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honorable et aussi consciencieuse. Je dois dire aussi tout de suite que ce livre n'est pas une œuvre de science désintéressée, mais une œuvre de polémique. A ce titre, il sort quelque peu du cadre où la Revue prétend se renfermer.

M. P.-V., effrayé des prétentions du catholicisme contemporain, s'est proposé de montrer, par l'étude des documents évangéliques eux-mêmes, la fragilité des bases sur lesquelles repose l'Eglise. Il s'acquitte de cette tâche avec beaucoup de méthode, avec une sûreté d'information trèslouable, avec une constante modération de ton, plus digne encore d'éloge. Dans sa première partie, prenant l'un après l'autre les quatre Evangiles canoniques, il montre l'excessive fragilité des témoignages sur lesquels repose leur origine apostolique; dans la seconde, il fait ressortir les divergences irremédiables qu'une exégèse de parti-pris s'efforce en vain de pallier. Il fait voir que, sur les points où l'accord serait le plus souhaitable pour la cause qu'il combat, l'écart entre les divers récits admis dans les livres sacrés va jusqu'à la contradiction la plus palpable.

Nous ne pouvons nous défendre d'un sentiment à la fois d'impatience et d'amertume quand nous lisons des livres tels que celui de M. P.-V. : d'impatience, parce que nous voyons un homme de talent, capable de produire une œuvre originale, retenu par les soucis de la polémique; d'amertume, parce que cette polémique est stérile à l'égard de personnes qui, selon l'expression de M. Havet, reproduite par l'auteur, ne cherchent pas << des raisons de croire, mais des prétextes. » Là où le sens de la vérité est faussé par un long usage, la discussion n'est plus qu'une perte de temps et de peine : elle ne pourrait porter ses fruits qu'en présence d'une génération qui n'aurait pas subi la contrainte dogmatique de l'éducation actuelle. Tant que le goût du vrai ne sera pas respecté dans la jeunesse, M. Pierre-Victor aura beau prouver cent fois que deux plus trois ne font pas quatre, il parlera dans le désert.

Maurice VERNES.

108. De verbis denominativis linguæ bactricæ scripsit Eugenius WILHELM, Phil. doctor, Gymnasii Jenensis professor. E programmate gymnasii separatim editum. Eisenach, J. Bacmeister. In-4°, 24 pages.- Prix: 1 mark (1 fr. 25).

Voici une monographie faite avec beaucoup de soin sur un point bien défini de la grammaire zende. Il serait à désirer, et il serait temps, que l'on commençât ainsi à étudier les différents ordres de faits grammaticaux, dans un but purement grammatical. Jusqu'ici l'on a étudié le zend pour les textes plus que pour la langue. M. Wilhelm étudie dans cette brochure les verbes dénominatifs : il les divise, d'après la classification suivie par M. Delbrück dans son étude sur le verbe védique, en dénominatifs formés d'un thème substantif par adjonction du suffixe ya, en causatifs proprement dits et en dénominatifs formés du thème substantif sans nou

veau suffixe. Son objet principal est de faire ressortir les rapports des dénominatifs zends avec les dénominatifs védiques. C'est là un point de vue intéressant sans doute; mais la démonstration de l'étroite parenté du zend et du védique n'est plus à faire, et peut-être aurait-il été plus instructif de montrer les rapports des dénominatifs zends avec le verbe persan moderne. On sait que pour une grande part le verbe persan, dans son thème comme dans ses désinences, dérive, non de la forme simple du verbe ancien, mais de sa forme dénominative. Sans entrer dans le détail de la question, le simple rapprochement des formes néo-persanes eût jeté un grand jour sur le développement purement iranien et, par là même, rehaussé par contraste le prix des comparaisons védiques, en marquant nettement les tendances différentes des deux courants. Contentons-nous d'indiquer ce côté de la question, et de signaler l'utilité qu'aura pour une étude historique de la langue iranienne le matériel recueilli par M. Wilhelm. Mais, même dans les limites où il se renferme, son travail ne manque point d'intérêt. Ses comparaisons védiques sont toujours sages et çà et là il concilie avec beaucoup de sens l'école traditionnaliste et l'école védique (p. ex., s. ishudy). Les énumérations sont complètes; les traductions ne sont pas assez personnelles et pèchent parfois par le vague. Tel quel, c'est un travail fort estimable.

James DARMESTETER.

109. Index Lucilianus. Supplementum editionis Lachmannianae confecit Franciscus HARDER. Berlin, Reimer, 1878, Iv et 68 p. in-8°.— Prix : 1 mark (1 fr. 25).

Cet index bien complet des mots employés par Lucilius est destiné à faciliter les recherches dans l'édition de Lachmann, publiée en 1876 par M. Vahlen 1. Il était d'autant plus nécessaire que les fragments du satirique sont ordonnés un peu arbitrairement dans toutes les éditions.

M. Harder a apporté tout le soin désirable à ce travail; les mots ne sont pas rangés sèchement dans l'ordre alphabétique, mais accompagnés le plus souvent des expressions qui les entourent et les expliquent; quelquefois le vers entier a dû être cité. Ainsi (p. 17): « Cum de me ista foris sermonibu' differs » permet de voir le sens particulier du verbe differo daus ce passage sans être obligé de chercher le vers 913 dans l'é

dition.

M. H. a eu la précaution, tout à fait indispensable pour un Index de Lucilius, de mettre un astérique à la suite des mots qui n'existent que par les conjectures nouvelles insérées dans l'édition de Lachmann, et une croix à côté des « voces aperte corruptas », c'est-à-dire des mots supposés corrompus par l'éditeur. Il va sans dire que, parmi ces derniers mots, il s'en

1. Voy. Revue critique, nouv. série, t. III, p. 137 (3 mars 1877).

trouve peut-être qui ont plus le droit de cité dans Lucilius que d'autres marqués de l'astérique 1, mais M. H. n'est pas responsable de ces attributions, et, le plan adopté, il faut reconnaître qu'il s'est acquitté de sa tâche avec conscience et exactitude.

E. C.

110.

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Eugippii vita sancti Severini, recensuit et adnotavit H. SAUPPE (Pars posterior tomi auctorum antiquissimorum ex monumentis Germaniæ historicis). Berlin, Weidmann. 1877, xvii et 36 pp. in-4°. Prlx 1 mark 60 (2 fr.).

La vie de saint Séverin par son disciple Eugippius est un des plus précieux documents qui existent pour l'histoire de la fin du v° siècle. Elle nous présente un tableau très-vivant de la société romaine des frontières de l'Empire au moment où les barbares font irruption de toutes parts et où les Romains doivent céder graduellement la place aux envahisseurs. C'est ainsi que nous les voyons, dans la Vita Severini, quitter Passau pour Laureacum, puis Laureacum pour Faviana. Nul fonctionnaire romain, sauf sans doute les magistrats municipaux, ne semble être resté dans le pays, et l'autorité paraît être aux mains des chefs Rugiens qui protègent les habitants du Norique contre leurs compatriotes, Hérules, Goths ou Thuringiens, et aussi de saint Séverin, qui exerce, par ses vertus et par le prestige religieux, une sorte de magistrature morale sur les barbares comme sur les Romains. Car cette vie de saint est le récit des progrès du christianisme en même temps que celui de la décadence de l'Empire. Séverin est venu du fond de l'Orient, immédiatement après la mort d'Attila, pour prêcher la foi chrétienne sur les bords du Danube. Il y fonde de nombreux monastères; pénétré de cette indifférence aux destinées de l'Empire qui inspirait aux chrétiens le dédain de la vie terrestre et ému de la sympathie instinctive qui les attirait vers les barbares, il est l'ami des chefs Germains; il les pousse même à l'assaut du monde romain par d'imprudentes prophéties. Quel tableau que celui d'Odoacre entrant dans la cellule de Séverin (ch. ví), couvert de peau de bêtes et obligé de courber sa haute taille pour ne pas heurter les poutres du plafond: «< Va en Italie, lui dit le saint, va; toi qui es maintenant vêtu de viles peaux de bêtes, bientôt tu combleras de bienfaits un grand nombre d'hommes. >> Il ne faut sans doute pas prendre au pied de la lettre tout ce que nous raconte le naïf et enthousiaste hagiographe. On s'étonne de voir un critique de la valeur de M. Wattenbach (Deutschlands Geschichtsquellen,

1. Ainsi aptas † (vs. 333), quoique entouré de mots incertains, doit être authentique, Nonius (p. 235 Merc.) citant le vers de Lucil. pour un sens de Aptum. De même artemo † (vs. 985), banni par Lachmann comme ne pouvant entrer dans un hexamètre, pouvait figurer à la fin d'un iambique. Au contraire, beaucoup de créations de Lachmann, comme epigrammation * (vs. 300), distichum * (vs. 301), etc., auraient mérité de n'être mentionnées qu'entre crochets. Mais il suffit que le lecteur soit averti.

4o éd., I, 40) admirer la vie sérieuse et religieuse qu'on menait aux bords du Danube au ve siècle, sous la conduite de saint Séverin, en la comparant à la frivolité et à l'immoralité des villes de la Gaule contre lesquelles tonne le prêtre Salvien. Il oublie que Salvien est un prédicateur qui s'est donné pour but de flétrir les vices et d'appeler les hommes à la repentance, et qu'Eugippius est un biographe qui s'est proposé de vanter l'influence de son maître et les succès de sa prédication. Si nous avions des sermons de saint Séverin, il est probable que nous y trouverions des peintures, aussi vives que celles de Salvien, de la corruption et des vices qui l'entouraient. Mais, en dépit des exagérations habituelles aux hagiographes, la vie de saint Séverin n'en est pas moins un document historique de la plus haute valeur, et M. Sauppe pense avec raison que l'ordre chronologique des faits y a été respecté.

L'édition de M. S. est la première qui mérite le nom d'édition critique. L'édition des Scriptores rerum Austriacarum, I, 64, s'appuie sur des mss. sans valeur, en particulier celui de Melk; Kirschbaumer, dans l'édition donnée à Schaffouse en 1852, s'est servi, mais avec une grande négligence, du ms. du Latran; enfin l'édition donnée en 1866 par Friederich, dans le premier volume de son Histoire de l'Eglise en Allemagne, est établie d'après des manuscrits de Munich qui n'ont aucune autorité. M. S. montre que trois manuscrits, celui du Latran, celui du Vatican 5772 provenant du monastère de Bobbio, et celui de l'Ambrosienne de Milan, sont dérivés d'un manuscrit primitif et peuvent servir à le reconstituer. Le meilleur est celui du Latran.

Eugippius, dont Cassiodore nous dit (Divinae lectiones, ch. xxIII) qu'il était «< non usque adeo saecularibus litteris eruditus », commet, en effet, beaucoup de fautes de latin et emploie, surtout pour les noms propres, des formes de bas latin. Nous remarquons, en particulier, que les noms de villes sont presque tous (il n'y a d'exception que pour Lauriacum et peut-être Tiburnia) employés à l'ablatif. M. S. pense que l'emploi de Feban au nominatif, pour Feva, vient d'une confusion avec l'accusatif Feban ou Fevan, et que de cette confusion sont venues les formes accusatives Febanem ou Fevanem. Il faut rapprocher l'accusatif Febanem d'une foule de noms analogues, Ægila, Cuppa, Leuva, etc., que nous voyons avoir deux déclinaisons parallèles, et donner Ægilæ-am-a et Ægilanis-i-em-e, Cuppanis, Leuvanis, etc. Cette seconde forme de déclinaison est même celle qui est le plus en usage au vre siècle, et Feban doit être une forme de latin vulgaire provenant de la forme Febanem.

M. Sauppe a fait précéder la Vita Severini d'un hymne en l'honneur du saint composé, d'après l'oeuvre d'Eugippius, dans le monastère napolitain (Castellum Lucullanum), où il se retira en 488, lorsque, sur l'ordre d'Odoacre, tous les Romains du Norique revinrent en Italie. Ozanam l'avait publié, le premier, dans ses Documents inédits pour servir à l'histoire littéraire de l'Italie (Paris, 1850, p. 241 et s.) d'après le m. unique du Vatican 7172, qui est du 1x° siècle.

G. M.

III.

Handbuch der Archæologie der Kunst, von Dr Carl Bernhard STARK, Professor zu Heidelberg. Erster Band, einleitender und grundlegender Theil. Erste Abtheilung, Systematik und Geschichte der Archæologie der Kunst. Leipzig, Engelmann, 1878, in-8°. - Prix : 6 mark 75 (8 fr. 60).

Il y a trente ans que F. G. Welcker publia, en troisième édition, ce célèbre Manuel de l'archéologie de l'art qui n'est pas un des moindres titres d'Ottfried Müller à la reconnaissance et à l'admiration de la postérité. Welcker mit le livre au courant des découvertes importantes. qui avaient été faites, surtout sur le terrain de l'archéologie orientale, depuis la composition du manuel; ces additions assurèrent à cet important ouvrage toute une période nouvelle de succès et de services rendus. Depuis lors, les découvertes ont continué et elles ont ouvert de nouveaux points de vue; la liste de chaque catégorie de monuments n'a pas cessé de s'allonger par des trouvailles souvent de premier ordre. L'édition de Welcker une fois épuisée, les éditeurs ont donc cherché quelque savant qui pût compléter la quatrième édition comme Welcker avait fait la troisième; mais personne ne voulut se charger de cette tâche. Il a donc fallu se résigner à réimprimer le livre tel quel, sans aucun changement, même avec son Errata; c'est ainsi qu'il a reparu en 1877 chez Heitz, à Stuttgart.

Il est aisé de comprendre pourquoi tous les archéologues allemands qui comptent dans la science ont l'un après l'autre refusé leur concours à cette entreprise. Ottfried Müller a rédigé son livre avant que les investigations de la mythologie comparée eussent montré jusque dans quel lointain passé il fallait aller chercher le sens de beaucoup des mythes dont se compose la religion grecque, avant que l'Egypte eût dit tous ses secrets, avant que Ninive eût livré ses trésors et que l'Assyrie eût aidé à comprendre la Médie, la Perse, la Phénicie, la Lydie et la Phrygie, avant que l'on fût en mesure de se faire une idée exacte de la puissance et des ressources de cette civilisation égypto-assyrienne qui a précédé de tant d'années la civilisation grecque et qui lui a servi d'institutrice et de maîtresse, qui a rendu plus courte pour elle la période des essais et des tâtonnements. Nous savons aujourd'hui que les Grecs sont des continuateurs et des disciples, qui ont conduit jusqu'à la perfection classique les arts dont les procédés leur avaient été transmis par l'intermédiaire des peuples de la Syrie et de l'Asie Mineure: Ottfried Müller les regardait comme des inventeurs. Leur originalité consiste dans la transformation qu'ils ont fait subir aux conceptions qui leur avaient été fournies soit par leurs ancêtres reculés, soit par les nations qui les avaient précédés, vers le sud et l'est, dans les chemins et le travail de la vie policée ; c'est chez eux que tous les germes sont arrivés à la libre et pleine floraison, que l'art et les lettres ont créé des formes achevées, qui ne pouvaient plus périr et qui devaient servir d'éternels modèles à quiconque aime la beauté et veut penser librement. Ottfried Müller se représentait autre

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