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chement à l'hérédité naturelle, quoiqu'il eût fondé une royauté véritable: il ne fit guère que remplacer l'élection directe par une élection à deux degrés. L'empire était divisé entre deux Augustes et deux Césars; quand les Augustes disparaissaient, les Césars prenaient leur place et se choisissaient deux Césars nouveaux. On se trouvait par là à l'abri d'une surprise, et l'empire n'était jamais dépourvu d'héritier; mais le conflit entre l'hérédité et l'élection subsistait toujours et c'est ce qui devait tout compromettre. Quand Galérius et Sévère, devenus Augustes, voulurent choisir des Césars qui n'appartenaient pas aux familles régnantes, le fils de Constance Chlore et celui de Maximien, mécontents d'être mis de côté, se firent proclamer par leurs soldats.

Sans aller jusqu'à prévoir que sa constitution serait si vite emportée, Dioclétien se doutait bien qu'elle n'était pas d'une application facile. Il devait donc souhaiter pardessus tout que l'ordre de succession qu'il avait imaginé fut une fois appliqué dans des conditions favorables qui en assureraient le succès. Un premier succès pouvait en amener d'autres et engager l'avenir. Voilà, selon M. C., ce qui lui fit prendre la résolution d'abdiquer. Il voulait que la transmission du pouvoir se fit la première fois d'une façon régulière, « il désirait être en quelque sorte le témoin de sa propre succession. » Quand il eut conçu ce dessein, il le communiqua à son collègue Maximien pendant les fêtes des Vicennalia qui furent célébrées à Rome avec tant de magnificence. Peut-être n'avait-il pas encore fixé le moment où ils devaient tous les deux quitter l'empire. La grave maladie dont il fut atteint en revenant à Nicomédie dut le décider à ne pas différer plus longtemps.

Telle est l'opinion de M. C. sur les motifs qui amenèrent Dioclétien à déposer la pourpre. Il faut bien avouer qu'elle ne s'appuie sur aucun texte formel; les événements qui suivirent, et que M. C. raconte avec quelque complaisance, n'ont rien qui la combatte ou qui la confirme. Ce n'est donc encore qu'une hypothèse, mais elle paraît plus vraisemblable que les autres, et M. Coen a soin de nous prévenir, au début de son mémoire, qu'il y a des questions dans lesquelles il faut savoir se contenter d'une probabilité.

Gaston BOISSIER.

2.

Matthaei Parisiensis, monachi Sancti Albani, chronica majora; edited by H. Richards LUARD. I, de la Création à 1066, LXXXV et 542 p. (1872). II, de 1067 à 1216, XLVIII et 669 p. (1874). III, de 1216 à 1239, xxvii et 640 p. (1876). IV. de 1240 à 1247, XVI et 665 p. (1877). Londres, Longman et Ci (Rolls series). Prix: 10 sh. chaque.

Il y a longtemps que le besoin d'une bonne édition de la grande chronique de Mathieu Paris se faisait sentir. Le premier éditeur, Parker 2,

1. On sait que l'Historia minor a été publiée de 1866 à 1869, par sir Fr. Madden sous le titre d'Historia Anglorum, 3 vol. (Rolls series).

2. Deuxième archevêque anglican de Cantorbéry, mort en 1575.

en avait publié (1571) le texte à la hâte, sans soin et sans critique, alté rant sans scrupule les mots ou le sens, omettant des phrases, en ajoutant même parfois de sa façon. Réimprimé tel quel à Zurich en 1589 et en 1606, ce texte fut notablement amendé par Wats (1640), mais seulement à partir du règne de Henri II; si d'ailleurs beaucoup de ses corrections sont bonnes, elles ne méritent pas toutes une égale confiance 2; en outre, il ne distinguait pas assez nettement l'œuvre de Mathieu Paris de l'œuvre de ses prédecesseurs, et l'usage s'est perpétué jusqu'à nos jours de citer, par exemple, sous le nom de Paris, la chronique de Roger de Wendover. Enfin Parker et Wats n'avaient publié la compilation de Paris qu'à partir de 1066, la partie antérieure, depuis la création, restant inédite.

L'édition de M. Luard marque un très-grand progrès sur les précédentes: tout d'abord elle est complète; c'est-à-dire qu'elle part de la création. Ce n'est pas cependant que la partie O-C à 1066 soit, à vrai dire, publiée ici pour la première fois; mais elle l'a été sous d'autres noms. On peut, en effet, distinguer trois parties dans l'oeuvre de Paris : 1o une compilation anonyme 3 qui a servi de base aux chroniques universelles connues sous les noms de Roger de Wendover, de Mathieu Paris et de Mathieu de Westminster; 2o la chronique de Roger de Wendover; 3o l'œuvre propre de Mathieu Paris. Malgré les différences qui séparent les reproductions diverses de la chronique anonyme, elle est identique pour le fond dans les textes des trois historiens cités plus haut. Le texte de Mathieu de Westminster a été publié intégralement par Parker (1567; seconde édition en 1570), mais avec autant de négligence que celui de Mathieu Paris; celui de Roger de Wendover l'a été par M. Coxe (1841-1842), mais ce dernier, travaillant pour l'English historical society, n'a commencé à imprimer la chronique de Wendover qu'à partir de 448, année où les Angles et les Saxons furent appelés dans l'ile britannique et où par conséquent commence, à proprement parler, l'histoire anglaise. On pourrait même se demander s'il était bien nécessaire de publier à nouveau une compilation sans valeur originale, que nous connaissions déjà par les travaux de Parker et de M. Coxe. La préface de M. L. au premier volume de la présente édition tend, en effet, à démontrer que Paris n'a pu être l'auteur de cette compilation, qu'il en a adopté sans aucun changement la rédaction primitive, qu'il s'est contenté d'y mettre quelques notes en regard du texte, et d'y faire çà et là des additions en général peu importantes. Or M. Coxe, dans

1. Edition reproduite dans celles de Paris (1644) et de Londres (1680).

2. M. Luard, dans les préfaces des 2° 3° et 4° vol., indique les principales inexactitudes qui se trouvent dans les éditions de Parker et de Wats.

3. Voy. sur ce sujet sir Fr. Madden, Hist. Anglor., I, préface; sir Th. D. Hardy, Catalogue of British history, III, p. 317 sq. et préface, et M. Luard, 1 vol de son édition, préface. Aucune question d'ailleurs n'est plus obscure ni plus controversée.

le volume qu'il a donné en appendice à son édition (1845), a collationné avec soin les deux rédactions de Wendover et de Paris, et publié les additions de Paris au texte de son devancier. Le nouvel éditeur aurait donc pu commencer là seulement où Wendover finit. Ne nous plaignons pas cependant: M. L. nous donne, sous une forme commode et correcte, le texte sur lequel a travaillé Mathieu Paris; il abrège d'autant le travail des érudits qui aborderont une étude complète sur l'origine de l'historiographie au monastère de Saint-Albans.

Ajoutons que, par une ingénieuse disposition typographique, il est facile de voir du premier coup ce qui est de Paris et ce qui appartient à ses devanciers les parties non originales sont imprimées en petits caractères; de cette façon, les annotations et additions de Paris sautent aux yeux. Il faut espérer qu'avertis de la sorte, on ne citera plus, sous le nom de Paris, les parties des Chronica majora dont il n'est pas l'auteur.

Chaque volume de la présente édition est précédé d'une préface, où sont étudiés les mss. qui servent de base à la partie du texte comprise dans le volume. Ce système présente l'inconvénient grave de disperser les diverses parties d'un même travail, et d'en rendre l'étude pénible. M. L. a réservé pour son dernier volume ce qu'il doit dire sur la vie du chroniqueur, sur sa valeur comme historien, sur le degré de confiance qu'on peut accorder à son témoignage. C'est très-prudent et très-sage; mais pourquoi ne pas donner, dans le premier volume, une étude complète sur les mss.? M. L. est assurément fixé sur leur valeur et sur leurs rapports réciproques. Pourquoi dès lors nous donne-t-il morceau par morceau le résultat de ses recherches ?

Ainsi les Chronica majora se décomposent en trois parties: 1o de la Création à 1188 (ms. de Cambridge, collège de Corpus Christi, no xxvi, A de l'édit.); 2° de 1189 à 1253 (Ibid., n° xvi, B de l'édit.); 3° de 1253 à 1259 (Musée Britannique, Bibl. Reg., 14, C, VII, à partir du fol. 157. Les fol. 1-156 contiennent le texte de l'Historia minor) 1. M. L. étudie le ms. A et les mss. dérivés dans le premier vol. et dans une partie du second, le ms. B. dans ce même deuxième vol., et nous ne savons pas encore s'il regarde la troisième partie comme étant l'œuvre de Paris ou d'un continuateur anonyme. Ce désordre est fâcheux. De même pour ce qui regarde l'auteur présumé de la compilation contenue dans le ms. A: la préface du premier volume est presque tout entière consacrée à établir que Paris n'en saurait être l'auteur, qu'au contraire elle a servi de base à la rédaction de Wendover qu'elle a été ensuite copiée sans modifications notables par Mathieu de Westminster 2; mais c'est dans le second vol. seulement que l'auteur propose d'attri

1. Voy. la description de ces mss. dans la préface de l'Historia Anglorum, 1a vol., et dans le Catalogue de M. Hardy, III, 153 et suiv.

2. Les idées émises par M. L. sur les rapports entre les mss. de Wendover, de Paris et de Mathieu de Westminster ne semblent pas toutes acceptables, en particulier les conclusions qu'il tire de la comparaison des mss. de Wendover et du ms. A.

buer la rédaction de ce qu'on pourrait appeler les « Grandes Chroniques de saint Albans » à l'abbé Jean « de Cella» (mort en 1214). Cette hypothèse ingénieuse était assurément mieux à sa place dans la préface du premier volume que dans celle du second.

A côté de ces dissertations d'un caractère général, on trouve dans chaque préface des indications nombreuses et précises, par exemple sur les sources de la compilation A, sur les additions de Paris, sur les principales erreurs des éditions de Parker et de Wats, etc. M. L. appelle, entre autres, l'attention sur certaines notes marginales mises par Paris en regard du texte, en vue d'une nouvelle édition de sa chronique. Les unes, telles que < vacat», «< impertinens historie Anglie », indiquent ce que Paris songeait à retrancher, et ce qu'il retrancha, en partie du moins, dans l'Historia minor; mais, en face de chapitres où Paris s'abandonne à ses ordinaires intempérances de langage contre le roi, le pape, les grands du royaume, on trouve aussi des avertissements comme : « offendiculum », « vacat quia offendiculum », qui nous montrent un Paris adouci, devenu plus modéré par l'effet de la politique, de la peur ou de la reconnaissance. Parfois même la rédaction primitive a été corrigée avec soin, et toujours en vue d'atténuer le ton irrévérencieux de certaines expressions. Cette partie est neuve et instructive.

Quant au texte lui-même, autant qu'on en peut juger sans avoir les mss, sous les yeux, la transcription semble très-soignée, et, étant admis une fois pour toutes le système orthographique des Rerum britannicarum medii aevi scriptores, très-exacte; les variantes des mss, sont relevées en note, les renvois aux sources, aux auteurs classiques ou profanes, indiqués dans la marge ainsi que les annotations, les renvois, les corrections de Paris. Les notes géographiques et biographiques facilitent l'intelligence du texte; on les voudrait seulement plus nombreuses. Pour tout ce qui est de la reproduction des mss., cette édition, croyonsnous, peut être considérée comme définitive.

Nous voudrions présenter quelques observations de détail à propos du dernier volume paru (le 4o). P. 104 et 259. Boniface de Savoie, oncle de la reine d'Angleterre, avait occupé le siège de Belley (non Bellay) avant sa nomination à l'archevêché de Cantorbéry. P. 218. Au début de la malheureuse campagne de 1242, Henri III, nous dit Paris, vient de Pons par Archiac « et illinc ad Herbizi »; M. L. identifie ce nom avec celui de Barbezières; c'est plutôt Barbezieux dont il est ici question. Le récit de cette campagne est d'ailleurs assez embrouillé dans notre auteur. M. L. aurait pu renvoyer à la lettre où Henri III raconte à son beaufrère Frédéric II ses mésaventures 1. P. 224, notes 2 et 3, Garsende de Provence était veuve de Guillaume de Moncade (et non pas de Montrate) et mère de Gaston VII vicomte (et non pas comte) de Béarn. P. 236.

1. Rymer. I, 1 part. p. 112. Rymer place par erreur cette lettre en 1232, au lieu de 1242.

Le monastère «< quod dicitur de Verrines », à l'attaque duquel se signala Jean Mansel, est identifié avec une localité de la Charente-Inférieure, Vérines, à 14 kil. N.-E. de la Rochelle; mais Paris place ce monastère « in finibus Burdegalie », et de plus il eût fallu pour arriver à Vérines, passer la Charente, ce qu'un détachement de l'armée anglaise n'eût pas osé faire presque au lendemain des journées de Taillebourg et de Saintes lorsque les Français touchaient à la Gironde et menaçaient Blaye. P. 270, no 1; au lieu de Gerald de Mulemort, archevêque de Bordeaux, lire de Malemort; ailleurs, Bourdeaux est écrit pour Bordeaux (125; cf. p. 244) Cogniac pour Cognac (244), Maubisson, près de Pontoise (p. 485), pour Maubuisson.

P. 44. M. L. publie une annotation marginale de Paris, jusqu'ici inédite, qui intéresse les historiens des Croisades. On savait que le comte de Cornouailles, Richard, partant pour la Terre-Sainte (1240), s'était embarqué à Marseille; on avait aussi tout lieu de croire que Simon de Montfort, époux d'Aliénore, sœur de Henri III et du comte Richard, l'avait accompagné dans cette expédition 1. La note de Paris nous apprend que deux corps d'armée furent mis sous le commandement, l'un de Guillaume Longue-Epée, comte de Salisbury, l'autre sous celui de Simon de Montfort. Philippe Basset, Jean de Beauchamp, Geoffroy de Lusci, Jean de Neville, forestier du royaume, Geoffroy Beauchamp comte de Bedford, Pierre de Brus, Guillaume «< de Furnivallis », chevaliers bannerets (omnes hi vexilla ferentes...), du premier corps, prirent la mer à Marseille avec le comte Richard. « Thomas de Fornivallis », et son frère Gérard, Hugo Wake, Amauri de Saint-Amand, sénéchal de la maison du roi, Wischard Ledet, Puncard (sic) de Dewymes, et son frère Guillaume, Gerard de Pesmes, Foulques de Baugye, Pierre de Chauntenay 2 prirent avec Simon la route de terre à travers la Lombardie et la Pouille, et s'embarquèrent à Brindisi. La comtesse Aliénore accompagna son mari jusqu'au port d'embarquement, et resta en Pouille près de Brindisi « in castro quod cum terra magna datum sibi... » Le reste de la phrase malheureusement est, paraît-il, illisible. Le ms. de la Bibliothèque Cottonienne, Nero D. v, qui est une bonne copie des mss. A et B. (ms. C de l'édit.), insère la présente note dans son texte, moins la phrase mutilée relative à la comtesse de Leicester. Si mince que soit la trouvaille, elle a son prix, et il convient de terminer ce compte-rendu en remerciant M. L. du service qu'il rend aux études historiques par cette nouvelle édition des Chronica majora 3.

Ch. BÉMONT.

1. Le dernier historien du comte de Leicester, M. Prothero, en doute. Aux preuves que j'ai déjà données contre les doutes de M. P. (Rev. critique, 1877, n° 34). M. Paris vient en ajouter une nouvelle.

2. Il est regrettable que M. L. n'ait essayé de donner aucun détail sur ces personnages.

3. On annonce qu'une thèse sur Mathieu Paris doit être prochainement soutenue à la Faculté des lettres de Par is.

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