sance des monuments, symbolique de l'art et iconographie; 10. Sciences accessoires qui fournissent leur concours à l'archéologie. Nous craignons que les termes mêmes de cette nomenclature, avec leur aspect pédantesque et insolite, ne causent quelque effroi au public français. L'auteur y tient beaucoup, comme le montre une phrase du prospectus', et toute cette partie témoigne d'une grande puissance de réflexion; c'est elle qui a dû coûter à M. S. le plus d'effort et de peine. Nous serions pourtant bien étonné que, même en Allemagne, cette portion de l'ouvrage échappât à la critique; quant à nous, dût-on nous accuser de frivolité, nous trouvons qu'il y a là trop de définitions et de distinctions, trop de divisions et d'abstractions. Cette introduction aurait beaucoup gagné, selon nous, à être moins scolastique de forme, à exiger du lecteur une moindre tension d'esprit. Sans doute il fallait définir les termes qui seraient employés dans le courant de l'ouvrage et indiquer les divisions entre lesquelles seraient répartis les faits et les idées qu'il contiendrait; mais cela ne pouvait-il se faire dans une langue courante et claire, sans composés tirés du grec ni terminologie kantienne? Passe encore pour les idées qu'expose l'auteur sur l'étendue et les caractères de la science qu'il étudie, sur les différents chapitres qu'elle comporte quand on veut l'embrasser sous tous ses aspects; certaines intelligences, qui se plaisent à l'abstraction, aimeront à trouver ainsi définis et classés tous les phénomènes qui se rattachent à l’art, c'est-àdire à la faculté que l'homme possède d'exprimer ses idées par des formes sensibles. Où il y a décidément abus, selon nous, c'est dans le développement donné aux notes de ces deux premiers chapitres, dans la critique des définitions et des classifications jusqu'ici proposées. Les premiers écrivains qui ont touché à ces matières ne pouvaient, cela se comprend, avoir à ce sujet des idées aussi nettes que le seront aujourd'hui celles de l'historien de l'art. Etait-il bien utile de discuter par le menu toutes leurs théories, de relever leurs erreurs, de faire des citations empruntées à des travaux où nous n'avons pas maintenant grand chose à prendre? Toute cette première moitié du premier livre est philosophique et dogmatique; or, quand il s'agit de faire la théorie d'une science, ce qui importe surtout, c'est que cette théorie s'applique à tous les faits connus et établisse entre eux des rapports faciles à saisir. Qu'elle s'accorde plus ou moins avec les théories antérieures, cela n'a qu'un intérêt très secondaire. M. S. aurait eu grand avantage, croyons-nous, à beaucoup élaguer dans les notes de ces deux chapitres, à ne toucher qu'aux plus considérables des tentatives qui avaient été faites avant lui. Il a prodigieusement 1. « On trouvera peut-être l'aperçu des principes de l'esthétique d'après Winckelmann trop long ou même superfiu; mais l'auteur croit cette partie nécessaire pour exposer et son point de vue à lui et les tendances particulières des savants éminents qui l'ont précédé. Il ne se contentera jamais de l'empirisme pur; il ne fera pas non plus une esthétique populaire, mais il suivra la méthode des grands philosophes allemands, inaugurée par Leibniz et par Kant. » lu ; mais c'eût été tout profit qu'il égarât quelques-unes des notes prises dans ses lectures. On serait arrivé plus vite et avec moins de fatigue à ce qui est le vrai sujet du livre, l'histoire de l'art antique. Nous ne pouvons, au contraire, qu'approuver le développement donné à l'Histoire des études archéologiques (chapitre n du livre I, S 1214). Comme le fait remarquer M. S., « c'est là un chapitre tout nouveau de la science ; c'est seulement dans ces dernières années que l'attention a été appelée de ce côté et que les matériaux de cette histoire ont été recueillis. Il eût été peut-être plus agréable à l'auteur de publier séparément ses nombreuses recherches sur certaines personnes et sur certaines époques; mais ceux qui savent vraiment à quoi s'en tenir sur l'importance et l'intérêt de ces études lui sauront gré d'avoir fait l'essai d'une exposition complète. Il mettra un soin particulier à combler les lacunes de cette partie, si une seconde édition lui en fournit l'occasion. Un aperçu de l'histoire de la science offre par lui-même de grands avantages; de plus, il nous enseigne à apprécier les efforts des hommes qui ont avant nous travaillé à constituer la science que nous aimons. Enfin, en mettant à sa place chronologique chaque érudit et en nous fournissant les moyens de juger son rôle et ses ouvrages, il permettra d'alléger une autre partie du livre, la description des monuments et l'histoire de leur découverte ; il nous débarrassera ainsi de cette foule de citations et de titres d'ouvrages qui, dans le livre d'Ottfried Müller, nous empêchent si souvent de poursuivre l'idée générale. » M. S. aurait pu ajouter que pour former l'archéologue, pour l'aiguillonner et le retenir tout à la fois, il n'est rien de meilleur que cette étude de l'histoire de la science ; l'expérience des générations qui se sont succédé s'ajoute ainsi à celle de l'individu et supplée à ce qu'elle a de nécessairement insuffisant et borné; les fautes commises par ses prédécesseurs et leurs coups de bonheur ou de génie contribuent également à lui montrer la vraie voie, à lui enseigner la méthode à suivre. Le passé l'aide à prévoir et à préparer l'avenir. Nous ne pouvons donc que louer une innovation qui suffirait, ce nous semble, à justifier la publication de ce manuel et à en assurer le succès. Pour pouvoir réunir autant de données exactes et précises, dont beaucoup ont été tirées d'ouvrages devenus aujourd'hui très rares, il a fallu des recherches qui ont dû être poursuivies avec une rare patience pendant bien des années ; nulle part ailleurs on ne trouverait un pareil ensemble de faits bien classés, de documents authentiques et bien digérés. Nous ne doutons pas que le livre n'arrive bientôt à la nouvelle édition sur laquelle l'auteur compte pour insérer en leur lieu les noms et les oeuvres qui auraient pu lui échapper dans un si long travail ; il aura alors bien des renseignements précieux à tirer de l'ouvrage que M. Müntz publie sur les arts à la cour des papes. Quelque précieux que puissent être les renseignements qu'il gagnera ainsi, on a là dès maintenant l’esquisse, le canevas très ferme et très serré d'une histoire de l'archéologie qui irait depuis le premier éveil de la Renaissance jusqu'à nos jours. Pour ce qui est de la suite de l'ouvrage, nous ne pouvons mieux faire que de continuer à traduire les indications du prospectus : « La seconde partie du premier volume contiendra le livre II et le livre III, d'abord les sources où l'on puise les connaissances archéologiques, la critique et l'herméneutique, puis la théorie de l'art antique. La critique et l'herméneutique partent des témoignages littéraires et passent ensuite aux témoignages épigraphiques, c'està-dire à ceux qui ont trait, d'une manière quelconque, aux ouvrages de l'art; elles traitent enfin, en détail, des monuments de tout genre qui relèvent des arts du dessin ; elles nous informent de leur distribution locale et nous apprennent où aller les chercher (topographie et muséographie). Les principes de l’herméneutique archéogique seront démontrés par quelques exemples frappants; on y fera voir comment la recherche archéologique va à son but par l'emploi méthodique de tous les documents qui ont trait â l'art ancien et à ses productions les plus intéressantes. « Dans la théorie de l'art antique, on trouvera la théorie de la technique, celle du style, des formes, de la composition et des idées de l'art, enfin quelques données sur l'éducation et les études des artistes ainsi que sur les habitudes et les exigences du public pour lequel ils travaillaient. Ce sont là les points de vue principaux auxquels on peut se placer pour envisager les objets d'art, en corrigeant par la critique les erreurs auxquelles pourrait entraîner une interprétation trop servile des textes anciens acceptés en bloc et sans contrôle; autant que possible, on conservera pourtant, dans cette exposition, les termes spéciaux que les anciens employaient. L'auteur s'occupe, sans se laisser distraire par d'autres travaux, de la composition de ces deux livres; ce sont là justement des domaines de l'archéologie auxquels Ottfried Müller n'a pas touché, et qui, après lui, n'ont pas fourni la matière de travaux spéciaux. « Le second volume de l'ouvrage contiendra l'histoire de l'art antique dans le sens spécial de ce mot. Aucune date n'y sera assignéc à un monument qui ne soit confirmée par des textes ou suggérée par des inductions plausibles. Le tableau de chaque époque sera précédé d'une introduction où sera exposé, pour la même époque, l'état de la civilisation. L'exposé historique se divise en trois parties : « Fremière époque de l'art antique, exposé de l'art grec primitif et de l'art italique, de leurs rapports entre eux et avec l'art européen en général, ainsi qu'avec l'art sémitique et l’art oriental en général. a Deuxième époque : l’art hellénique proprement dit (la période archaïque, les siècles de Périclès et d'Alexandre). « Troisième époque : l'art hellénistique, comme on dit aujourd'hui, et celui de l'empire romain. « Le troisième volume contiendra la typologie (statistique des monuments d'après les idées qu'ils représentent et mythologie de l'art). On se fondera sur les résultats de l'histoire et de la théorie de l'art pour ramener tous les monuments connus à leurs types principaux; une fois ces types définis et classés, il sera plus facile d'assigner aux monuments nouveaux, qui se découvriront d'année en année, leur place dans les séries ainsi établies; on pourra se dispenser de longues explications souvent nécessaires aujourd'hui. Pour tout ce qui concerne l'illustration, au moyen de figures, des idées exposées dans cette partie, sur les variations des types que l'art a successivement adoptés pour chaque divinité, on renverra à l'ouvrage d'Overbeck, qui est maintenant en cours de publication chez le même éditeur 1. » M. Stark termine cette annonce en nous informant de sa volonté bien arrêtée de consacrer au prompt achèvement de son livre tout ce que lui 1. Griechische Kunstmythologie. Besonderer Theil. Il n'avait encore paru de l'ouvrage d'Overbeck, à la fin de l'année dernière, que quatre livres, consacrés à Zeus, Hera, Poseidon, Déméter et Kora. L'atlas, très-riche, mais d'un format bien incommode (grand in-fo impérial) marche de pair avec la publication du texte. laisseront de loisir des devoirs multiples et une santé que le travail a déjà souvent ébranlée; nous ne pouvons que prendre acte de ces promesses et souhaiter vivement que rien ne vienne en retarder l'accomplissement. Nous ne croyons pas que le nouveau manuel fasse tomber dans l'oubli celui d'Ottfried Müller, dont le plan est plus simple et qui, malgré ses lacunes et ses défauts, gardera toujours le caractère et les mérites d'une cuvre supérieure, née dans une heure propice; mais il n'en deviendra pas moins indispensable à quiconque voudra s'initier aux études archéologiques et se mettre au courant de la science. Nous ne pouvons juger les parties encore publiées ; mais l'étude de ce premier fascicule nous autorise à adresser une prière à l'érudit qui a entrepris cette tâche si lourde et qui s'y est préparé avec une si religieuse conscience. Quand il s'agira de définir soit les différents styles de l'art, soit les différents types divins créés par l'imagination grecque, qu'il se rapproche, autant que possible, du style simple et ferme qu'Ottfried Müller garde partout en pareille matière, qu'il évite cet excès d'abstraction qui doit rendre pénible, même pour un Allemand, la lecture de ses premiers chapitres, qui, en tout cas, rebutera plus d'un étranger et présenterait de grandes difficultés à qui voudrait entreprendre la traduction d'un ouvrage que sa sérieuse valeur rend digne d'être mis, par de fidèles versions, à la portée des savants de l'Europe entière. G. PERROT. 112. BONET-MAURY, Gérard de Groote, un précurseur de la Réforme au XIV siècle, d'après des documents inédits. Paris, Sandoz et Fischbacher. 1878. 100 pages. Le travail, dont nous venons d'écrire le titre, est une thèse de licence présentée à la faculté de théologie protestante de Paris. Nous souhaitons à cette école beaucoup de thèses pareilles. Mais comme toute thèse, même la meilleure, est faite pour être discutée, nous soumettrons à l'auteur quelques observations. P. 9. M. Bonet semble croire encore que l'Eglise a dû la plus grande partie de ses richesses aux donations, inspirées par les terreurs de l'an mil. Il est facile de montrer combien cette opinion est exagérée. P. 10. Dès la seconde moitié du xive siècle les provinces septentrionales des Pays-Bas « se sont distinguées par leur amour de la science philologique et leur patiente érudition ». On désirerait en avoir une preuve. P. 10. et p. 60. M. B., quand il parle des auteurs anciens que l'on a connus au moyen âge, ne manque pas de dire « les classiques grecs et latins. » C'est un lapsus; il n'ignore pas qu'en Occident la connaissance du grec était perdue, et que, si l'on a eu quelques ouvrages d'auteurs grecs, on ne les a eus qu'en traductions latines. P. 14. Tauler n'est l'auteur ni d'un traité de la vie et de la passion de Jésus-Christ ni d'Institutions divines. Ces deux ouvrages sont des compilations, auxquelles on a donné mal à propos son nom. P. 15. Ruysbroek n'a pas dédié ses Noces spirituelles aux amis de Dieu du Haut-Rhin, il leur en a envoyé une copie. P. 41. « La bulle, dite extravagante, d'Urbain V... » M. B. ignoret-il ce qu'en langage canonique on appelle les Extravagantes? P. 65. On ne dit pas « les bulles Clémentines ». P. 76. Comment Pierre Schott, ammeister de Strasbourg, a-t-il pu envoyer à l'école de Deventer le westphalien Louis Dringen berg, inconnu en Alsace avant son arrivée à Schlestadt comme recteur de l'école de cette ville ? Et où M. B. a-t-il trouvé qu'en 1517 cette école a compté neuf cents élèves ? Ces critiques ne portent que sur des détails ; nous les avons faites pour rappeler à M. B., qui a d'excellentes qualités pour devenir historien, que le détail ne doit jamais être négligé. Cela ne nous empêche pas de recommander son travail comme une dissertation bien faite sur un sujet peu connu en France. M. B. a passé quelques années en Hollande; il a profité de ce séjour pour étudier les sources manuscrites et les ouvrages hollandais qui se rapportent à Gérard Groote et à son ouvre; il a pu nous communiquer ainsi plusieurs faits nouveaux ; comme appendice il donne quelques pièces inédites. Groote, en fondant les confréries de la vie commune et la congrégation des chanoines réguliers de Windesheim, et en conseillant aux frères de se vouer à l'instruction de la jeunesse et à la copie de manuscrits, a rendu des services que M. B. a su remettre en lumière d'une manière fort intéressante. Les écoles des frères ont prospéré jusqu'à la fin du moyen âge; il en est sorti plusieurs des principaux restaurateurs des lettres. M. B. dit que l'invention de l'imprimerie mit fin à leur activité comme copistes; il aurait pu ajouter qu'ils s'empressèrent de se servir du moyen nouveau pour multiplier les · livres ; à Cologne, par exemple, une des premières presses fut établie dans la maison de la vie commune. L'ouvrage de M. Bonet était terminé quand parut, dans l'Encyclopédie allemande de Herzog, un article de quatre-vingts pages sur le même sujet par M. C. Hirsche; les deux travaux se complètent l'un l'autre. C. S. 113. La Confédération des huit cantons, étude historique sur la Suisse au xive siècle, par Edouard Favre. Leipzig, Veit & Co, 1879, in-8°, XII-122 pp. Prix : 3 mark (3 fr. 75). C'est entre les batailles de Morat et de Sempach que les trois cantons d'Uri, de Schwitz et d'Unterwalden ont étendu leur alliance à Lucerne, à Zurich, à Glaris, à Zug et à Berne. Les événements qui se sont accomplis pendant cette période, ont une importance capitale pour l'histoire |