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pire, les règles qui devaient présider à la reproduction des textes, et l'on ne peut qu'applaudir à cette mesure, qui tend à substituer une méthode conventionnelle et raisonnée à l'arbitraire ou au dilettantisme individuel.

Les deux premières œuvres historiques qu'il renferme, Frickart et Tschachtlan, sont éditées par le vénérable Dr G. Studer, qui avait déjà donné ses soins à l'édition de Mathias de Neuenbourg, et qui depuis a également publié la chronique de Conrad Justinger; la troisième a été révisée par le P. Nicolas Rädle, qui a pu donner un texte latin plus correct, grâce à une ancienne traduction allemande qu'il a eue à sa disposition.

Une table des noms de personnes et de lieux et des matières, et un petit glossaire des mots difficiles facilitent l'usage de ce volume qui, s'il ne donne pas de chronique inédite, offre du moins aux amis de l'histoire de Suisse des textes soigneusement élaborés et pourvus de tous les compléments recommandés par la critique moderne.

Si, pour l'histoire d'Alsace, Frickart, Tschachtlan et Gruyère n'ont pas l'importance de Mathias de Neuenbourg, le second de ces chroniqueurs, complété par les extraits de Schilling, donne du moins de la campagne que les Confédérés entreprirent, en 1468, dans le Sundgau pour secourir Mulhouse, un récit très animé qui mérite d'être signalé. X. MOSSMANN.

121. ―

Adrien Tournebus, lecteur royal, par M. LEGAY, conseiller à la Cour d'appel de Rouen, membre de la Société des Antiquaires de Normandie. Caen, F. Le Blanc-Hardel, in-8°, 51 p.

La notice de M. Legay, extraite du Bulletin de la Société des Antiquaires de Normandie, renferme, entre autres bonnes choses, deux discussions très nettes et très concluantes, l'une sur le nom, l'autre sur la religion de celui dont Michel de Montaigne a dit qu'il « sçavoit plus et sçavoit mieux qu'homme qui feust de son siècle, ny loing au delà ». Parlons d'abord du nom. M. L. donne (p. 5-6) une plaisante énumération des formes si diverses imposées à ce nom depuis Henri Estienne, qui tenait pour Tournebeuf, jusqu'à M. Charles Waddington, qui se prononce pour Adrien de Tournebu 1. S'appuyant sur un aveu du 3 octobre

1. Ménage croyait aussi que le vrai nom de famille était Tournebu (Menagiana, t. IV, p. 6). Je retrouve cette même forme dans l'Histoire généalogique de la maison des Chastaigners (Paris, 1634, in-8). André du Chesne dit (p. 305) que Louys de Chasteigner, seigneur d'Abain, « dès ses jeunes ans estudia en l'université de Paris, qui pour lors fleurissoit sur toutes les Académies de l'Europe, et y fut auditeur de deux très savans personnages, l'un desquels fut Adrien de Tournebu, vulgairement dit Turnèbe, l'autre Jean Daurat, poète et professeur du Roy, qui l'enseigna aussi quelque temps à la Rochepozay. >>

1578, découvert par le savant archiviste de la Seine-Inférieure, M. Charles de Beaurepaire, M. L. établit (p. 8) que le nom réel de l'éminent humaniste était bien celui qui lui est assigné dans cette pièce officielle, où nous lisons: «< Deffunt maistre Adrian Tournebus, en son vivant lecteur du Roy aux lettres grecques... » Quant à la religion, M. L. ne prouve pas avec moins de solidité que Tournebus mourut catholique. Réfutant encore ici M. Ch. Waddington 1, il montre successivement (p. 39-49) que si, le 12 juin 1565, le professeur du collège de France fut conduit au cimetière vers neuf heures du soir, c'est que c'était l'usage, au xvre siècle, d'inhumer les morts au milieu des premières ombres de la nuit; que si Tournebus demanda à être enterré sans pompe, ce désir s'explique par la modestie bien connue du grand érudit et aussi par la pauvreté d'un homme qui laissait quatre enfants et sa femme enceinte d'un cinquième; que si un huguenot inconnu placarda, le lendemain du décès, sur les murs du collège de Paris, quelques vers latins intitulés: Turnebianum Testamentum, où il faisait renier à Tournebus la religion catholique, un ami du défunt, un Soissonnais, Gabriel Goniard, protesta, non sans indignation, contre cette tentative d'accaparement des croyances de son coreligionnaire ; enfin, ajoute-t-il, le collègue et l'intime ami de Tournebus, le docte Léger-Duchesne, dans le discours qu'il prononça, peu de jours après, du haut de sa chaire du Collège royal 3, affirma solennellement que Tournebus n'avait jamais cessé d'appartenir à l'Eglise catholique, qu'il avait, devant des milliers de témoins, reçu le sacrement de l'eucharistie, à Sainte-Geneviève, aux dernières fêtes de Pâques, qu'il avait la constante habitude d'assister non-seulement à la messe, mais encore aux offices du soir, etc. S'il m'était permis de joindre un argument à tous les arguments dont M. L. se sert avec une si vigoureuse logique, je dirais qu'une sorte de certificat de catholicisme a été donné par le très peu tolérant Pierre de Ronsard à son ami dans le sonnet intitulé: Sur le trépas d'Adrien Turnèbe, lecteur du Roi, l'honneur des lettres de son temps. Jamais Ronsard n'aurait consenti à célé

1. «< De nos jours encore, » dit M. L. (p. 39), « le protestantisme français soutient avec une grande vivacité que Tournebus est mort en reniant le culte de ses pères. M. Waddington est le dernier avocat qui ait plaidé cette cause, à notre connaissance du moins. Sa notice résume fidèlement tous les arguments mis en avant, mais, malgré l'habileté de son exposition, la critique impartiale ne saurait accepter ses conclusions. » M. L. conteste aussi, contre M. Waddington, dont le travail a paru dans le Bulletin de la Société de l'histoire du protestantisme français (3° année, no 12), que Tournebus soit né de parents nobles et surtout qu'il ait eu pour père un gentilhomme écossais qui serait venu s'établir en Normandie (p. 5 et 6).

2. Voir la dissertation spéciale de J. H, de Seelen sur la religion de Turnèbe dans ses Selecta Litteraria (Lubeck, 1726, in-8o).

3. Oratio funebris de vita interitu Adr. Turnebi, habita Lutetiæ in regio auditorio, anno Domini 1565, mense decembri per Leodogarium a Quercu. En tête de l'édition des œuvres de Tournebus, Strasbourg, 1600.

brer en termes aussi magnifiques1 la gloire d'un adversaire religieux, et cet éloge funèbre de Tournebus me paraît encore plus significatif que l'attestation délivrée par un de ses anciens et de ses plus remarquables disciples, Gilbert Genebrard, le futur archevêque d'Aix.

Il y a bien d'autres passages curieux dans la notice du savant magistrat, notamment le récit (p. 17) du voyage de découvertes littéraires entrepris, à la fin de 1545, par Tournebus et par son maître Pierre Galland. Comme de fins limiers (veluti canes sagaces), les deux amis fouillèrent avec succès les bibliothèques des monastères de Flandre, et ils trouvèrent à Saint-Omer, en l'abbaye de Saint-Bertin, un manuscrit de Lucrèce, qui, cédé plus tard à Lambin, lui fut des plus utiles pour la préparation de son édition du De natura rerum (1564). On lira aussi avec intérêt les détails fournis par M. L. sur le mariage de Tournebus avec Magdeleine Clément (p. 18), sur sa polémique contre Ramus (p. 21-14), sur quelques-uns de ses opuscules les moins connus 2, sur ses Adversaria (p. 32-33) 3, sur ses vers au chancelier de l'Hôpital (p. 34) 4, sur son épître (p. 35-37) contre l'enseignement des jésuites (ad Sotericum gratis docentem), etc.

M. L. a formé le projet de compléter sa notice sur Tournebus et de transformer un simple opuscule en un ouvrage fort étendu. Je souhaite qu'il trouve soit en Normandie, soit à Paris, bon nombre de documents inédits qui l'aident à mieux nous faire connaître la biographie de celui

I.

Comme la mer, sa louange est sans rive,

Sans bord son los, qui luit comme un flambeau.
D'un si grand homme il ne faut qu'on escripve:
Sans nos escripts son nom est assez beau.

2. Parmi ces opuscules figure une petite dissertation contre le vin qui a été louée par Morhof (Polyhistor, lib. V. Cap. 1), et par Crenius (Anim. phil. et hist., p. 63). mentionnés l'un et l'autre dans les Eloges des hommes savans d'Ant. Teissier, où les citations sur Tournebus sont d'une extrême abondance (t. II, p. 211-221). M. L. apprécie bien spirituellement en ces termes (p. 26) la dissertation qui parut pour la première fois en 1600, dans les œuvres complètes : « Quant à son traité De Vino, s'il était traduit en français, je ne désespérerais pas de voir nos Sociétés de tempérance s'en emparer pour leur propagande. Si notre professeur ne connaissait, en fait de hauts crus, que ceux des Andelys ou de Neaufle, il est après tout bien excusable. » 3. M. L. dit (p. 32): « Scaliger, si nous en croyons Baillet, considérait les Adversaria comme un embryon... » Pourquoi s'en tenir à un livre de seconde main tel que les Jugemens des savans et ne pas puiser directement à la source, au Prima Scaligerana (édition de 1740, p. 163)? Cf. l'article Turnebus du Secunda Scaligerana (p. 604-605). Voir aussi quelques mots sur Tournebus dans le Joseph Justus Scaliger de M. Jacob Bernays (Berlin, 1855, in-8°, pp. 7, 208, 258, 291). M. L. a négligé le Pithoeana où il aurait trouvé quelques particularités sur son héros, et notamment cet éloge : « Les quatre plus grands hommes de notre siècle sont Cujas, Ranconnet, Scaliger, Turnèbe; le reste ne sont que vendeurs de coquilles.

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4. << Bien avant le discours de Loyseau sur l'abus des justices de village, » dit M. L. de Tournebus (p. 34), « il signalait, dans une épître en vers latins au chancelier de l'Hôpital, la nécessité de faire disparaître toutes ces juridictions municipales et seigneuriales, devenues accablantes pour le peuple. »

que la Croix du Maine appelait « ce tant renommé Adrian Turnèbe 1». Mais, en dehors des manuscrits, que de recherches à faire dans les œuvres des contemporains, notamment dans les poésies de George Buchanan et dans les commentaires d'Elie Vinet! Et que de recherches même à faire parmi les propres œuvres de Tournebus, par exemple, au sujet de cette satire dont ne parle pas M. Legay et que, selon le témoignage d'Antoine du Verdier 2, il lança contre le gascon Pierre Paschal, lequel, comme historiographe de France, avait 1,200 livres de gages, tandis que le Professeur royal n'en avait que le tiers, bien qu'il méritát trois fois davantage!

T. DE L.

122,— La littérature allemande dans les temps modernes par Ferdinand LOISE, membre des Académies royales de Belgique et d'Espagne. I vol. in-8°, 400 pages. Paris, Sandoz et Fischbacher, 1879. - Prix : 6 fr.

Après une revue sommaire de la littérature allemande au xvIIe siècle et dans la première moitié du xvi, M. Loise, arrivé à peu près au deuxième quart de son ouvrage, traite de Klopstock jusqu'à la moitié environ, puis de Lessing jusqu'à la fin. La littérature allemande dans les temps modernes passe sous silence Wieland, Herder, Schiller, Goethe... rien cependant n'annonce que ce volume doive avoir une suite.

L'auteur a divisé son travail en nombreux paragraphes numérotés en tête par des chiffres romains de grande dimension; il y en a souvent deux et quelquefois trois à la page. Dans les manuels où ce numérotage est employé, il a pour but de classer plus rigoureusement les matières; mais M. L. s'en sert aussi pour encadrer les pensées diverses que lui suggère l'exposition des faits : « O dix-neuvième siècle, siècle de l'industrie et de la politique, siècle des arts qui parlent aux yeux et à l'oreille, et qui t'intitules fastueusement le siècle des lumières quand l'aveugle science cherche à effacer Dieu du front du soleil, tu as eu tes grandeurs, mais tu ne te couches pas dans ta gloire, car ton éclat n'est que ténèbres devant les immortelles splendeurs de l'art souverain qui élève l'esprit aux vérités éternelles ! Eloignons-nous d'un temps sans poésie et remontons à Klopstock » (page 92, paragraphe vi). Je pourrais citer bien d'autres digressions, où M. L. « épanche », comme il s'exprime luiméme en parlant de Klopstock, « son sentimentalisme éjaculatoire et lyrique » (p. 107).

Le style de M. L. est figuré. On connaît l'image célèbre attribuée à un de nos éminents contemporains : « La philosophie est une béquille à la

1. A l'article Odet Turnebe ou Turnebu, et selon autres de Tournebœuf (t. II, 1772, p. 203).

2. A l'article Pierre Paschal (t. III, 1773, p. 310). M. L. n'a pas cité le chapitre sur Tournebns des Hommes illustres de Thevet.

lueur de laquelle nous naviguons sur le bord d'un volcan »; M. L. écrit avec non moins d'éclat (page 54): « Il est heureux pour l'espèce humaine que les rêveurs philanthropiques et les philosophes de l'absurde ne séduisent jamais assez les peuples pour être appelés à tenir les rênes de l'Etat, et que leur génie égaré soit impuissant à refaire l'oeuvre de Dieu sur le modèle de conceptions insensées enfantées dans la fièvre d'un cerveau malade confiné au fond d'un cabinet de travail, d'où s'exhale la fumée d'un orgueil qui vogue sans boussole, au gré de tous les vents de doctrine, sur la mer sans fond de l'erreur. >>

J'ai abrégé d'une ligne cette phrase, et ce n'est pas la plus longue du livre. Page 31, il y en a une de trente-cinq lignes et demie, composant à elle seule un paragraphe entier. Il est naturel de supposer que l'auteur de ces constructions laborieuses a pensé en allemand; M. L. habite un pays de langue française qui confine à l'Allemagne si son livre est un effort pour traduire en français, à l'usage de ses compatriotes, la pensée germanique, l'intention au moins est louable, et voilà matière à compliments pour une critique qui, en restant sincère, voudrait être gracieuse. Malheureusement, l'auteur n'est pas aussi imbu qu'on serait disposé à le croire de pensée et de littérature allemande. Il nous apprend bien qu'il vient d'achever la lecture de la Messiade « aujourd'hui 17 février 1876 » (p. 85); mais dans ses jugements et dans ses doctrines, il ne s'inspire guère que de nos écrivains et paraphrase dans un style ampoulé MM. Bossert et Heinrich '.

P. S.

1. J'ajoute quelques remarques à l'article de notre collaborateur: il faut lire : p. 29. Harsdorfer et non Hardorffer; p. 29, Hofmann et non Hoffman; p. 35, on nomme toujours le chef de la seconde école de Silésie Hofmannswaldau et non Hofmann; p. 39, en parlant de Brockes, il vaut mieux citer son Irdisches Vergnügen in Gott que ses traductions; p. 43, lire Lauremberg et non Laurenberg ; p. 44, on trouve le nom de Jean Grob de Toggenbourg, il faut dire simplement Jean Grob (il était né à Lichtensteig dans le pays de Toggenbourg); même page, pourquoi dire Schuppius et non Schupp? p. 61, le prénom de Mme Gottsched est Victorie, ce qu'on ne peut traduire par Victorine; p. 63, 64, 67, lire Schonaich et non Schonaick; p. 71-75, il fallait citer, parmi les romans de Gellert, la « Comtesse suédoise » (Die schwedische Graefin); p. 75, lire le Renommist et non le Renommiste; p. 76, lire Withof et non Witthoff; p. 77, il y a là de légères erreurs, en 1729 Haller est établi à Berne comme médecin, en 1735 il obtint une place, en 1736 il est appelé à l'université de Goettingue (pourquoi dire Gættingen?); p. 91, lire Schulpforta et non Sculpforta; p. 191, il faut éviter le terme de Hainbund qui n'a jamais été employé par les membres de l'école de Gættingue; p. III, la traduction de Klopstock, par M. de Carlowitz n'est pas « sérieuse » et ne nous paraît pas « écrite avec un soin pieux »; p. 187, note, Mana n'est pas « un des héros tutélaires de la Germanie »; c'est le Mannus dont parle Tacite (celebrant carminibus antiquis Tuistonem deum et filium Mannum, Germanie, II); p. 188, note, Hela serait le « Pluton scandinave »; mais Klopstock dit lui-même dans une note qu'« elle règne dans les tristes contrées, où sont, après la mort, ceux qui ne meurent pas après la bataille », et il la nomme dans la même pièce, Hela, Vergelterin, déesse vengeresse (et non « qui punit »); P. 216, 305, lire Mendelssohn et non Mendelsonn; p. 240, M. Loise aurait pu citer 1 nom

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