Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

des noms appellatifs, sont prononcés autrement, ceci provient de ce qu'on voulait donner à la première lettre de chaque nom des voyelles, la voyelle même que ce nom devait désigner.

Nous passons maintenant aux trois dernières voyelles, dont il était moins urgent de doter le texte, puisque le yôd et le waw s'y trouvaient souvent écrits. Cependant le caractère sacré de l'Ecriture s'opposait à ce qu'on écrivit plene les mots pour lequel la tradition avait constitué une scriptio defectiva. On finit donc par avoir recours à l'autre moyen graphique usité parmi les Orientaux, aux points. On plaçait le point au-dessous de la lettre pour l'i, au-dessus d'elle pour l'ô, et au milieu de la lettre pour l'ou (u). Pour l'ou, on n'avait cette dernière ressource que lorsqu'il y avait un waw derrière la consonne; dans les autres cas, la place était déjà prise par le dâgésch (signe de redoublement), qui était donc antérieur à l'introduction des signes des voyelles. On plaçait alors trois points (、) au-dessous de la lettre, ce qui, à notre sens, n'est qu'une manière typique d'indiquer le point du milieu, en le plaçant entre deux autres points'. D'autre part, dans la ponctuation babylonienne, qui occupe toujours le dessus des lettres, l'i est présenté par un point au-dessus de la lettre, l'ô, par un second point au-dessus du premier ( . ) et l'ou par une petite barre verticale ( 1 ), évidemment un petit waw, qu'on préférait à la notation par trois points superposés.

Les trois noms adoptés par ces trois voyelles, sont encore empruntés à des racines qui s'appliquent aux sons, émis par les dents ou les lèvres. L'i est nommé hîrék, parce que hárak signifie grincer ou produire un son aigu avec les dents (Ps., xxxv, 16; Job, xvi 9; Lam., 11, 16); hâlam, d'où vient le nom de hôlém pour l'ô, veut dire comprimer, et on trouve l'expression zimnîn dehâlîm sifwátéh « souvent il presse ses livres », (Chôlin, 123); enfin, pour le nom de schourék, qui désigne l'ou (u), on peut citer le Targoum de Lam., п, 15, 16: scherickou besifwathon « ils sifflaient avec leurs lèvres ». Les trois derniers noms sont donc comme les quatre premiers empruntés aux mouvements faits par les organes pour produire les sons.

Ces sept noms se trouvent, que nous sachions, réunis pour la première fois chez Saadia (930) dans son commentaire arabe sur le Sêfer Yesîrâh 2. Ils sont les seuls noms authentiques. Car le nom de schébér qu'on rencontre plus tard, n'est que la traduction du kesra arabe, et il a disparu de nos grammaires; le nom de kibbous pour schourék, est également un produit étranger, l'équivalent du dhamma arabe; et, en se maintenant à côté du nom hébreu pour constituer une différence entre l'ou représenté par le point dans le waw et l'ou, représenté par les trois points au-dessous de la lettre, il a créé pendant longtemps une regrettable confusion dans l'exposé de la phonétique hébraïque.

1. Nous avons déjà donné cette origine du Schourék, Journ. as., 1866, II, p. 413,

note.

2. Le passage est cité en entier dans mon Manuel du lecteur, p. 207, note.

Comme conclusion à notre article, nous soutenons donc : 1° que ni les signes ni les noms des voyelles n'étaient connus par les docteurs avant le VIIIe siècle; 2° que le système des points-voyelles est sorti des écoles élémentaires, où les maîtres s'en servaient pour l'instruction des jeunes enfants; 3° que les Massorètes l'ont trouvé à peu près fixé et arrêté, lorsqu'ils s'en sont emparés pour le régler et en écarter les erreurs de prononciation qui pouvaient s'y être glissées; 4o que les signes consistent soit en caractères de lettres, réduits et altérés, soit en points différemment disposés; 5° que ces signes sont pour le fond identiques dans les deux ponctuations, palestinienne et babylonienne; 6° qu'on peut distinguer d'abord l'époque l'on a indiqué le dágèsch, puis celle des quatre premières voyelles, et en dernier lieu, celle où l'on a introduit dans le texte les trois dernières voyelles; enfin 7° que les noms des voyelles, désignant divers mouvements de la bouche, étaient à l'origine des impératifs, qui recommandaient aux enfants la forme qu'ils devaient donner à leurs organes pour produire les sons.

Joseph DERENbourg.

116.

[ocr errors]

La duchesse d'Aiguillon, nièce du cardinal de Richelieu, sa vie et ses œuvres charitables, 1604.1678, par A. BONNEAU-ÂVENANT, lauréat de l'Académie. Paris, Didier, 1879, in-8° de 492 p. Prix : 8 fr.

M. A. Bonneau-Avenant est l'auteur d'un ouvrage sur Mme de Miramion, sa vie et ses œuvres charitables, qu'a naguère couronné l'Académie française. Je ne serais pas surpris que le même honneur fût réservé à son livre sur la fille adoptive du fondateur de l'illustre compagnie. Outre que le sujet choisi semble appeler la récompense, la biographie de la duchesse d'Aiguillon est une de ces honnêtes publications auxquelles on ne peut refuser son estime. L'auteur n'est ni un grand érudit, ni un grand écrivain, mais les bons et beaux sentiments dont il est animé se reflètent dans presque toutes les pages de sa monographie; la vertu, la charité reçoivent de lui des hommages sans nombre; c'est un homme de bien qui a voulu faire un livre plus moral qu'attrayant, et qui y a parfaitement réussi.

M. B.-A. éprouve la plus vive sympathie, la plus vive admiration pour son héroïne, et voici comment il résume (préface, p. 11, 111) les éloges dont il comble en tout le volume cette grande chrétienne, comme il l'appelle «< Rien n'est plus ignoré et plus méconnu que son caractère et les événements particuliers de sa vie. Ce fut cependant une existence pleine d'intérêt, que celle de la nièce du grand cardinal, existence malheureuse, partagée presque également entre le monde, qu'elle n'aimait pas, mais au milieu duquel son rang l'obligeait à vivre, et le cloître, où elle aurait été s'ensevelir si l'autorité de son oncle ne lui en eût fermé les portes. Orpheline dès l'enfance, mariée contre son goût, veuve presque

en même temps qu'épouse, et privée des joies de la maternité, la duchesse a connu toutes les douleurs. Elle a eu tous les dévouements, et elle n'a recueilli que l'ingratitude; car ses neveux, qu'elle avait élevés comme ses enfants, ont causé ses plus vifs chagrins. Fille adoptive d'un ministre presque roi, elle a occupé longtemps, auprès de lui, une place digne d'envie. Mais, semblable à l'ange de la clémence assis près de la justice (1), Mme d'Aiguillon n'a profité de son crédit que pour intercéder en faveur des coupables, consoler les affligés et secourir les pauvres. »

On a là le ton du livre ou plutôt du panégyrique. Quelqu'un a dit que c'était l'oraison funèbre de Fléchier délayée en 500 pages. L'épigramme est injuste, mais elle montre, en l'exagérant, le défaut principal du biographe. Il a trop cru à la perfection de la nièce du cardinal et il a trop insisté sur cette perfection. Les saints eux-mêmes sont fragiles. Pourquoi donc attribuer l'impeccabilité à une personne qui a été calomniée, je le veux bien, mais qui, comme les meilleures et les plus respectables femmes, mêlait, sans aucun doute, quelques faiblesses à ses exquises qualités? N'oublions pas le mot vulgaire : qui veut trop prouver ne prouve rien, et, dans les plus légitimes glorifications, faisons toujours la part du diable.

M. B.-A., se servant de quelques documents des archives de la maison de Richelieu, qui ont été mis à sa disposition par le marquis de Chabrillan, petit-fils du dernier duc d'Aiguillon, et de quelques autres documents des dépôts publics de Paris et de Poitiers, mais se servant beaucoup plus encore des mémoires contemporains, nous donne tour à tour des détails plus exacts que nouveaux sur l'enfance de Mile de Pontcourlay, sur la vie de la jeune fille au château de Richelieu, sur ses affectueuses relations avec son oncle et tuteur l'évêque de Luçon, sur son mariage avec le marquis de Combalet, sur son prompt veuvage, sur sa nomination de dame d'atours de la reine-mère, sur son exil de la cour, sur la tentative d'enlèvement dont elle fut l'objet, sur la protection qu'elle se plut à accorder au grand Corneille, sur le duché-pairie d'Aiguillon érigé en sa faveur, sur ce qui passa autour d'elle pendant la dernière campagne de Richelieu, sur les soins dont elle entoura son oncle mourant, sur sa présence à la cour d'Anne d'Autriche, sur sa vie pendant la Fronde, sur son rôle de gouverneur du Havre, enfin sur ses dernières années.

Autour du portrait en pied de la duchesse d'Aiguillon sans cesse retouché et sans cesse embelli, M. B.-A. a placé un grand nombre de petits portraits, de médaillons, notamment ceux de la mère de Richelieu (Suzanne de la Porte), de son père, le grand prévôt de France, de Mme de Pontcourlay, la sœur du futur ministre, de Louis XIII, du cardi. nal de Bérulle, du Père Joseph, du comte de Béthune, des carmélites Mile de Fontaines et Mme de Bréauté, de Marie de Médicis, du comte de Soissons, du cardinal de la Valette, de Voiture, de Gombauld, de Saint

1. Je souligne cette figure de rhétorique, sur laquelle j'aurai l'occasion de revenir.

Vincent de Paul, de Mile de Rambouillet, du duc de Richelieu, etc. La plupart de ces personnages sont si connus, qu'il était inutile de les peindre de nouveau, même en raccourci.

M. B.-A. est aussi un peintre de paysages. C'est ainsi que nous lui devons la description (p. 7-9) du château de Glénay, « dont nul touriste n'a encore révélé la poétique existence » 1, celle du château de Richelieu (p. 22), celle de la forêt de Milly (p. 92) et du château du même nom (p. 94), descriptions dont il faut rapprocher celle du tombeau de M. et de Mme de Pontcourlay (p. 124-125) et celle de l'hôtel (le PetitLuxembourg) qu'occupa la duchesse d'Aiguillon dans la dernière moitié de sa vie (p. 349-351).

Ce que l'on goûtera peut-être le plus dans le gros volume de M. B.-A., c'est une douzaine de documents inédits. Le premier que l'on rencontre (p. 5) est aussi le plus intéressant de tous : je veux parler d'une lettre de Henri IV, écrite avec le plus aimable entrain, à un gentilhomme (Louis de La Rochejacquelein), qui était le frère utérin du baron de Pontcourlay, père de la duchesse d'Aiguillon 2. Indiquons encore (p. 31, 32) deux lettres de Suzanne de La Porte, l'une qui provient de la collection d'autographes du baron de Girardot et l'autre qui est parmi les manuscrits de la bibliothèque de Poitiers, deux lettres de Mme de Combalet à son intime ami le cardinal de la Valette (p. 231, 238), extraites des collections de la Bibliothèque nationale (Supplément français, no 910), une lettre de la même au cardinal Mazarin (Collection Baluze), enfin divers billets qu'elle écrivit à Mme de Sablé (p. 438-440) et qui nous ont été conservés dans les célèbres portefeuilles du docteur Valant. L'ouvrage renferme beaucoup d'autres documents que l'on pourrait, au premier abord, croire inédits, car M. B.-A. ne les cite que d'après les originaux de la Bibliothèque nationale. Mais, en y regardant de près, on reconnaît un grand nombre de pièces déjà publiées dans les Lettres, instructions diplomatiques et papiers d'Etat du cardinal de Richelieu 3. Evidem

1. M. B.-A. nous apprend (p. 7) que c'est dans cette demeure, située entre Bressuire et Thouars, et non point à Paris, comme on le croit généralement, qu'était née, vers la fin de 1604, Marie-Madeleine de Wignerod. En revanche, comme il le rappelle, le cardinal, que l'on a souvent fait naître au château de Richelieu, en Poitou, vit le jour à Paris, rue du Bouloi, le 9 septembre 1585.

2. Cette lettre, où manquent la date et le lieu, est autographe et appartient au marquis de La Rochejacquelein, député de Bressuire. Elle n'a pas été connue des éditeurs du Recueil des lettres missives. Voir (t. IX, p. 273, 274) trois lettres adressées par Henri IV à ce même Louis de La Rochejacquelein, et qui proviennent des Archives de la famille de La Rochejacquelein.

3. La lettre de Richelieu à sa sœur, de novembrè 1611 (p. 13-14), est dans le tome I, p. 74; sa lettre à la reine-mère, d'avril 1616 (p. 36-37), est dans le même tome I, p. 169; sa lettre à M. de Béthune (p. 83) est encore dans ce même tome I, p. 647; sa lettre à Mme de Combalet, du 27 janvier 1630 (p. 160), est dans le tome III, p. 526; sa lettre à Me de Brézé, du 12 novembre 1630 (p. 185), est dans le tome IV, p. 532; sa lettre au cardinal de la Valette, mal datée du 3 novembre 1630 (p. 258), est dans le tome VI, p. 232, avec la bonne date du 4 novembre 1638, etc.

ment M. B.-A. n'a voulu tromper personne, et c'est par inadvertance qu'il n'a pas, au bas de chaque lettre déjà imprimée, renvoyé son lecteur au recueil de M. Avenel.

[ocr errors]

Je n'ai pas remarqué de considérables erreurs dans la vie de la duchesse d'Aiguillon. En voici quelques petites : l'auteur (p. 39) donne pour parrains au cardinal de Richelieu « deux maréchaux de France, le duc d'Aumont et le comte de Gontaut-Biron ». Le maréchal de Biron (Armand de Gontaut) n'eut jamais le titre de comte; il resta baron toute sa vie. Ce fut pour son fils, Charles de Gontaut, que la baronnie de Biron fut érigée en duché-pairie (1598). Nous lisons (p. 98): « Malheureusement, M. de Combalet mourut plus tristement encore que ne le croyait Bassompierre, car le Mercure de France et Toiras affirment qu'après avoir été blessé grièvement le 3 septembre, et relevé parmi les morts, il reprit connaissance et fut porté dans la ville pour y recevoir les secours que réclamait son état, mais que, loin d'y trouver les soins que l'humanité commande envers un ennemi désarmé, il y fut tué de sang-froid par les huguenots. » Le Mercure de France n'existait pas en 1622 et le recueil dont veut parler M. B.-A. est le Mercure françois de Richer, suite de la Chronologie septenaire de Palma Cayet. Quant à Toiras, il n'a jamais rien affirmé sur le cas de M. de Combalet. M. B.-A. doit avoir confondu le vaillant capitaine avec l'historien de ce capitaine, Michel Baudier. L'assassinat de M. de Combalet est, du reste, très douteux, comme M. B.-A. peut s'en assurer en lisant une excellente note du dernier éditeur de Bassompierre, M. de Chantérac 1. Le duc de Montmorency ne fut pas (p. 187) « arrêté à Lectoure, tandis que Monsieur po sait bas les armes ». Il fut arrêté, couvert de blessures, sur le champ de bataille même de Castelnaudary, et il fut conduit par le vainqueur, le maréchal de Schomberg, au château de Lectoure, dont le marquis de Roquelaure était gouverneur, et d'où, un peu plus tard, le complice de Gaston fut transféré à Toulouse pour y être jugé et décapité (30 octobre).- Une erreur plus grave est celle que commet M. B.-A. (p. 348), quand il nomme Balzac parmi << les hommes de lettres que Mme d'Aiguillon se plaisait à recevoir », après qu'elle fut de retour à Paris (1646). L'auteur du Socrate chrétien ne mit jamais les pieds chez la nièce du cardinal de Richelieu, ni avant ni après 1646. Il ne fit pas un seul voyage à Paris dans les dix dernières années de sa vie, et quand même il ne se fut pas confiné, selon l'expression de l'abbé d'Olivet, dans sa terre de Balzac, on ne l'eût pas compté au nombre des visiteurs du Petit-Luxembourg, car il détestait de tout son cœur la maîtresse du logis 2.

1. Journal de ma vie, Mémoires du maréchal de Bassompierre publiés pour la Société de l'histoire de France, t. II, 1875, Appendice, p. 429-430.

2. Le 25 mars 1644, Balzac (Mélanges historiques de la Collection des documents inédits, nouvelle série, t. I, 1873, p. 505) écrivait à Chapelain : « Que pensez-vous du procès que Monseigneur son père [le père du Grand Condé] a intenté contre notre princesse au teint de safran [la duchesse d'Aiguillon]? Mais comment le

« ZurückWeiter »