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provisoire pensa donc qu'il y aurait un véritable avantage à faire sanctionner par lui la révolution qui s'accomplissait. Sur son invitation, les députés présents à Paris, au nombre de soixante-dix-sept, se réunirent au lieu ordinaire de leurs séances. En l'absence du duc de Massa, qui avait suivi la régence à Blois, M. Félix Faulcon les présidait. Tous adhérèrent à l'acte du Sénat. Ils le firent purement et simplement, sans injurier celui qu'ils regardaient la veille comme leur souverain. La résolution fut prise en séance secrète, selon l'ancien usage de cette Assemblée, mais la séance fut rendue publique pour la proclamation du vote. Le Corps législatif alla ensuite présenter ses hommages aux souverains alliés.

A l'exemple du Corps législatif, la Cour de cassation, la Cour des comptes, les tribunaux, les maires, les officiers de la garde nationale, tous les corps constitués s'empressèrent, dans la soirée de ce jour et dans la matinée du lendemain, de faire parvenir au gouvernement des adresses d'adhésion au sénatus-consulte de déchéance. Ces adresses ne se bornaient pas à applaudir à la chute du pouvoir absolu; la plupart demandaient en termes chaleureux le rétablissement de la maison de Bourbon sur le trône de Saint-Louis. «Puissions-nous, disait la Cour de cassation, » puissions-nous, après vingt ans d'orage et de mal» heurs, trouver le repos à l'ombre de ce sceptre antique » et révéré qui, pendant huit siècles, a si glorieusement » gouverné la France! »

Le gouvernement provisoire, installé dans l'entre-sol

que M. de Talleyrand s'était réservé en cédant à l'empereur Alexandre le principal appartement de son hôtel, se voyait déjà en butte aux empressements et aux sollicitations de toute nature qui assiégent les pouvoirs naissants. Dans cette étroite enceinte, encombrée, du malin au soir, de la foule des intrigants qui venaient offrir leurs services aux dépositaires de l'autorité et s'efforcer de leur arracher, à force d'importunité, les emplois et les faveurs dont ils disposaient, ce n'était pas sans peine que M. de Talleyrand et ses collègues pouvaient se ménager le temps, le loisir, l'espace nécessaires pour aviser aux mesures urgentes et pour se concerter avec les hommes plus sérieux dont le concours leur était indispensable. Les mémoires du temps contiennent, sur ces premières journées, des détails curieux et caractéristiques que l'histoire ne saurait recueillir parce qu'ils exigeraient un cadre trop étendu. On vit se renouveler le spectacle que présentent presque toujours les grandes crises, alors que la confusion générale, l'exaltation des esprits, l'ardeur des espérances, la vivacité des craintes, mettent à nu toutes les cupidités, toutes les passions basses du cœur humain, en les dépouillant du voile dont elles se couvrent aussi longtemps que la régularité du mouvement politique et social ne leur permet pas de se déployer en toute liberté. Tout le sang-froid, toute l'adresse de M. de Talleyrand lui suffisaient à peine pour se démêler de ces inextricables embarras et pour éluder des prétentions qu'il n'était pas possible de satisfaire, mais que, dans les con

jonctures où l'on se trouvait, il n'eût pas été sans danger de repousser d'une manière absolue.

Le gouvernement provisoire, tout en s'abstenant plus. qu'il n'est ordinaire dans les situations analogues de prodiguer aux innombrables solliciteurs les dignités et les fonctions publiques, avait dû pourvoir à certaines nécessités du service. Le jour même de son installation, il avait choisi pour son secrétaire général le vieux Dupont de Nemours, un des rares survivants de la secte économique, membre de l'Assemblée constituante et l'un des plus fidèles représentants de ce qu'il y avait de sentiments honnêtes et philanthropiques dans la révolution de 1789. On lui adjoignit un homme bien différent, Roux-Laborie, connu pour son esprit remuant et l'infatigable activité qu'il a dépensée pendant quarante ans, sans grand résultat pour lui-même ni pour la chose publique, au service de toutes les coteries, de toutes les intrigues, de tous les personnages influents; c'était alors à M. de Talleyrand qu'il s'était attaché. Le rapprochement de deux noms tels. que ceux de MM. Dupont de Nemours et Laborie caractérise parfaitement la diversité des éléments dont allait sortir la nouvelle organisation de la France.

Le maréchal Moncey ayant suivi l'Impératrice à Blois, il fallait donner un chef à la garde nationale, la seule force qui fût à la disposition du gouvernement et qui pût maintenir l'ordre dans Paris. Dès le 2 avril, le général Dessoles fut appelé à ce commandement. L'estime dont il jouissait à juste titre, la modération de son caractère, l'aménité

poursuivre sa route, d'entrer dans Paris, d'y ramener les troupes qui en étaient déjà sorties, de soulever la population et de recommencer la lutte; mais on lui en fit comprendre l'impossibilité, et après avoir ordonné au duc de Vicence de partir sans retard pour aller trouver l'empereur Alexandre et essayer de conclure la paix aux conditions de Châtillon, il rebroussa chemin vers Fontainebleau, où les têtes de colonne de son armée commençaient à arriver. Quelques jours devant se passer avant qu'elle ne pût y être tout entière, il se trouvait pour le moment condamné au supplice de l'attente et de l'inaction.

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Formation d'un gouvernement provisoire présidé par M. de Talleyrand. Déchéance de Napoléon. Constitution sénatoriale et rappel des Bourbons. Abdication de Napoléon et son départ pour l'ile d'Elbe.

Dans la soirée du 30 mars, aussitôt après la conclusion verbale de la capitulation, une proclamation du prince de Schwarzenberg, généralissime des armées coalisées, avait commencé à se répandre dans Paris. Rédigée et même imprimée avant la bataille, elle indiquait non pas en termes formels, mais d'une manière assez positive, que les alliés n'entendaient plus traiter avec Napoléon. Ce n'était pas sans quelque peine que l'ardente insistance du général Pozzo avait obtenu l'assentiment de l'empereur Alexandre à cette espèce de manifeste: «Habitants » de Paris, disait le prince de Schwarzenberg, les armées » alliées se trouvent devant Paris. Le but de leur marche » sur la capitale de la France est l'espoir d'une réconci» liation sincère et durable avec elle. Depuis vingt ans, >> l'Europe est inondée de sang et de larmes. Les tentatives

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