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vous serez tout étonné de comprendre, grâce à votre guide, ce qui paraissait d'abord ne devoir être qu'une série d'absurdités ou de rêveries incohérentes. Hâtons-nous d'ajouter qu'il y a dans ce volume beaucoup de chapitres moins abstrus que celui-là et qui procurent à l'esprit une satisfaction moins mélangée. Le dernier chapitre, relatif à la divination enthousiaste, nous a paru tout particulièrement intéressant. Bien que la question principale qui y est traitée, celle des origines de l'oracle delphique, ne soit pas susceptible d'une solution rigoureuse, cependant M. B.-L. en a étudié les différentes données avec un tel soin, il a serré le problème de si près, que l'on peut accepter, au moins comme très vraisemblables, ses conclusions; à savoir que la divination a dû naître à Delphes d'un rapprochement fortuit entre le culte de Dionysos et celui d'Apollon, et que certains indices peuvent faire placer la date de cette institution dans le cours du viIIe siècle, ou au commencement du viio1. Faut-il s'étonner que, dans une œuvre de cette étendue et qui suppose de si vastes recherches, certaines inexactitudes de détail, fort peu nombreuses et de peu d'importance d'ailleurs, se soient glissées? Nous demandons à l'auteur la permission de lui signaler celles que nous avons notées ce lui sera, nous l'espérons, un témoignage du vif intérêt que nous avons pris à la lecture de son livre.

Pag. 200. M. B.-L. nous dit que l'autel de Zeus dorpañaïog était situé << vraisemblablement » sur l'acropole. Le texte de Strabon (IX, 2, 11), auquel M. B.-L. nous renvoie lui-même, indique cependant très nettement la place de cet autel : ἔστι δὲ αὕτη ἐν τῷ τείχει μεταξὺ τοῦ Πυθίου καὶ τοῦ Ὀλυμπίου. Les mots τῷ τείχει désignent évidemment le mur d'enceinte d'Athènes. La situation de l'Olympion, dont il reste des ruines, ne peut faire doute, et l'on sait, d'autre part, que le Pythion était en dehors des portes (Cf. C. Wachsmuth, Die Stadt Athen, p. 295-296). Nous voici donc loin de l'acropole.

Pag. 201, 1. 2. Il ne faut pas confondre le bourg d'Harma en Béotie, sur le territoire de Tanagre, avec Harma de l'Attique, qui était près de Phylé. C'est dans la direction de ce dernier Harma, et non du premier, que se plaçaient les Pythaïstes chargés d'observer l'éclair de Zeus qui était le signal du départ des théories sacrées pour Delphes. Le texte précité de Strabon est encore formel la-dessus : Αρμα τῆς Ταναγραϊκής κώμη...

1. Nous ne ferons sur ce chapitre qu'une observation de détail. M. B.-L. nous paraît attacher un peu trop d'importance à un texte du scholiaste de Pindare (Argum. des Pythiques, Boeckh, p. 297), d'après lequel Dionysos se serait assis le premier sur le trépied delphique Le même texte ne nous dit-il pas que la Nuit a été la première prophétesse de l'oracle? Et les traditions relatives à la succession des divinités prophétiques à Delphes ne sont-elles pas des plus variées? Ce texte ne saurait avoir la valeur de celui d'Eschyle au début des Euménides, ni même de celui de Pausanias (X, 5, 6). La version qu'il rapporte doit être d'origine relativement récente. Cf. A. Mommsen, Delphika, p. 117; Th. Schreiber, Apollon Pythoktonos, p. 21 (Engelmann, 1879).

ἑτέρα οὖσα τοῦ Ἄρματος τοῦ κατὰ τὴν Ἀττικὴν, ὅ ἐστι περὶ Φυλήν, δῆμον τῆς Ἀτ τικῆς ὅμορον τῇ Τανάγρα· ἐντεῦθεν δὲ ἡ παροιμία τὴν ἀρχὴν ἔσχεν ἡ λέγουσα ὁπόταν δι' Ἅρματος ἀστράψῃ.

Pag. 280. Peut-on dire que, chez Homère, le peuple des Songes habite à la porte des Champs-Elyséens? D'après l'Odyssée (XXIV, 11-13), ces fantômes occupent, au-delà des portes du Soleil, une région que les ombres des prétendants traversent avant d'arriver « à la prairie d'asphodèles. » Or, cette prairie est dans l'Erèbe et non dans les Champs Elyséens.

Pag. 352. Le type féminin de Bacchus ne peut s'expliquer par la parenté originaire du dieu avec les nymphes des fontaines. Ce type ne paraît pas, en effet, antérieur à Praxitèle, et l'on y reconnaît généralement l'influence asiatique. Le Bacchus archaïque est, au contraire, viril et barbu.

Pag. 361. Nous ne saurions accorder que la Grèce fût unanime à considérer les lois de Lycurgue comme émanant de Delphes. Il ressort du texte d'Hérodote, I, 65, que ce n'était pas là une tradition générale, puisqu'au rapport des Lacédémoniens (ὡς δὲ αὐτοὶ Λακεδαιμόνιοι λέγουσι), Lycurgue avait apporté sa législation de la Crète. Plus tard, Xénophon, si bien informé des choses de Sparte, assurait que l'oracle de Delphes a simplement donné son approbation aux lois de Lycurgue, qu'il ne les a pas dictées (Resp. Laced., VIII, 5). Plutarque, il est vrai, se range à la première opinion; mais peut-être a-t-il accepté trop facilement une tradition honorable pour le sacerdoce delphique où il comptait des amis. Son témoignage ne peut balancer ceux d'Hérodote ni de Xénophon. En tout cas, il y avait trois versions différentes au sujet de l'origine de la législation spartiate. Si nous insistons, c'est que M. B.-L. a cru trouver dans les passages de Plutarque, relatifs aux rhètres de Lycurgue, certains indices pour fixer approximativement l'époque où la divination chresmologique a commencé sur le Parnasse.

Ces menues observations 1 ne sauraient infirmer en rien la sérieuse valeur d'un ouvrage qui, une fois terminé, comptera sans doute parmi les plus considérables dont l'histoire de la civilisation gréco-romaine ait été l'objet; ouvrage où, dès maintenant, la pratique des rigoureuses métho

1. En voici d'autres plus menues encore. M. B.-L. est trop ami de l'exactitude la plus scrupuleuse pour ne pas nous les pardonner. - P. 131. Le texte de Pausanias, relatif à Parnassos, inventeur de l'ornithomancie, doit être indiqué, non pas X, 5, 5, mais X, 6, 1. Pag. 139, n. 2. Dans Plutarque, Quaest. Rom., 21, il n'est pas question de la répartition des oiseaux entre les dieux, mais seulement du pic et de son caractère fatidique chez les Romains. Pag. 280, n. 2, le passage indiqué de l'Iliade, X, 496, ne se rapporte pas au dñpos veípwv. Pag. 339, 1. 24, citation Pag. 350, 1. 8, assertion qui aurait besoin

intéressante sans indication de source.

d'être confirmée par des textes.

Enfin, il est à regretter que M. B.-L. n'ait pas indiqué les éditions dont il s'est servi pour chaque auteur, ou, tout au moins, les pages des éditions consacrées. La vérification des textes deviendrait ainsi plus facile.

des de l'érudition s'allie à l'élévation philosophique des pensées et à de remarquables qualités de style. Quiconque étudie l'antiquité ne pourra se dispenser d'avoir sous la main l'Histoire de la divination. Nous nous permettons cependant d'en conseiller plus spécialement la lecture aux esprits chagrins qui paraissent craindre que la jeune Université, en inclinant de plus en plus vers les recherches savantes, n'en vienne à perdre le sentiment littéraire et à oublier l'art de bien dire.

Le second et le troisième volumes, qui paraîtront très prochainement, seront consacrés aux sacerdoces divinatoires et aux oracles de la Grèce. Le quatrième traitera plus tard de la divination italique. A en juger par le plan général que M. Bouché-Leclercq a placé en tête de l'ouvrage, ces volumes promettent d'être plus intéressants encore que leur aîné. Nous attendons avec confiance l'heureux achèvement de ce vaste monument. P. DECHARME.

234.

Xenophons Dialog Пept olxovoplag in seiner ursprünglichen Ge. stalt. Text und Abhandlungen von Karl LINCKE. Jena, Frommann, 1879. 1 vol. in-8° de 163 pages. Prix: 3 mark (3 fr. 75).

I

— Xénophon, Economique : chapitres i à xi. Texte grec accompagné d'une introduction (par A. Pierron), d'une analyse de l'ouvrage complet et de notes en français, par Ch. GRAUX. Paris, Hachette, 1879 (2o tirage). 1 vol. in-16 de 103 pages. – Qua rei criticae tractandae ratione Hellenicon Xenophontis tex. tus constituendus sit, par O. RIEMANN. (Thèse de doctorat présentée à la Faculté des Lettres de Paris.) Paris, Thorin, 1879. 1 vol. grand in-8° de 104 pages.

M. Lincke pense que l'Economique et les Mémorables (dont l'Economique, dans la pensée de son auteur, aurait été destiné à devenir partie intégrante), ainsi que le traité De la chasse et la Cyropédie, sont des œuvres posthumes de Xénophon. L'éditeur serait le même pour les quatre ouvrages. M. L. croit bien le connaître; ce serait le petit-fils de Xénophon, qui portait le même nom que lui, le fils de son fils Gryllus, ce Xénophon le Jeune dont il est fait mention chez Diogène Laërce (2, 52) et que Photius range parmi les historiens formés à l'école d'Isocrate (Bibliothèque, 260). Ce jeune et présomptueux écrivain aurait rendu à son grand-père le mauvais service de faire subir à des oeuvres de lui encore inédites, quoique parfaitement prêtes pour la publication, des interpolations considérables, comme on va voir. M. L. a reconnu ces interpolations; il a déterminé très exactement les endroits où cesse la main de Xénophon et ceux où elle reprend; il est parfaitement au courant du style et des habitudes de langage du téméraire éditeur; il retranche l'œuvre du petit-fils de celle du grand père, et publie pour la première fois l'Economique de Xénophon l'Ancien, tel qu'aurait dû l'éditer Xénophon le Jeune, c'est-à-dire fidèlement, pieusement, sans rien changer ni ajouter au manuscrit du défunt. A cela se borne la prétention de M. Lincke. En fait,

A

pour rendre à l'Economique « sa forme originelle », il commence par supprimer les chapitres (moins la première phrase), iv, v, et les onze premiers numéros du chapitre vi. C'est là la plus importante des différences que présente l'édition de M. L. par rapport à celle de Xénophon le Jeune dont nous nous servons habituellement. M. L. rejette encore le chapitre xxi et dernier, l'une des plus belles pages qui se puissent lire dans tout l'œuvre de Xénophon (l'Ancien). Enfin, il prononce une dizaine d'autres athétèses, ne portant généralement que sur de moindres morceaux de six ou huit phrases chacun. Tout en étant de ceux qui ne doutent point que le texte de l'Economique ne soit gâté par la présence de certaines intrusions dont quelques-unes peuvent avoir une étendue comparable à plusieurs des petites suppressions de M. L., nous n'hésitons pas à penser que M. L. fait fausse route. Comme il ne s'appuie sur aucun argument net et probant, mais qu'il fait intervenir mille considérations diverses de peu de poids et quelquefois saugrenues, avec lesquelles il s'imagine construire un habile échafaudage d'indices qui lui tiennent lieu de preuve, il faudrait, pour réfuter sa thèse, faire un livre presque aussi gros que le sien. Nous n'écrirons pas ce livre, dont l'utilité ne nous est pas démontrée. On aime à croire que M. L. se flatte en espérant convaincre ne fût-ce qu'un seul philologue tant soit peu raisonnable. Reconnaissons d'ailleurs que l'effort fait par M. Lincke pour reconstituer le texte original de l'Economique, n'aura pas été, il faut bien l'espérer, entièrement dépensé en pure perte, mais doit avoir nécessairement pour effet d'attirer l'attention des critiques sur plus d'une difficulté qui n'avait pas encore été traitée.

Notre édition des onze premiers chapitres de l'Economique, que nous venons présenter nous-même au lecteur, est une petite édition destinée aux classes. Elle ne contient que les onze premiers chapitres, parce que ces onze chapitres ont été seuls inscrits aux programmes officiels, et que, par suite, l'éditeur, pour une raison commerciale dont il est aisé de se rendre compte, tenait à ne pas offrir aux élèves un livre qui contînt une partie qui ne devait pas servir. Il n'y avait point de motifs pour n'inscrire aux programmes que la première moitié de l'Economique, et il y en a, au contraire, d'excellents pour que, revenant sur une décision généralement blâmée, l'autorité supérieure prescrive, au premier renouvellement des programmes, l'Economique tout entier comme matière d'explication pour la classe de rhétorique. La seconde partie de ce petit traité contient en effet un exposé très clair et très instructif des travaux de la ferme et de la culture de la terre. Cet exposé n'est pas trop technique pour être accessible à toutes les intelligences, d'emblée et sans préparation spéciale; Critobule s'est attaché à le présenter à Socrate de la manière la plus simple et la plus facile à comprendre, témoin Socrate qui lui dit à la fin de l'entretien (21, 1): Ὑπέθου γὰρ τὴν γεωργικὴν τέχνην πασῶν εἶναι εὐμαθεστάτην, καὶ νῦν ἐγὼ ἐκ πάντων ὧν εἴρηκας τοῦθ ̓ οὕτως ἔχειν

παντάπασιν ὑπὸ σοῦ ἀναπέπεισμαι. Nos jeunes rhetoriciens trouveraient dans l'explication de ces pages une bonne occasion de fixer leur imagination sur le récit plein de bon sens, simplement et sobrement écrit, de faits journaliers et qu'il est bon de connaître. L'élévation morale et l'observation philosophique ne sont pas absentes de ces pages je n'en veux pour preuve que le chapitre final, auquel je faisais déjà allusion tout à l'heure en parlant des athétèses de M. Lincke, sur le talent, suprême et divin, de commander aux hommes. Je ne sais point de lecture plus saine pour des écoliers. Espérons qu'ils n'en seront plus longtemps privés.

Pour en revenir à notre fragment d'édition de l'Economique, voici quels principes on a cru devoir suivre pour en constituer le texte, ce qui est, sans contredit, la partie la plus délicate comme aussi de beaucoup la plus importante dans une édition de classe. On est parti des collations de manuscrits publiées par M. C. Schenkl dans ses Xenophontis opera (Berlin, Weidmann, 1876) et Xenophontische Studien (Comptes rendus de l'académie de Vienne, t. LXXXIII, 1876). L'appréciation que le même a faite (Xen. op., 1. 1.) de la valeur de ses différents mss. a paru bonne et l'on s'y est tenu. Mais son texte a paru renfermer en maints endroits des conjectures trop peu certaines. On a fait la part très large aux corrections méthodiques, et en partie évidentes, proposées par les critiques dans divers livres et recueils, surtout à celles de l'illustre Cobet, qui a rendu assurément les plus grands services au texte de bien d'autres auteurs, mais en particulier à celui de Xénophon (Variae lectiones, passim, sqq.; Novae lectiones, p. 568-601 sqq.); en quelques endroits très peu nombreux, on a essayé de remédier par des conjectures nouvelles aux altérations qu'on croyait reconnaître. On s'est surtout attaché à n'imprimer, autant que possible, aucune phrase qui ne donnât un sens de tout point satisfaisant: et s'il s'est rencontré dans tel passage quelque locus desperatus, on a eu soin de prévenir, par une note, que la phrase en question était manifestement altérée. Ce qu'il faut éviter, à notre avis, par dessus toute chose, c'est d'exposer élèves ou maîtres à chercher, et qui pis est, peut-être à trouver le sens d'une phrase qui, dans l'état d'altération où elle nous est transmise, n'en a pas; et il est encore bien fâcheux de laisser dans un texte classique de ces phrases qui, prises en elles-mêmes, semblent se comprendre et qui, tout compte fait, ne conviennent pas au contexte. Ces deux sortes de phrases, celles qui n'ont pas de sens du tout et celles qui font un faux sens, sont quelquefois l'occasion de beaux triomphes pour les interprètes ingénieux : triomphes chèrement achetés, qui répondent à autant d'entorses données à la grammaire ou au bon sens. En somme, il est naturel d'être plus réservé quand il s'agit d'admettre une conjecture, qui fait le sens, mais qui pour d'autres raisons peut être sujette au doute, dans le texte d'une édition destinée aux savants (d'ailleurs munie au bas des pages d'un apparat critique), que dans une édition qui sera lue dans les écoles et doit tendre, par conséquent, à être aussi lisible que possible.

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