet dans son Histoire des variations des églises protestantes, cette mesure devait regarder la discipline ecclésiastique, et non la foi; nous nous bornons à constater quelle était la disposition des esprits relativement aux questions religieuses, lorsque la France vit se manifester les premiers symptômes de la réforme. En reparaissant chez nous avec tout l'éclat de la nouveauté, la philosophie et la littérature des anciens ouvrirent aux esprits un vaste champ d'étude, et leur imprimèrent en même temps une énergique activité. Ce qu'au douzième siècle fe marchand de Lyon, Valdo, avait osé seul entreprendre, un appel à l'autorité du raisonnement, une foule d'esprits se trouvèrent disposés à le faire au seizième. Aussi, la querelle théologique, brusquement entamée par Luther, avait-elle déjà excité en deçà du Rhin une ardente sympathie lorsque Calvin parut. Nous lisons, dans l'Histoire du calvinisme par le P. Maimbourg, que, dès 1520, les savants qu'avaient appelés d'Allemagne les universités françaises, y semaient les doctrines de l'ex-augustin de Wittemberg, et qu'un évêque de Meaux, Guillaume Brissonnet (voyez ce nom), contribua lui-même à l'établissement de l'hérésie, en fixant auprès de lui, pour l'aider à rétablir la police de son diocèse, plusieurs maîtres ès arts de l'université de Paris, au nombre desquels était ce Guillaume Farel, qui précéda Calvin à Genève. Ces hommes furent bientôt forcés de fuir, il est vrai, devant les

menaces du parlement, qui s'empressa de prendre en main la défense de la foi; mais le germe qu'ils avaient jeté dans les consciences devait porter ses fruits, et l'œuvre de la réforme allait être continuée par une main plus puissante que la leur.

Luther n'avait guère fait que détruire, Calvin entreprit d'édifier. Théologien jurisconsulte, il sut imprimer à son Eglise cette forte organisation qui, dès l'origine, en fit une puis sance capable de porter l'alarme aussi bien sous l'hermine royale que sous la pourpre sacrée. François Ier flotta quelque temps indécis. Si, d'un côté, les conciles de Lyon, de Bourges, de Paris, lui demandaient, en 1528, l'extermination de l'hérésie, de l'autre, Henri VIII le sollicitait, en 1532, de secouer, à son exemple, le joug pontifical. Mais le roi chevalier était lié par un concordat; et puis, les membres du clergé ne lui payaient-ils pas bien par leurs subsides le droit de poursuivre leurs nouveaux ennemis? Cependant le petit troupeau, nom par lequel les calvinistes aimaient à se désigner, grossissait rapidement. Il se recrutait de gens de toutes les conditions'; d'hommes d'église que la réforme affranchissait de vœux toujours gênants, quoique souvent enfreints, et d'hommes d'épée dont l'exercice d'un culte persécuté piquait l'orgueilleux courage; d'artisans qui voyaient dans la simplicité des formes de la nouvelle religion une sorte de sympathie pour leur pauvreté, et de nobles dames qui préféraient le naïf français des psaumes de Marot au mystérieux latin de la Vulgate et de leurs Heures. Mais il était évident que trop d'intérêts se rattachaient à l'ancienne Eglise pour qu'il fût permis à la nouvelle de s'établir sans opposition; et, d'ailleurs, les avantages qu'avait déjà obtenus celle-ci enflaient trop l'orgueil de ses chefs pour que leur ambition se contentât d'un partage. Les deux croyances durent, en conséquence, se disputer l'une à l'autre sinon les consciences, du moins les personnes; et, comme les arguments n'étaient sans réplique d'aucun côté, la

force des armes dut suppléer à celle de la logique. De là, les premiers conflits.

Mais les questions théologiques n'occupaient pas tellement les esprits qu'elles étouffassent dans les cœurs tout intérêt pour les objets étrangers au salut. Les rivaux, dans les affaires du monde, exploitèrent done au profit de leur politique le zèle aveugle des anciens religionnaires et celui des nouveaux. De là, cette part si active prise dans la guerre des deux sectes par tout ce que la nation avait de puissant ou d'ambitieux. Et enfin, comme le peuple avait été accoutumé à voir ses princes employer des troupes étrangères à la garde de leurs personnes que ne protégeait plus assez la vieille majesté du trône, les calvinistes crurent qu'ils pouvaient, à leur tour, appeler l'étranger au secours de leur foi qu'attaquaient les forces réunies du Louvre et du Vatican. Les alliés que comptaient l'un et l'autre camps ne portaient pas tous, du reste, l'arquebuse et la cuirasse: car l'Italie avait lancé dans cette arène ses femmes et ses

prêtres, et l'Allemagne, ses docteurs.

Notre intention n'est pas de revenir ici sur le détail de ces guerres; mais tout en signalant quelques faits particuliers que le point de vue sous lequel nous considérons la question ne nous permettait pas de négliger, nous nous attacherons aux résultats moraux bien plus qu'aux faits eux-mêmes qui ont été suffisamment exposés dans les ANNALES,

Dès le règne de François Ier, et pendant les premières persécutions, les calvinistes trouverent un refuge dans la Navarge et le midi de la France, d'où, sortant aux premiers moments de calme, ils se répandirent dans tout l'ouest et jusqu'au cœur du royaume. Les rigueurs exercées contre eux ne les empêcherent pas de dominer bientôt dans une foule de villes. François Ier meurt; mais, tout en armant contre le pape, Henri II renouvelle, en 1551, les édits de son père contre les hérétiques, et croit devoir y ajouter l'obligation d'un certificat de catholicisme pour l'admission aux charges publiques. Sous lui, quelques réformés veulent mettre l'espace

P

CAL

FRANCE.

des mers entre eux et leurs persécu-
teurs; et, en 1555, un fort parti d'entre
eux, sous la conduite de Durand de
Villegagnon, va fonder sur la côte du
Brésil, aux environs de Rio-Janeiro,
une colonie que ne tarde pas à ruiner
la mésintelligence qui se met parmi ses
membres. En France, cependant, le
parti prenait chaque jour de nouvelles
forces. L'université était remplie de

ses adeptes; et le Pré aux Clercs,
ils se réunissaient le soir pour chanter
leurs psaumes, fut maintes fois le théâ-
tre de rixes violentes avec les moines qui
revendiquaient la possession du lieu.

L'année suivante, les prétentions
des calvinistes étaient devenues telles
que leurs députés, assemblés à Nan-
tes, déclaraient constituer les états
du royaume. En Provence, ils guer-
royaient sous Paulon de Mouvans; en
Dauphiné, ils avaient mis à leur tête
du Puy de Montbrun; enfin, sous la
protection de Coligny, on faisait pu-
bliquement le prêche à Dieppe, au
Havre et à Caen. Lors de l'assemblée
des notables tenue à Fontainebleau,
on vit l'amiral réclamer la liberté du
culte au nom de cinquante mille calvi-
nistes de la seule province de Norman-
die. En 1561, les religionnaires avaient
en France plus de deux mille temples,
et, dans leur fanatique aveuglement, ils
se crurent si forts qu'ils osèrent som-
mer le jeune roi Charles IX, ou, pour
mieux dire, sa mère, de faire dispa-
raître ce qu'ils appelaient les monu-
ments de l'idolâtrie catholique, c'est
à-dire, les images et les reliques des
églises. Sur le refus qu'ils éprouvèrent,
quelques-uns d'entre eux se charge-
rent de commencer l'œuvre de des-
truction, et portèrent leurs outrages
jusque sur les hosties consacrées. Si
ces imprudentes et sacriléges démons-
trations n'empêchèrent pas la régente
d'admettre leurs docteurs à la discus-
sion solennelle de leur profession de foi
à Poissy, elles contribuerent sans doute
à neutraliser les efforts tentés par les
gens modérés des deux partis pour opé-
rer une réconciliation, et la sanglante
scène de Vassy finit par rendre impos-
sible cet heureux résultat.

Comme toutes les luttes religieuses,
celles-ci furent cruelles dans leurs
hostilités, perfides dans leurs trêves.
Les calvinistes firent expier aux catho-
liques leurs échafauds et leurs bû-
chers. Dans leur retraite, après la ba-
taille de Saint-Denis, ils passèrent au
fil de l'épée la population de Pont-sur-
Yonne, et quand ils eurent pénétré
dans Nîmes, après la déroute de Mon-
contour, ils massacrèrent lâchement
le clergé de la cathédrale: Les sus-
pensions d'armes ne servaient qu'à
faire prendre aux deux partis de nou-
velles forces pour de nouvelles attaques

A peine le traité d'Amboise, du
12 mars 1563, était-il signé, que tous
les conseillers de la cour, à la tête des-
quels étaient les envoyés du pape et
de l'empereur, en attaquaient la vali-
dité. Il n'avait d'ailleurs été enregis-
tré que par provision, et à cause de
la nécessité des temps,» et cette hor-`
rible maxime s'était etablie, qu'on n'é-
tait point engagé par un serment fait
à un hérétique. En prenant, dans leur
synode général de Lyon, l'initiative
d'une nouvelle levée de boucliers, les cal-
vinistes pouvaient done se croire encore
dans les bornes d'une légitime défense.
Les traités qui servirent de dénoû-
ments aux divers actes de cette grande
tragédie, eurent cependant cela de re-
marquable, que le parti calviniste, qui,
surtout dans les derniers temps de la
lutte, n'arrivait à des trêves que par
des défaites, semblait pourtant avoir la
plus grande part au reglement des
articles, gagnant de plus en plus dans
les transactions diplomatiques à me-
sure qu'il essuyait plus de pertes sur le
champ de bataille, jusqu'au jour où, par
la sanglante exécution de la Saint-Bar-
thélemy, les catholiques reprirent, le
poignard à la main, les concessions
successives que leur avaient arrachées
leurs adversaires. Longtemps encore
la lutte se prolongea. Les deux partis
eurent leurs alternatives de succès et
de revers, et usèrent avec une égale
cruauté de la victoire.

Enfin, le bras des bourreaux se lassa,
les haines s'assoupirent, et de nouveaux
événements rapprochèrent les intérêts.

Les calvinistes virent monter sur le trône un des leurs, et, s'ils lui gardèrent quelque rancune d'avoir pensé que Paris valait bien une messe, ils n'en éprouvèrent pas moins les effets de sa sympathie. Malheureusement Henri IV passa les bornes d'une généreuse protection, et l'édit même par lequel il croyait assurer la concorde renfermait le germe de nouvelles divisions. Les calvinistes .constituèrent dans l'État un corps légalement reconnu. Une partie du territoire continua même à être, en leur faveur, soustrait à la juridiction royale; enfin, on sembla avoir opéré « le rapprochement de deux peuples plutôt que la fusion de deux partis (*). » Les anciens adversaires des réformés ne leur pardonnèrent pas d'avoir obtenu des priviléges qui, suivant eux, n'avaient été accordés qu'aux dépens des leurs; et quand Louis XIII eut succédé à l'auteur de l'édit de Nantes, on entendit, aux états généraux de 1614, le cardinal Duperron assimiler les protestants à des condamnés dont le supplice a seulement éprouvé un sursis. Il est juste d'ailleurs d'ajouter que la longue période de résistance armée d'où les calvinistes sortaient à peine les avait mal préparés à la jouissance paisible des avantages qu'ils venaient d'obtenir, et que, remuants et inquiets, ils menaçaient encore, du fond de leurs forteresses, la tranquillité de l'État. En 1621, époque à laquelle l'intérêt de leurs consciences ne pouvait plus servir d'excuse à leurs ambitieuses entreprises, ils voulurent, dans une assemblée tenue à la Rochelle, dresser pour la France le plan d'une république fédérative divisée en huit cercles, ou plutôt de huit principautés réunies par le seul lien de la communauté de culte, et qu'ils destinaient aux plus influents d'entre eux. On ne sait pas quelles places ils réservaient aux catholiques dans cette orga nisation. Quoi qu'il en soit, Richelieu, en renversant leur rempart, rendit vain ce dernier effort du fanatisme

enté sur les débris de la féodalité.

C'était une haute politique, et non (*) De l'état du protestantisme en France depuis le seizième siècle, par M. Aignan.

un zèle inconsidéré, qui avait dicté la conduite du cardinal; aussi, après avoir abattu les forces du parti, respectat-il les libertés de la secte. Mazarin suivit son exemple. Les calvinistes redevinrent citoyens, toute distinction entre les Français des deux croyances disparut un moment. La carrière des honneurs fut même ouverte aux réformés, et Rulhières, dans ses Éclaircissements sur les causes de la révocation de l'édit de Nantes, leur rend cet honorable témoignage, que les satires dirigées contre les financiers furent suspendues lorsque les principaux emplois de la finance se trouvèrent occupés par des protestants, et plus tard, quand, par un retour d'intolérance, la carrière des fonctions publiques leur fut interdite, l'industrie, florissante entre leurs mains, paya généreusement à la patrie le reste de protection que le souverain continuait à leur accorder.

Mais, tandis que les calvinistes perdaient graduellement la faveur momentanée dont ils avaient joui, un corps puissant, par une gradation contraire, s'était élevé dans l'Église et dans l'État. Satellites avancés du chef romain, les enfants de Loyola épiaient en France le moment de frapper l'hydre de l'hérésie. Ils avaient obtenu l'oreille d'un vieux monarque, qui avait vu s'évanouir ses gloires terrestres, et s'étaient assurés de l'active coopération de la calviniste convertie qui partageait la couche royale. Leurs prédicateurs tonnaient contre les réformés, qu'ils n'appelaient que les portes de l'enfer et les prostituées de Satan. En 1682, la France venait d'humilier Rome par la déclaration de son clergé. Peut-être fut-ce aux yeux du roi une obligation de plus de donner à la chrétienté une éclatante preuve de sa foi. La conversion des hérétiques fut la pieuse victoire que l'on offrit à son zèle. La Chaise, Letellier et Louvois en répondaient. Il n'y eut pas de séductions mondaines qu'on n'offrît aux calvinistes pour qu'ils consentissent à se laisser engager dans le chemin du salut. Mais on trouva bien

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