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gue où se trouvent ces reliques a donc été ajouté à l'Epistola, soit par le copiste qui l'a réuni à l'ouvrage de Robert de Saint-Remi, soit par un remanieur plus ancien au cas où le ms. d'Angers serait indépendant du texte vulgaire. L'un ou l'autre a fort bien pu supprimer de la liste, avec le sans façon des clercs du temps, cette mention devenue gênante après la découverte d'Antioche. Même quand il n'en serait pas ainsi, quand le texte primitif de l'Epistola aurait contenu le catalogue des reliques dominicales et que dans ce catalogue aurait déjà manqué la sainte lance', l'hypothèse d'une omission fortuite serait encore trop acceptable 2 pour qu'on fût, par cela seul, obligé à faire descendre la lettre de quelques années au-dessous de la date que tout lui assigne 3.

Malgré ce que je regarde comme une erreur, le mémoire de M. Riant est aussi utile qu'érudit. Grâce à lui, l'Epistola restera comme un cu. rieux spécimen des idées qui passaient, vers la fin du xre siècle, par la tête de quelques clercs français; mais elle cessera d'être alléguée comme un texte historique et de fournir des traits frappants à la peinture de l'Etat byzantin au moment où les croisades allaient le mettre dans une relation si intime, si soudaine et si violente avec l'Occident 4.

G. P.

223.

Ueber das Somnium Viridarlı, ein Beitrag zur Geschichte der Literatur über Kirche und Staat im 14ten Jahrhundert, von Dr phil. Carl. Müller, Tübingen, 1877, in-8° de 72 p.

M. Ch. Müller, en faisant des recherches en vue d'une histoire sur la lutte de Louis de Bavière avec la curie romaine, histoire dont, pour le dire en passant, le premier volume vient de paraître, a été amené à étudier l'ouvrage connu sous le nom du Somnium Viridarii, le Songe du Vergier. Il a eu pour l'apprécier la connaissance de documents dont jusqu'à présent on n'avait guère fait usage. Cela donne à son mémoire une importance capitale. On ne pourra plus, ce me semble, parler du

1. Il y avait encore une autre sainte lance, dont Charlemagne, d'après la tradition, avait fait la sienne et que le roi de France Hugues envoya en présent au roi d'Angleterre Athelstan (Voy. Hist. poét. de Charlemagne, p. 374).

2. M. R. a mentionné comme possibles les hypothèses de l'omission fortuite et de la suppression postérieure de la lance; mais il ne s'y est pas arrêté (p. li).

3. L'auteur du prologue placé en tête du texte vulgaire de l'Epistola l'attribue à la quatrième année avant la croisade, c'est-à-dire 1092 : cet écart de deux ans n'a naturellement pas d'importance.

4. Jé m'étonne que M. Riant, dans une note d'ailleurs fort savante (p. xxv), attribue encore la prise de Barbastro, en 1065 (lisez 1064), à « Guillaume au Court-Nez, comte de Montreuil. » Guillaume de Montreuil n'était pas comte de Montreuil; il n'a absolument rien à faire avec Guillaume au court nez, et ce n'est pas lui, mais Robert Crespin, qui prit Barbastro en 1064 (voy. Romania, t. I, p. 182).

Songe du Vergier, sans en tenir compte, et, à ce titre, il doit être signalé a l'attention des érudits de notre pays.

Sur tous les points controversés, l'auteur du livre, la date de sa composition, l'antériorité de la rédaction latine à la rédaction française, etc., M. Ch. M. est d'accord avec M. Paulin Paris; seulement aux raisons données par le savant français, il en ajoute d'autres qui sont peut-être encore plus décisives. Ce n'est pas cependant sur ces discussions que je veux insister; il me suffit d'en indiquer l'importance. La partie de ce mémoire sur laquelle il convient surtout d'appeler l'attention, partie qui est tout à fait neuve, est celle dans laquelle il est question du mode de composition du Somnium Viridarii.

On s'était déjà douté que cet écrit était une compilation. Cette opinion fort vague jusqu'à présent, M. M. en a démontré la vérité, et a établi par des faits précis dans quel sens il faut l'entendre. La plupart des arguments, pour ne pas dire tous les arguments proposés dans le Songe du Vergier, aussi bien ceux du clerc que ceux du chevalier, sont empruntés à des écrits dont M. M. donne les titres et nomme les auteurs, quand ils sont connus (page 6). Les arguments mis dans la bouche du clerc sont, en général, empruntés à Thomas d'Aquin, à Pierre Bertrand, évêque d'Autun, et à la bulle du pape contre Michel Cesena ; ceux du chevalier, à Nicolas Oresme, à Pierre de Cugnière, à Michel Cesena et à Guill. Occam. Ils sont souvent des reproductions littérales des écrits mis à contribution par Philippe de Maisières, parfois aussi des imitations ou des résumés. M. M. ne s'en est pas tenu à ces généralités, déjà cependant fort instructives. Il a dressé un tableau comparatif en deux colonnes (pag. 6-19) des passages correspondants du Somnium Viridarii et des écrits imités ou copiés; il indique les pages de l'un et des autres; parfois même il met en présence, dans des notes, les propres expressions des passages qui se correspondent. Ces comparaisons donnent à ce mémoire une valeur exceptionnelle et seraient d'un singulier intérêt, si on voulait les utiliser pour une nouvelle édition du Somnium Viridarii, dans laquelle on rapporterait in extenso, dans des notes, les passages imités ou copiés. Il faut évidemment avoir fait une étude approfondie des ouvrages qui furent écrits à l'occasion des démêlés de Louis de Bavière avec la cour de Rome, pour avoir pu atteindre à ce degré de précision.

Je laisse aux futurs historiens du Somnium Viridarii le soin de tirer les conséquences de ces curieuses découvertes de M. Ch. Müller. J'imagine qu'il en résultera de nouvelles vues sur ce livre, qui paraît avoir, de son temps, produit une certaine sensation, et que, à en juger par le grand nombre de copies manuscrites qui en existent encore, on eut probablement intérêt à répandre. L'auteur ne le donne pas pour un écrit de parti. Quoiqu'il ne cache pas son penchant pour la cause royale, on ne peut pas l'accuser d'affaiblir les raisons en faveur de la cour de Rome; on dirait qu'il est entièrement désintéressé dans la querelle, et qu'il lui

suffit de rapporter les arguments qu'on faisait valoir des deux côtés sur la question. Ce qui du moins est certain, c'est qu'après la longue discussion du clerc et du chevalier, il ne se prononce ni en faveur de l'un ni en faveur de l'autre. Peut-être croyait-il en avoir assez dit pour que la conclusion dût se présenter elle-même au lecteur.

M. N.

224. - Etudy o Molierie. Tartuffe. Istoria tipa i piesy. Monographia Aleksieia VESELOVSKAGO. I vol. in-8° de 216 pp. Moscou, 1879.

— Etudes sur Molière. Tartuffe. Histoire du type et de la pièce par Alexis VESELOVSKY.

Si une monographie de Tartuffe paraissait aujourd'hui à Paris, on soupçonnerait certainement l'auteur d'avoir voulu flatter les passions du moment; en voici une qui nous arrive de Moscou et qui est bien étrangère à nos polémiques éphémères. M. Alexis Veselovsky est un moliériste passionné et il a entrepris d'associer ses compatriotes au culte fervent qu'il professe pour notre grand comique. Nous pouvons attester de visu qu'il travaille depuis de longues années à son œuvre et qu'il a poussé la conscience jusqu'à venir chercher dans nos bibliothèques quelques notes inédites, quelques fragments oubliés ou échappés aux investi gations patientes de ses prédécesseurs. Pour apprécier un pareil travail, il faudrait une compétence qui nous manque; le livre de M. V. nous a beaucoup appris, mais nous n'avons rien à apprendre à son auteur. C'est assurément le travail le plus approfondi que nous ayons jamais lu sur l'immortel chef-d'œuvre. M. V. parle dignement de Molière et nous ne saurions mieux faire que de lui laisser un instant la parole.

« La période la plus féconde et la plus remarquable de la vie de Molière, dit-il dans son introduction, est celle où apparaissent successivement Tartuffe, Don Juan et le Misanthrope. Ces trois pièces constituent les trois parties d'une inimitable trilogie. Tartuffe démasque brutalement l'hypocrisie représentée par un directeur de conscience en robe courte; Don Juan flagelle l'hypocrisie du gentilhomme viveur et libertin; Alceste dénonce et flétrit cette hypocrisie mondaine qui dissimule sous un flux de paroles et d'embrassements les sentiments réels dont l'expression brutale rendrait toute société impossible. Tartuffe, arrêté à temps par la justice du roi, va expier ses infamies dans la prison où il méditait de faire enfermer son bienfaiteur. Don Juan est entraîné par la statue du commandeur dans l'abîme des flammes éternelles où plus tard la Révolution précipitera tout l'ordre social grâce auquel les Don Juan ont pu exister. Alceste, lui, échoue dans sa lutte contre la fourberie mondaine; il se retire du monde et il a raison; les hommes de sa trempe ne sont pas faits pour y vivre. »

C'est assurément une heureuse trouvaille que le rapprochement de ces trois chefs-d'œuvres. M. V. ne caractérise pas moins heureusement là

situation que la glorieuse trilogie occupe dans l'histoire générale de notre théâtre.

« Après de longs tâtonnements, le poète a enfin trouvé sa vraie voie; le rire joyeux fait place à la satire hardie; la comédie qui vivait jusqu'alors sur le fonds étranger du théâtre italien, s'émancipe et ose à son tour dire son mot; elle se développe en un tout artistique et indépendant; elle prend une importance sociale considérable. La ligne de démarcation que cette trilogie lui a fait franchir est nette et bien déterminée. D'un côté, sont groupées en désordre les innombrables productions des anciens comiques français, moitié farces, moitié comédies, les arlequinades italiennes arrangées à la française, parfois même par des Italiens comme Larrivé (Giunto); parmi elles, formant un contraste d'ailleurs assez faible quelques essais indépendants, deux ou trois comédies de Jodelet, de Scarron, de Corneille, enfin les premiers essais de Molière lui-même. Le style commence à s'élaborer, le sentiment de l'originalité s'éveille mais ce sont les types de convention qui prédominent.

C'est toujours le pédant, le docteur ignorant, le chicaneur, le soldat fanfaron; ils passent sans changer de caractère à travers les pièces les plus différentes, et gardent fidèlement les traditions qui remontent le plus souvent à Plaute ou à Térence.

<< Comme le tableau change quand on arrive à l'incomparable trilogie! Désormais résonne une libre parole qui s'attaque, non plus seulement aux faiblesses universelles, mais aux misères de la nation et de la société. La réalité a conquis ses droits; la scène se remplit de types vivants;... la comédie produit sur le spectateur une noble édification et agit directement sur lui. Ce n'est plus quelque miles gloriosus renouvelé de Plaute et tout simplement affublé d'un uniforme à la française, c'est l'aristocrate libertin, Don Juan; ce n'est plus l'ennuyeux bonhomme » de l'ancienne comédie, c'est le réformateur Alceste... Chaque nouvelle production entraîne après elle l'opinion publique et oblige le spectateur à réfléchir et à se connaître lui-même. » Le cadre de cette revue nous interdit de plus longues citations; disons seulement deux mots du plan de l'ouvrage.

M. V. commence par exposer l'état de la société française au milieu du xvn° siècle, les circonstances qui favorisèrent le développement de l'influence du clergé et spécialement des jésuites; il étudie le rôle des directeurs de conscience et montre quels abus rendaient une réaction nécessaire. Tout ce chapitre est écrit avec une connaissance approfondie de la littérature originale ou secondaire du sujet. Vient ensuite ce qu'on pourrait appeler la genèse littéraire du type de Tartuffe. M. V. recherche les origines de ce type dans tous les écrivains qui ont dépeint l'hypocrite, depuis Ovide et Properce jusqu'à Mathurin Regnier, depuis le Roman de la Rose jusqu'à Scarron, depuis Boccace et l'Aretin jusqu'aux nouvellistes espagnols et à Ben Johnson. Ici encore l'auteur fait preuve d'une érudition variée et d'un goût délicat. Le troisième chapitre étudie la question tant controversée de l'original de Tartuffe et se prononce en faveur de l'abbé Roquette. Un ingénieux parallèle entre Molière et Pascal mériterait d'être traduit tout entier. Vient enfin l'histoire de la pièce proprement dite, de ses divers remaniements, des vicissitudes et des persécutions qu'elle eut à subir. M. Veselovsky insiste encore en terminant sur l'étroite parenté de Tartuffe, de Don Juan et du Misanthrope. La reproduction d'une gravure assez rare du xvII° siècle, La femme Tartuffe, accompagne ce volume d'une exécution matérielle

392 d'ailleurs fort élégante. Espérons qu'un succès légitime encouragera l'au teur à poursuivre sur Molière les études que cet ouvrage a si heureusement inaugurées.

REVUE CRITIQue d'histoirE ET DE LITTÉRATURE

Louis LEGER.

ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES

Séance du 14 novembre 1879.

M. Joseph Halévy fait connaître par lettre qu'il est l'auteur d'un des deux mémoires récompensés par la commission du prix Bordin, sur la question dite du Panthéon assyrien.

M. de Saulcy annonce l'intention de communiquer prachainement à l'académie un mémoire de M. Ch. Tissot sur une inscription bilingue d'Afrique, libyque et néopunique.

M. Charles Nisard, continuant la lecture de son mémoire sur le poëme intitulé le Pataffio, autrefois attribué à Brunetto Latini, exprime l'opinion que le véritable auteur de ce poëme doit être Domenico di Giovanni, surnommé Burchiello. Il donne quelques détails sur la vie de ce Domenico di Giovanni, qui est connu d'ailleurs pour un poète de talent. Il naquit à Pise en 1403. Il était fils d'un barbierchirurgien, qui le fit étudier en médecine : lui-même exerça quelques temps le même état que son père. Il mena, dès son adolescence, une vie des plus désordonnées, et fut plusieurs fois condamné pour des méfaits de tout genre. Il s'était marié très jeune et eut trois enfants de sa femme; il abandonna sa femme et ses enfants. - Dans la prochaine séance, M. Nisard exposera les raisons par lesquelles il pense pouvoir établir que Domenico di Giovanni est l'auteur du Pataffio.

M. de Witte commence la lecture d'une lettre de M. François Lenormant, qui rend compte d'un voyage archéologique qu'il fait actuellement dans l'Italie méridionale. Après avoir parlé de plusieurs tombeaux qu'il a explorés, et des observations qu'il a faites sur diverses catégories de vases antiques, M. Lenormant donne des détails sur les musées et collections d'antiquités qui existent ou qui sont en voie de formation dans différentes villes de l'Italie méridionale, telles que Bari, Lecce, etc.

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Ouvrages déposés: G. CLÉMENT SIMON, La vicomté de Limoges, géographie et statistique féodales (Paris et Périgueux, in-8°); P. Ch. ROBERT, Sirona (extrait de la Revue celtique); Le baron DE ROSTAING, La marine militaire de la France sous Philippe le Bel (Paris, 1879, in-8°).

Présentés de la part des auteurs par M. de Saulcy: Etudes égyptologiques, t, I, romans et poésies du papyrus Harris no 400, par G. MASPERO, livr. I; — par M. Barbier de Meynard : — L'inscription de Barian, traduction et commentaire philologique par H. POGNON, attaché au ministère des affaires étrangères (XXXIXe fasc. de la Biblothèque de l'école pratique des hautes études); - par M. G. Perrot : 10 Ch. LUCAS, L'habitation lacustre à toutes les époques, conférence faite à l'exposition universelle; 2o Ed. Engelhardt, Du régime conventionnel des fleuves internationaux, études et projet de règlement général, préc. d'une introduction historique (Paris, 1879, in-80); - par M. Miller: PHILON de Byzance, Traité de fortifications, texte grec, traduction et notes, par MM. DE ROCHAS et Ch. GRAUX.

Julien HAVET.

Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.

Le Puy, typ. et lith. Marchessou fils, boulevard Saint-Laurent, 23.

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