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L'UNIVERS.

voyant de bonne heure des désastres, n'avaient accepté pendant l'usurpation que le second rôle, dans lequel il est permis, tout en amassant beaucoup d'argent, d'éviter une haine implacable. Ils avaient pensé à se faire aimer et considérer sans cesser de s'enrichir. Aussi, quand les empereurs français et leur gouvernement imprudent, qui, à l'ordinaire, avait cru la possession éternelle, eurent été détruits, les Vénitiens seuls se trouvèrent avoir mérité des égards, et leurs intérêts furent respectés. Ce fut alors qu'on établit pour eux le droit d'avoir un chef de la nation qui fut appelé bailli, ou bayle, et dont l'autorité, sous les Turcs, devint l'autorité diplomatique d'un représentant de la république.

Cependant, Venise avait acquis précédemment et conservé tant de provinces, qu'il n'y avait plus de proportion entre la métropole et ses colonies. Il fut même question d'abandonner Venise, et de transporter le siége de la souveraineté dans une des possessions de la mer Méditerranée. Cette idée, empruntée de Constantin, trouva des partisans. On demanda les suffrages, et l'opinion contraire, c'est-à-dire celle qui voulait que l'on restât à Venise, ne prévalut que d'une voix, que l'on appela la voix de la Providence. Combien a dû être solennel ce débat pour le déplacement d'une capitale, pour une renonciation probable à la langue maternelle, un changement de patrie, une sorte de parti pris de se déclarer Grecs!

Ce que Tribonien, auteur du Digeste, appelé en grec les Pandectes, ouvrage prodigieux sous le rapport de la multiplicité et de la variété des objets qu'il embrasse; ce que Tribonien avait fait pour la législation de l'empire, Pantaleon Giustiniani, Thomas Centranigo, Jean Michieli, et Étienne Badouer l'exécutèrent pour Venise. Voilà les noms de ceux que la gratitude publique désigne comme coopérateurs de Jacques Tiépolo dans cet utile travail.

Le règne du doge Zéno fut rempli par une guerre continue de onze

à soutenir contre celle de Gênes. Ce ans, que la république de Venise eat fut vers l'an 1256 qu'éclata avec plus de fureur, entre ces deux peuples, cette aversion née de la jalousie du commerce, l'une des plus impitoyahommes les uns contre les autres. bles jalousies qui puissent armer les Gênes, sans territoire comme Venise, tirait toute sa force de la navigation. Cette navigation avait pour objet d'aller chercher les marchandiEurope. A cette époque, la boussole ses de l'Asie pour les apporter en n'avait pas encore ouvert les vastes l'Angleterre, de la Normandie, de routes de l'Océan. On n'arrivait de l'Aquitaine, de la Lusitanie et de et ces traversées étaient semées chaque l'Espagne, qu'en longeant les côtes, jour de nouveaux dangers. En vain toute la chrétienté s'interposait pour empêcher les deux républiques de se combattre avec acharnement, on n'obques années. Nous aurons si souvent tint d'elles qu'une trève de quelfaut faire connaître les nuances les occasion de parler de Venise, qu'il plus secrètes de son administration.

d'intérêt sur le mode d'élection des M. Daru donne des détails plein doges, qui fut introduit alors à Venise.

la république, le droit d'élire le doge Pendant les six premiers siècles de avait été exercé par le peuple entier.

électeurs. Cinq ans après, on procéda En 1173, ce soin fut confié à onze quatre commissaires qui désignèrent différemment. Le grand conseil nomma chacun dix électeurs. Le nombre des électeurs fut porté à quarante et un,

en 1249.

à la mort de Renier Zéno.
Tel était l'ordre existant en 1268,

membres du grand conseil, désignés
Pour l'avenir, on régla que trente
par le sort, se réduiraient, par un se-
cond tirage, au nombre de neuf. Ces
neuf conseillers désignaient quarante
électeurs provisoires (savoir, les qua-
tre premiers conseillers, cinq élec-
teurs chacun; et les cinq derniers
conseillers, quatre électeurs chacun ),

On allait aux voix pour la confirmation des quarante électeurs désignés, et sur les neuf voix il fallait en réunir sept, pour que la nomination fút confirmée. On exigeait que ces électeurs provisoires fussent âgés de plus de trente ans.

Ces quarante électeurs provisoires étaient réduits par le sort à douze. De ces douze, le premier désignait trois personnes; chacun des autres en désignait deux. Il en résultait une liste de vingt-cinq autres électeurs, dont la confirmation était le sujet d'un ballottage dans lequel il fallait obtenir neuf voix pour être maintenu sur la liste.

Nous ne nous lasserons pas de continuer ces détails, parce que cette forme d'élection si singulière, et qui avait pour but d'atteindre et de réprimer la malice et la corruption, a duré jusqu'à ces derniers temps.

Je rentre dans ce labyrinthe, et je ressaisis le fil délicat qui nous servait de guide.

Les vingt-cinq nouveaux électeurs se réduisaient par le sort à neuf. Chacun des neuf proposait cinq personnes; d'où résultait une liste de quarante-cinq, où l'on n'était maintenu qu'à la pluralité de sept voix sur les neuf.

Les quarante-cinq électeurs de ce troisième choix se réduisaient à onze par le sort. Les huit premiers nommaient chacun quatre personnes, et les trois derniers chacun trois. Ces désignations produisaient une liste de quarante et une personnes, qui devaient être les électeurs définitifs. On allait au scrutin, et l'on excluait celles qui ne finissaient pas par réunir neuf suffrages sur onze. A mesure qu'on excluait, il était présenté d'autres personnes susceptibles d'obtenir ces neuf voix sur onze.

Cette opération terminée, on soumettait au grand conseil la liste des quarante et un électeurs définitifs, chargés de procéder au choix du doge. Le grand conseil délibérait successivement au scrutin sur chacun d'eux; et si quelqu'un ne réunissait pas la ma

jorité absolue des suffrages, c'est-àdire, par exemple, 51 sur 100, les onze électeurs provisoires étaient obligés de désigner un autre électeur définitif.

Nous espérons que le lecteur ne s'est pas perdu dans ce dédale d'évolutions si compliquées.

Ainsi, la nomination des quarante et un électeurs était, comme on vient de le voir, le résultat de cinq tirages au sort, entremêlés de quatre désignations libres, hautement avouées, et de cing scrutins secrets.

Immédiatement après leur nomination, les quarante et un électeurs définitifs passaient dans une salle, où ils demeuraient enfermés jusqu'à ce qu'ils eussent fait l'élection du doge. Là on traitait splendidement cette sorte de conclave improvisé. On accordait aux électeurs, aux frais de la république, tout ce qu'ils demandaient. On avait soin de donner simultanément à tous les quarante et un ce que chacun avait demandé pour son compte. Toute communication au dehors était sévèrement interdite.

Les électeurs définitifs assemblés commençaient par se choisir trois présidents, qu'on désignait sous le nom de priori. Ils demandaient ensuite deux secrétaires qui devaient être enfermés avec eux. L'assemblée ainsi constituée, ils étaient appelés par rang d'âge, devant le bureau des priori. Là, chacun écrivait de sa main le nom de celui qu'il désignait pour doge, et jetait le billet dans une urne. Deux conditions seulement étaient exigées pour que la candidature fût permise: chaque candidat devait être membre du grand conseil, et âgé de plus de trente ans.

Après avoir compté les billets, l'un des secrétaires en tirait un, et lisait le nom qui y était porté. Alors chacun des électeurs pouvait énoncer librement les reproches qu'il croyait devoir faire au sujet proposé.

Si le nom sorti de l'urne se trouvait celui d'un des électeurs, il était obligé de passer dans un cabinet séparé, pour laisser une entière liberté aux

accusations. Après qu'on avait développé, hors de sa présence, tous les griefs énoncés contre lui, il était rappelé: le prieur, président du jour, lui en faisait part, sans nommer aucun des accusateurs, et on entendait ce que l'accusé avait à dire pour sa justification.

Cette information sur les noms contenus dans l'urne étant terminée, on ballottait successivement les noms de tous les candidats, au moyen de deux urnes, dont l'une était pour les suffrages approbatifs, et l'autre pour les boules d'exclusion; et aussitôt que l'un des noms avait obtenu vingt-cinq suffrages, le prieur déclarait l'élection consommée.

Tel était ce mode d'élection, qui a été jugé fort diversement. Les uns y ont trouvé un chef-d'œuvre de sagacité et de prudence, surtout lorsqu'après avoir laissé agir le sort, puissance aveugle, sans méchanceté et sans intelligence, on autorisait ces désignations libres, manifestation d'une préférence, qui pouvaient trahir des ambitions de famille et des calculs de patronage; d'autres n'ont vu dans ce mode qu'un enchevêtrement de rouages dont il était impossible de diriger le résultat selon les besoins de la république. Tous sont demeurés d'accord que des procédés si méthodiques, si lents, ne pouvaient convenir qu'à un peuple grave et fidèle à ses usages.

Si l'on veut arriver à découvrir le terme qu'on se proposait d'atteindre dans ce mouvement tantôt en avant, tantôt en arrière, dans ces allées et venues que la loi voulait rendre inextricables, dans cette promenade de noms où l'on peut retrouver quelque chose du noble jeu emprunté des Grecs, on sera forcé de convenir qu'il s'agissait de choisir quarante et un électeurs sur les quatre cent soixante-dix citoyens qui composaient d'abord le grand conseil. Le sort désignait neuf personnes, c'était là toute la part qu'on lui laissait, en croyant lui laisser davantage. Le choix raisonné et, on peut le dire, peut-être passionné de ces neuf personnes, formait une

liste de quarante. Ces quarante avaient déja une présomption en leur faveur. Le tirage les réduisait à douze; cela n'empêchait pas que les douze ne fussent le résultat d'un choix, et là, le hasard n'avait rien fait. Une seconde opération de ces douze produisait une liste de neuf autres électeurs, qui devaient aussi avoir des droits à la confiance, ou qui pouvaient être portés par un intérêt, puisqu'ils

avaient été élus. Ces neuf en élisaient onze. L'opération des onze se réduisait à former la liste des électeurs définitifs proposés au grand conseil. Tout le résultat du système était donc de croire mettre un obstacle à la brigue, en ne permettant pas de deviner qui serait chargé de faire la liste de proposition. Mais cette liste une fois faite, l'influence du sort avait cessé; les hommes reparaissaient, l'intrigue reprenait tous ses droits. Dans la suite, de rusés Vénitiens avaient calculé toutes les chances avec une habileté admirable. De nos jours, M. de La Place a composé un travail très ingénieux sur ce mode d'élection. Il croyait que, pour réussir, il fallait que le nom du doge prétendant ne figurât jamais parmi les électeurs et au nombre des choisis par désignation; qu'il suffisait de monter sa machine par des créatures' qu'on chercherait à glisser dans les quarante et un électeurs définitifs, et.qui, à la dernière extrémité, écriraient sur le bulletin le nom convenu. On remarquera dans le courant de cet ouvrage, que la combinaison du conclave pour l'élection des papes est conçue d'une manière bien plus savante, et bien plus propre à assurer un choix sage et avantageux.

Dans la suite, à Venise, comme l'aristocratie fut toujours vaguement tourmentée par la crainte d'un mauvais choix, elle prit le plus sûr moyen de n'avoir pas à se repentir: ce fut de diminuer insensiblement l'autorité du doge.

Il n'en était pas ainsi à Gênes, qui renversait son gouvernement aristocratique pour entrer dans les voies de la démocratie, voies où elle croyait

imprudemment trouver les moyens de frapper plus violemment son ennemi. Voici quelle était, vers 1300, la situation respective des deux républiques. Toutes deux possédaient des cofonies considérables.

Les Vénitiens étaient maîtres de la côte orientale de l'Adriatique, de toute l'île de Candie, d'une partie de celle de Négrepont et de plusieurs ports de la Morée. Les Génois avaient battu complétement les Pisans et comblé la passe de Livourne. Ils étaient alliés avec l'empereur grec, qui avait eu à se -plaindre de Venise. Maîtres de l'île de Scio, établis dans le faubourg de Péra, de l'autre côté du port de Constantinople, ils traversaient autant qu'ils le voulaient le détroit, pour aller fonder des entrepôts dans leurs comptoirs de la mer Noire. Ils occupaient, du consentement des Tartares, Théodosie aujourd'hui Caffa, à l'entrée du canal qui communique de la mer Noire aux Palus-Méotides. Comme on voit, ils balançaient la puissance de Venise. Dans les mers voisines du Bosphore, ils ne prenaient pas le titre de seigneurs du quart et demi de l'empire romain, mais ils étaient parvenus à en faire presque exclusivement le commerce, tandis que les Vénitiens avaient perdu quelque temps à s'agrandir vers la terre ferme, au-delà de leurs lagunes. Enfin les Génois, ces audacieux marchands, en étaient venus au point qu'ils étaient libres d'affamer ou d'approvisionner la ville de Constantinople, dans laquelle ils s'étaient fait attribuer le droit de pêche et des douanes.

Les Vénitiens, non moins audacieux, pouvaient-ils contempler de sang-froid cette autre puissance qui venait éclipser la leur? Îls insultèrent de nouveau les Génois.

Les deux républiques firent des armements que tous les contemporains n'auraient pu égaler, et dont l'appareil n'était, sauf les différences qui résultent de l'état de l'art et des sciences, ni moins dispendieux, ni moins formidable que les flottes des plus puissantes nations de nos jours.

Les Vénitiens prirent l'offensive. Ils allèrent piller les établissements génois de Péra et de la mer Noire. Alors Lamba Doria osa attaquer les forces de Venise dans la mer même dont elle se disait souveraine. Il y eut un long combat devant Curzola, l'une des îles de la Dalmatie. Le feu couvrit en un instant toute la flotte de Venise. Soixante-cinq de ses vaisseaux furent brûlés; dix-huit tombèrent au pouvoir du vainqueur, avec sept mille prisonniers, au nombre desquels était un fameux voyageur vénitien, nommé Marco-Polo (*), qui avait parcouru l'Asie pendant un grand nombre d'années, et l'amiral André Dandolo luimême. Ce malheureux général, assis· sur le banc d'une galère, les mains enchaînées, se voyait conduire à Gênes; mais il ne voulut pas servir au triomphe de Lamba Doria, et pensant qu'un homme de cœur doit chercher des ressources contre la honte, il se fracassa la tête sur le bord du navire, et déroba au peuple de Gênes, qui l'attendait, le plaisir de voir un amiral vénitien vivant et chargé de fers.

Gênes était victorieuse au dehors, mais au dedans déchirée par les factions. Les Guelfes avaient expulsé les Gibelins, et les Gibelins à leur tour avaient chassé les Guelfes. Quelquesuns des mécontents allaient à la guerre, où, dans l'ivresse de la gloire et du butin, ils oubliaient les querelles de parti.

Cependant, à Venise, le grand conseil de nobles, qui s'était peu à peu

(*) Il avait visité Balkh dans le pays de Badaschkan, gravi les monts Belour, pénétré en Chine, et obtenu l'honneur d'ètre présenté à l'empereur mongol. Dans ce pays il apprit quatre langues différentes. A son re

tour, Polo avait longé les côtes de la Chine, traversé le détroit de Malacca, abordé dans l'ile de Ceylan, doublé le cap Comorin, et débarqué à Ormus, dans le golfe Persique. Les récits de Polo ont préparé la découverte du cap de Bonne-Espérance et celle du Nouveau-Monde. Quand nous serons arrivés à l'époque de cette dernière découverte, ce sont encore deux Italiens que nous aurons à signaler à l'admiration publique.

attribué toute l'autorité, cherchait encore à augmenter son pouvoir, et il était secondé par le doge Jacques Gradénigo. Trois patriciens, Marc Qué rini, Badouer et Boémont Tiepolo, conjurèrent contre lui. Il ne leur fut pas difficile de faire entrer dans leurs projets beaucoup de citadins et des hommes avides que, dans tout temps et dans tout pays, l'amour de la nouveauté entraîne habituellement à la suite des conjurations, même les plus insensées. L'exécution du complot fut fixée au 15 juin (1310). Badouer partit le 14 pour Padoue, où il avait rassemblé des complices qu'il devait subitement amener à Venise dans la soirée et pendant la nuit : tous ceux qui faisaient partie de la conspiration se glissèrent sans affectation, et par divers chemins, dans les maisons où des armes avaient été préparées. La nuit avançait. Ces troupes de conjurés se mirent en marche avant le jour, et se rendirent sur la place de Rialto, près du pont (*) (planche 25). Là, Quérini sortit de son palais avec Tiépolo. Les principaux chefs de l'entreprise se répandirent dans les rangs, et ils exaltèrent l'imagination de cette multitude par l'image de tout ce qu'il y a de plus puissant sur les hommes, le pillage, la gloire, la vengeance, la patrie et la liberté.

Au lever du soleil, un de ces violents orages, qui sont fréquents au mois de juin en Italie, vint retarder la lumière du jour qui était impatiemment attendue. Le tonnerre, la pluie, l'obscurité, jetèrent quelque désordre parmi les conjurés. Cependant les mécontents attaquèrent des postes isolés, brûlèrent les archives d'un tribunal, pillèrent un grenier public et les boutiques voisines. Ils se décidèrent

(*) La planche 25 représente le pont de Rialto. Il est formé d'une seule arche qui a 89 pieds d'ouverture sur 24 de hauteur, et composé de gros blocs de marbre ou de pierres d'Istrie. Les extrémités viennent hardiment reposer sur de fortes culées, où sont sculptées quatre figures en bas-relief: d'un côté la Vierge et l'ange Gabriel, de F'autre saint Marc et saint Théodore.

ensuite à se mettre en marche, malgré cet épouvantable orage. Tiépolo commandait une division; Quérini se mit à la tête de l'autre. La troupe de Quérini déboucha la première sur la place Saint-Marc; mais quel fut son étonnement quand il la trouva remplie d'hommes armés, qui n'étaient ni la troupe de Tiépolo, ni celle que Badouer avait dû amener de Padoue!

Gradénigo, le doge, en personne, commandait ces hommes armés. Après un combat opiniâtre, les conjurés furent défaits, malgré l'arrivée de Badouer. Sur-le-champ Gradénigo s'oc cupa de la punition des conspirateurs. Quérini avait été trouvé parmi les morts; Tiépolo avait fui; Badouer mal servi par les siens, fut saisi et condamné à perdre la vie.

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C'est alors qu'un conseil de dix nobles fut nommé pour veiller à la sûreté de l'état. On l'arma de tous les moyens de force et de rigueur. On l'affranchit de toutes les formes, de toute responsabilité; on lui soumit toutes les têtes. Il est vrai que sa durée ne devait être que de dix jours, puis de dix encore, puis de vingt puis de deux mois. Mais il fut prolongé six fois de suite pour le même temps. Au bout d'un an d'existence, comme si chaque jour Venise avait besoin d'être sauvée d'une conspiration nouvelle, il se fit confirmer pour cinq ans; après cinq ans, il se trouva assez fort pour se proroger lui-même pendant dix autres années. Tout ce qu'on put obtenir, à l'expiration de ce terme, ce fut que la nouvelle prorogation serait prononcée par le grand conseil. Enfin, en 1325, cette terrible magistrature fut déclarée perpétuelle.

Ce qu'elle avait fait pour prolonger sa durée, elle le fit pour étendre ses attributions. Institué seulement pour connaître des crimes d'état, ce tribunal s'était emparé de l'administration sous prétexte de veiller à la sûreté de la république il s'immisça dans la nomination aux emplois, les questions de la paix et de la guerre, disposa des finances, fit des traités avec l'étranger, et s'arrogea le pouvoir souve

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